Précédée d’une importante évolution jurisprudentielle, la loi du 4 mars 2002
(article 1142-1 du Code de la santé publique)204 a affirmé le principe selon lequel la
responsabilité en matière sanitaire est avant tout fondée sur la faute, tout en
prévoyant de faire jouer la solidarité nationale dans les autres cas.
A. La responsabilité pour faute
Les professionnels et établissements de santé ne peuvent voir leur
responsabilité mise en cause que dans deux circonstances : en cas de faute et lorsque
leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé. Le
professionnel de santé et l’établissement de santé qui ne fait qu’utiliser le produit
dans le cadre de son activité n’est pas assimilable au fabricant et n’est donc pas
soumis au régime de responsabilité du fait des produits défectueux(205). Seul le
professionnel ou l’établissement qui utilise un produit de sa fabrication qui se révèle
défectueux verra sa responsabilité engagée sans la preuve d’une faute.
B. La responsabilité sans faute de l’établissement
Le principe de la responsabilité pour faute en matière médicale souffre
toutefois deux exceptions qui concernent l’établissement de santé, et non le
professionnel.
1. L’utilisation d’un produit de santé par le service public hospitalier
La jurisprudence dite Marzouk du conseil d’Etat(206) fait peser sur l’établissement
public de santé une responsabilité objective du fait de l’utilisation d’un produit ou
d’un matériel de santé défaillant, parmi lesquels ne sont pas inclus, cependant, les
organes transplantés(207 )(Cf. supra).
2. Les infections nosocomiales
La loi du 30 décembre 2002(208) a instauré un régime d’indemnisation des
victimes d’infections nosocomiales qui diffère selon la gravité du dommage.
La présomption de responsabilité
Les établissements de santé (et non les professionnels de santé) sont
responsables de plein droit des dommages résultant d’infections nosocomiales sauf
s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère (article L 1142-1-1 alinéa 2 du Code
de la santé publique).
L’intervention de l’O.N.I.A.M. (Cf. infra)
Si l’infection nosocomiale est à l’origine d’une incapacité permanente partielle
d’un taux inférieur ou égal à 25 %, la victime sera indemnisée par l’établissement de
santé ou son assureur ; en l’absence de responsable et si les conditions de gravité
exigées par les textes sont réunies : dommage supérieur à 24 % d’I.P.P., 6 mois
d’I.T.T. ou troubles graves dans les conditions d’existence ou inaptitude définitive à
exercer sa profession, la victime sera indemnisée par l’Office national
d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections
nosocomiales.
Si l’infection nosocomiale est à l’origine d’une incapacité permanente partielle
d’un taux supérieur à 25 % ou d’un décès, c’est l’Office national d’indemnisation qui
indemnisera la victime indépendamment de l’existence ou non d’une responsabilité
civile. L’Office dispose alors d’une action récursoire contre les professionnels et les
établissements de santé après démonstration de l’existence d’une faute.
Les autres dommages, c’est-à-dire lorsque la responsabilité d’un professionnel
ou d’un établissement de santé n’est pas engagée, sont pris en charge par la solidarité
nationale à condition qu’ils soient imputables à des actes de prévention, de
diagnostic ou de soins et qu’ils présentent un certain niveau de gravité. C’est le
domaine des aléas thérapeutiques, parmi lesquels les risques de développement
peuvent être inclus. La loi du 4 mars 2002 organise en effet la prise en charge, par la
collectivité à travers l’Office national d’indemnisation, de la réparation des accidents
médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Cf. infra).
204 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, J.O. du 5 mars 2002
205 OUDOT Pascal, L’application et le fondement de la loi du 19 mai 1998 instituant la responsabilité du fait
des produits défectueux : les leçons du temps, Gaz. Pal. 15 novembre 2008, n° 320 page 6
206 C.E., 9 juillet 2003, n° 220437 ; C.A.A. Bordeaux, 25 novembre 2008, n° 07BX01082 ; C.A.A. Nancy,
26 février 2009, n° 07NC00691
207 C.E., 27 janvier 2010, n° 313568 ; PEIGNE Jérôme, L’inapplicabilité de la jurisprudence Marzouk à la
réparation des dommages résultant de la transplantation d’un organe contaminé, R.D.S.S. 2010 page 501
208 Loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, J.O. du 31 décembre 2002