L’objectif visé par l’actuel projet éducatif en faveur des élèves fumeurs, est de les amener à mettre un terme à la consommation du tabac. En d’autres termes, il s’agit de faire en sorte que les élèves fumeurs changent d’habitude vis-à-vis du tabac. Pour comprendre ce changement de comportement qui s’inscrit dans un processus, il importe de s’intéresser au modèle transthéorique du changement de comportement de PROCHASKA et DICLEMENTE (1982).
Faisant le bilan de plusieurs théories développées en psychothérapie sur le changement de comportement, ces auteurs ont conçu le modèle théorique qu’ils ont appelé « le modèle transthéorique du changement » ou « modèle des stades du changement ». Dans ce modèle, PROCHASKA et DICLEMENTE (op.cit.) soutiennent que le changement de comportement s’effectue de façon chronologique sur différents stades ordonnés à savoir: la précontemplation, la contemplation, la préparation, l’action, le maintien et la terminaison ou résolution. Ils ont identifié, neuf procédés de changement (l’augmentation du niveau de conscience, l’éveil émotionnel, la libération sociale, la réévaluation personnelle, l’engagement, la gestion des renforçateurs, les relations aidantes, le contre-conditionnement et le contrôle environnemental (ou contrôle des stimuli) qui peuvent intervenir à l’intérieur de ces stades. Ces procédés se réfèrent aux différents mécanismes que les gens utilisent pour modifier leurs comportements.
Les stades et procédés de changement de comportement susmentionnés pourraient s’appliquer au changement du comportement des élèves fumeurs. PROCHASKA et DICLEMENTE (op.cit.) suggèrent que différentes interventions de la part de l’éducateur sont appropriées à chaque stade, pour aider à modifier la façon de penser, les émotions ou le comportement des individus. La présente étude s’inscrit dans cette théorie, car elle permet de comprendre le changement de comportement, en vue de modifier le comportement des élèves fumeurs sur différents stades.
Ainsi, le stade de précontemplation correspond à celui où les sujets n’ont pas l’intention de modifier leur comportement à risque élevé dans un avenir proche. Les individus ne peuvent réaliser que le changement est possible ou qu’il est bénéfique pour eux, étant donné qu’ils n’ont pas d’informations suffisantes sur les méfaits du comportement à risque. Il convient alors à ce stade, d’entreprendre deux activités éducatives à l’endroit des élèves fumeurs. L’une devra leur apporter l’information nécessaire quant aux notions essentielles sur le tabagisme dont la définition, les causes, et l’autre souligner les conséquences sur leur santé ainsi que leur rendement scolaire. Ce qui permettra d’augmenter le niveau de conscience de ces élèves face aux risques qu’ils encourent à consommer la cigarette et leur permettre d’accéder au stade subséquent : la contemplation.
La contemplation est le stade au cours duquel les individus (les élèves fumeurs) ont sérieusement l’intention de changer de comportement après avoir observé par exemple des images réelles de personnes malades des suites du tabagisme. Il s’agit pour l’éducateur ici, de les y aider à travers une motivation à l’arrêt du tabagisme. Cette motivation semble appropriée à effectuer dans le cadre d’entretiens relatifs aux méthodes et techniques du sevrage tabagique. De la sorte, les élèves manifesteront un intérêt grandissant envers le changement visant à préserver leur santé et prévenir un mauvais rendement scolaire ; ce qui leur permettrait d’atteindre les deux derniers stades qui sont ceux de la préparation et de l’action.
Au stade de la préparation, les sujets ont un plan d’action et ont déjà pris quelques initiatives pour modifier leur comportement dans une certaine mesure. Ceci étant, ils passent au niveau de l’action, qui est le stade au cours duquel des modifications du comportement déclaré ont été effectuées par un engagement personnel. C’est au cours de cette phase la moins stable que les sujets courent les risques de retomber dans leur comportement antérieur. C’est donc le moment approprié pour l’éducateur d’encourager les élèves au cours des entretiens, à rester confiants en leurs habiletés à changer de comportement pour pouvoir accéder au stade du maintien. C’est le stade qui commence après l’atteinte de l’objectif de changement visé, jusqu’au moment où il n’existe plus aucun risque que le sujet retombe dans son comportement antérieur. Ce moment constitue le stade de terminaison, c’est-à-dire la période à laquelle l’auto-efficacité de l’élève fumeur est de 100 % dans toutes les situations qui présentaient auparavant une tentation de fumer la cigarette.
Toutefois, PROCHASKA, DICLEMENTE et NORCROSS (1992), apportent un éclairage au modèle théorique précédemment évoqué (le modèle transthéorique du changement ou modèle des stades du changement). En effet, après avoir observé les individus modifier graduellement leur comportement, ils finissent par faire remarquer que les stades ne suivent pas une progression linéaire, mais qu’ils font plutôt partie d’un procédé cyclique (en forme de spirale) pouvant varier selon les individus (SULLIVAN, 1998), d’où l’élaboration du « modèle en spirale des stades du changement de comportement ».
Selon cette nouvelle conception du modèle, la démarche de changement de comportement d’une personne entraîne habituellement des rechutes aux niveaux précédents, ainsi que des écarts de conduite temporaires et isolés selon WATSON et THARP cités par SULLIVAN (op.cit.). Cependant, si un individu revient à un stade précédent, il ne devrait normalement pas perdre le progrès et le cheminement effectués dans sa démarche. La progression au prochain stade peut survenir plus rapidement qu’avant, en raison de l’expérience acquise lors des stades antérieurs, (SULLIVAN, op.cit.). C’est dire que si l’élève fumeur par exemple dans sa démarche du sevrage tabagique arrivait à rechuter, cela ne saurait être un échec vers l’arrêt définitif de la cigarette. Sa progression à la tentative suivante, sera plus rapide qu’à la ou les précédentes tentatives du sevrage puisqu’il aurait désormais su les pièges à éviter pour ne plus récidiver dans la consommation de lacigarette.
Ce modèle s’avère plus complet, car il tient compte des difficultés qu’il est possible de rencontrer au cours de la démarche de changement de comportement. Il ne prend pas en compte le stade de la terminaison qui est un idéal à atteindre. Il permet à l’’éducateur de mieux comprendre les retours des élèves fumeurs dans les phases précédentes du changement de comportement et les variations individuelles observées, afin de mieux adapter sa démarche psychoéducative à chaque instant. (Voir en annexe XII les exemples de schémas d’application du modèle transthéorique au comportement du fumeur).
Il importe à présent, de faire un bilan critique des travaux antérieurs sur le problème du tabagisme en milieu scolaire, afin de mieux le rendre perceptible à l’esprit.