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§ 1. La défectuosité actuelle

ADIAL

La défectuosité actuelle s’entend d’une défectuosité qu’il est possible de déceler dès la
fabrication du produit. Divers types de défectuosités actuelles existent et ces défectuosités
sont normalement toutes couvertes par l’assurance de responsabilité civile (A). Le défaut de
performance du produit fait exception à la règle puisque la majeure partie des assureurs refuse
de le couvrir (B).

A – Typologie

Comme toute assurance, l’assurance de responsabilité civile après livraison couvre
nécessairement un risque qui n’est pas le produit en lui-même mais sa défectuosité. En effet,
l’assurance responsabilité civile du fait des produits livrés ne joue que lorsque le produit livré
est défectueux. Mais que doit-on entendre par défectuosité ?

Cette défectuosité doit se comprendre comme le fait générateur de la responsabilité.
C’est du fait de ce défaut que la victime a subi un dommage.

L’origine du défaut se situe toujours en cours d’exploitation de l’entreprise assurée. Il
peut s’agir d’« une erreur, une maladresse ou à la négligence commise à l’occasion d’une
opération intellectuelle ou technique lors de la conception, de la fabrication, du
conditionnement ou de la distribution du produit »(126). Cette défectuosité peut recouvrir
différentes situations.

Le vice propre est un défaut interne, préexistant à la remise du produit, et le rendant
impropre à l’usage auquel on le destine. Il peut s’agir à titre d’exemple d’une erreur de
conception. Cependant, cette dernière doit être suivie d’une réalisation matérielle du produit
car dans le cas contraire, elle relèverait de la responsabilité civile dite professionnelle. Peut
également être reconnu comme vice propre une malfaçon, comme par exemple le mauvais
réglage d’une machine qui endommagerait le produit fabriqué, ou encore une insuffisance de
contrôle(127).

En dehors du vice propre, d’autres faits générateurs peuvent être reconnus comme des
défauts du produit. C’est le cas des malfaçons dans l’emballage et le conditionnement(128),
opérations ayant pour objectif de protéger le produit et d’empêcher tout impact climatique ou
intervention externe. Un mauvais emballage ou conditionnement pourrait donc endommager
le produit et le rendre ainsi impropre à la consommation. Le défaut peut également provenir
des conditions de stockage, un mauvais stockage du produit, comme par exemple le non
respect des températures, notamment pour les denrées alimentaires, pouvant être source de
responsabilité pour son auteur. Au niveau de la distribution du produit, des erreurs
d’étiquetage peuvent également donner lieu à responsabilité de l’assuré puisque ce dernier est
tenu d’une obligation de renseignement(129).

La défectuosité du produit peut recouvrir de multiples faits générateurs de
responsabilité, mais les assureurs doivent nécessairement limiter leur garantie notamment par
des exclusions. Cette limitation varie suivant le type de produit et l’appréciation que
l’assureur peut en faire. Face à un produit présentant une forte dangerosité, ce dernier sera
certainement enclin à n’accorder qu’une garantie très restrictive.

B – Le cas particulier de l’inadéquation ou du défaut de performance

Certains types de défectuosité du produit sont parfois exclus de la garantie et cela
même si le produit cause un dommage à autrui du fait de cette défectuosité. C’est le cas du
défaut de performance ou l’inadéquation du produit. Ces dommages devraient être couverts au
titre des dommages causés par le produit puisque le tiers peut subir un dommage financier
notamment en n’ayant pas un produit avec un rendement suffisant.(130) Cependant, les assureurs
répugnent à les couvrir, considérant qu’ils rentrent dans le cadre des risques d’entreprise(131).
L’assuré qui a livré un produit ne présentant pas les caractéristiques convenues, de sorte qu’il
y ait défaut de conformité à la commande et non vice caché, ne peut être garanti à ce dernier
titre.

La clause généralement utilisée est la suivante : « sont exclus de la garantie les
dommages faisant l’objet de réclamations fondées sur le fait que les produits ne remplissent
pas les fonctions ou ne satisfont pas aux besoins auxquels l’assuré les a destinés. Toutefois, la
garantie restera acquise pour les dommages corporels ou matériels directement entraînés par
la défaillance ou l’altération fortuite des produits. »

Exclure simplement l’inadéquation ou le défaut de performance du produit livré, sans
distinction des diverses situations possibles, serait une erreur. En effet, la portée de cette
exclusion n’est pas absolue. Selon Guy COURTIEUX, une distinction doit être opérée selon
que le défaut à l’origine du dommage n’est qu’une simple mauvaise exécution de l’obligation
de délivrance conforme ou si c’est une réelle défectuosité. Si un agent nocif extérieur au
produit livré, notamment l’humidité ou les rayons X, « cause des dégâts tout simplement
parce que le produit livré n’a pas joué son rôle protecteur qu’on est en droit d’attendre de ce
produit, la garantie RC ne saurait être engagée. Si par contre le produit livré, en s’altérant
fortuitement et, plus généralement, en cessant d’exercer son rôle, est par lui-même générateur
de dommage corporels ou matériels, la garantie est due pour la réparation de ces
dommages »(132). La distinction est subtile et en pratique, il ne sera pas facile de la mettre en
oeuvre. L’assureur doit donc être précis lorsqu’il est question du défaut de performance du
produit.

Ce qui est certain, en revanche, c’est que la garantie doit être accordée dès lors qu’il
s’agit d’un produit assumant un rôle de protection ou de sécurité(133). Dans un tel cas, ce sera
précisément le défaut de performance qui sera à l’origine du sinistre et ne pas le couvrir
serait, en quelque sorte, priver la garantie de sa substance(134). Il en va de même lorsque le
produit a des effets nocifs évidents(135).

La Cour de cassation est assez suspicieuse vis-à-vis de ce type d’exclusion qu’elle a
déjà considéré comme privant de tout effet la garantie souscrite(136). L’exclusion à proprement
dite du « défaut ou de l’insuffisance de rendement ou de performance » peut ne pas être
considérée comme suffisamment précise et ainsi ne pas remplir les conditions requises par
l’article L.113-1 du Code des assurances(137). L’assureur ne doit donc préciser le plus possible
ce qu’il entend exclure au titre de ces défauts de performance.

126 COURTIEUX G., RCA, fasc. 581-40, Editions du Juris-Classeur, 25 juillet 2004.
127 CHAUMET F., Assurance de responsabilité de l’entreprise, 4ème édition, l’Argus de l’assurance, 2008, p. 268
128 A titre d’exemple, affaire britannique Donoghue (ou McAlister) v Stevenson, All. England report 1, 1932,
Court of Appeal 562 : un consommateur avait subit un choc traumatisant en découvrant que sa bouteille de
ginger beer contenait les restes décomposés d’un escargot.
129 CHAUMET F., Assurance de responsabilité de l’entreprise, 4ème édition, l’Argus de l’assurance, 2008, p. 269
130 Il s’agira alors de Dommages immatériels non consécutifs, voir infra 3°. p.45
131 Sur le risque d’entreprise, voir infra Section 1 p.52
132 COURTIEUX G., RCA, fasc. 581-40, Editions du Juris-Classeur, 25 juillet 2004
133 Exemples : vaccins, installations de réfrigération ou de chauffage, installation de freinage, système d’alerte
contre le vol ou l’incendie etc.
134 ELIASHBERG C., Risque et assurance des entreprises, 4ème édition, l’Argus de l’assurance, 2006, p. 261
135 Exemples : système de réfrigération provoquant un incendie, sprinklers inondant et endommageant des
marchandises en dehors de tout incendie, composants acides de lubrifiants corrodant des pièces lubrifiées.
136 Cass. Civ. 2ème, 15 fév. 2007, n°05-22.053, n°05-22.054 et n°05-22.055 ; ABRAVANEL-JOLLY S., RGDA
avr. 2007 n°2007-2, p. 419
137 ABRAVANEL-JOLLY S., RGDA avr. 2007 n°2007-2, p. 419

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