La grève générale, peut être définie comme une grève interprofessionnelle qui touche en général tous les travailleurs dans un pays. En ce sens, on peut la considérer comme un prélude à la révolution, du fait qu’elle rend la situation mûre pour que la classe ouvrière puisse s’emparer du pouvoir, même si une grève tendant à être absolument, totalement générale, Voie Ouvrière l’admet, est une utopie : « La grève générale n’existe pas en ce sens qu’il est difficile de dire quand on a affaire à une série de grèves ou à une grève générale. La grève générale où tout, absolument tout, s’arrête, paralysant ainsi la bourgeoisie et son appareil de gouvernement, les faisant tomber l’un et l’autre comme fruits trop mûrs est une utopie, bien sûr »135. Par conséquent, elle permet d’établir une juste appréciation des forces qui s’opposent (le prolétariat en arme face aux armées de l’ordre établi), même si, Trotski l’admet, la grève générale seule n’est pas suffisante pour faire triompher la révolution : « La grève générale ne peut avoir d’influence décisive que si elle est le prélude d’un conflit entre le prolétariat et la force armée de l’ennemi, c’est-à-dire d’une insurrection. Le prolétariat ne peut trancher le problème du pouvoir, problème fondamental de toute révolution, qu’en brisant la volonté de l’armée qu’on lui oppose. La grève générale entraîne des deux côtés la mobilisation et permet une première appréciation sérieuse des forces de résistance de la contre-révolution, mais les développements ultérieurs de la lutte déterminent seuls le prix de sang que doit coûter au prolétariat la conquête du pouvoir. Qu’il faille payer avec du sang ; que dans sa lutte pour conquérir le pouvoir et le conserver, le prolétariat devra savoir mourir et savoir tuer, – nul révolutionnaire véritable n’en a jamais douté »136. Néanmoins, la grève générale, n’en doutons pas, suffit à faire trembler la bourgeoisie capitaliste, car elle témoigne d’une capacité d’organisation du prolétariat, alors mature pour le déclenchement des hostilités révolutionnaires, et c’est bien là ce que redoute le plus cette même bourgeoisie : « Et la grève générale c’est justement quand la classe ouvrière a atteint un degré d’organisation suffisant dans la lutte pour 57
disputer la gestion des entreprises et le pouvoir politique à la bourgeoisie. Ce n’est pas un baroud d’honneur avant la défaite, ce n’est même pas une démonstration victorieuse des forces de la classe ouvrière en attendant que ses organisations s’empressent de redonner le pouvoir aux capitalistes en échange de quelques avantages immédiats et éphémères et de beaucoup de promesses, c’est le commencement de la révolution pour le pouvoir des travailleurs, pour le socialisme, et c’est de cela dont les appareils syndicaux bureaucratisés ont le plus peur »137. La bourgeoisie capitaliste, craint donc la grève générale, car elle y voit le commencement de la révolution, et donc l’avènement du socialisme. Elle craint la grève générale, parce que ce qui fait sa puissance, c’est le nombre d’ouvriers mécontents qu’elle déverse dans les rues. Et c’est ce que nous allons démontrer maintenant.
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