Un tour de France des terres de rugby par la route permet de faire un constat : les Auvergnats ne sont pas peu fiers de leur équipe de rugby. L’une des choses qui frappent le plus lorsqu’on traverse l’Auvergne est de voir toutes ces voitures arborer autocollants, fanions et/ou rubans jaunes et bleus. Nulle part ailleurs nous avons pu remarquer cela, pas même à Toulouse, dans le pays Catalan cher à l’USA Perpignan ou du côté de Toulon. A noter : le simple fait d’assister à un match au Stade Marcel Michelin permet de se rendre compte qu’à côté des drapeaux de supporteurs classiques sont agités des drapeaux auvergnats et des drapeaux jaunes et bleus sur lesquels on peut souvent lire les mentions « Fiers d’être Auvergnats ». Si pareille démonstration se retrouve par exemple dans les certains clubs de football bretons comme Guingamp, où l’appartenance au territoire breton y est scandée, notamment par la présence de nombreux Gwenn-ha-du, le drapeau breton, il est important de noter qu’à la différence d’un territoire comme la Bretagne, l’Auvergne ne suscite pas habituellement, en-dehors du rugby, une ferveur et une fierté aussi manifeste de la part de sa population. En effet, bien au-delà du football, dans la culture populaire bretonne, que nous connaissons bien pour être notamment danseur traditionnel breton et sonneur, le sentiment d’appartenance et de fierté territoriale est très fort, ce qui n’est encore que peu le cas en Auvergne, même si ce sentiment tend à s’y développer de plus en plus.
Les journalistes sportifs soulignent s’ailleurs souvent la ferveur des supporters lors des matches « au Michelin », tel par exemple cette phrase de Mathieu Lartot, commentateur du rugby pour France Télévisions, lors du premier match de Coupe d’Europe de la saison 2010/2011 pour l’ASM, le 9 octobre 2010 : « l’Auvergne est en fusion, l’Auvergne est en ébullition », désignant en réalité les acclamations du public présent dans les tribunes du stade Marcel Michelin ce jour-là.
Les jours de phases finales –lorsque l’ASM est en demi-finale ou en finale du championnat de France- ce sont tous les commerces de la région qui arborent les couleurs jaune et bleue et multiplient les démonstrations de soutien à l’équipe fanion de la région. Le 30 mai 2010, ce sont 150 000 auvergnats qui se sont ainsi pressés dans la cité de Vercingétorix pour y voir brandir pour la première fois le Bouclier de Brennus, trophée récompensant le champion de France de rugby. 150 000 personnes qui, au son de « qui ne saute pas n’est pas Au-ver-gnat » ont réussi l’exploit de faire vibrer le sismographe de la région, celui-là même qui surveille les éventuels sursauts de caractère des volcans d’Auvergne(44). Une preuve, si toutefois il en était besoin, que les supporters de l’ASM Clermont Auvergne se revendiquent fortement Auvergnats et que, quelque part, soutenir cette équipe, c’est manifester son appartenance à la communauté auvergnate.
Le trois-quart centre Sud-Africain Marius Joubert expliquait peu après l’obtention du titre de Champion de France 2010 : « J’ai gagné le Tri Nations avec les Boks [« Springboks » est le nom de l’équipe nationale de rugby d’Afrique du Sud, championne du monde en titre]. J’ai participé à une Coupe du monde. Mais ce que je vois là dépasse l’entendement. (…) Il n’y a qu’en Auvergne que le rugby peut conduire à une telle joie, une telle folie ! »(45).
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