D’après Michel de Certeau, le lieu est ce qui exclut la possibilité d’autres lieux. Il est de l’ordre de la contigüité, de la juxtaposition, de l’exclusion. « S’y trouve donc exclue la possibilité, pour deux choses, d’être à la même place. […] Un lieu est […] une configuration instantanée de positions. Il implique une indication de stabilité (4)».
L’espace, en revanche, est fait de l’intersection d’éléments mobiles : il est fonction « des vecteurs de direction, des quantités de vitesse et [de] la variable de temps ». L’espace est le « lieu pratiqué », comme le discours est le mot habité de sens. C’est justement par le récit que l’espace émerge, par le discours qui lie les lieux entre eux et crée une dynamique dans la stabilité.
Espace ou lieu ? La ville est les deux. La ville est un lieu, délimité jadis par un mur ou un fossé, désormais cerné d’une ceinture d’asphalte, rocade ou périphérique, nouvelle frontière entre ville et banlieue ; et c’est un lieu lui-même composé d’une multitude de lieux : lieux-dits, quartiers, zones. La ville est aussi espace : celui de l’opinion publique, habité par la rumeur, le bagout de la rue, qui, nous dit Michel de Certeau, « manipul[e] les « lieux communs » […] pour les rendre habitables (5)».
4 Michel de Certeau, L’invention du quotidien, pp. 172-175, et citation suivante
5 Michel de Certeau, L’invention du quotidien, Intro LI
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