16. Neozoon, Laie et marcassins, 2009 (manteaux de fourrure recyclés)
C’est sous l’angle du contexte que Paul Ardenne envisage l’art public. Dans Un art contextuel, il explique l’émergence d’un art d’intervention urbaine au début du XXème siècle par le désir des artistes de sortir de l’atelier et de s’emparer du monde réel, et par le doute croissant qui plane sur l’art des musée, « réservé à une élite ou conditionné par des critères esthétiques complexes qui en interdisent l’accès culturel au grand public (18)». Ce qui prime dans la vision privilégiée par Ardenne, c’est l’ancrage dans la réalité.
C’est un « art du monde trouvé (19)», qui annexe la réalité ou s’y annexe, et où l’artiste est à la fois membre actif de la société, partie prenante de cette réalité, et commentateur, observateur vigilant. C’est aussi, et peut-être surtout, un art intelligible : il prend sa valeur par son sens. S’il n’est pas compris, il ne sert à rien, et peut d’autant moins justifier son intrusion non autorisée dans l’espace public.
Bien que l’art « contextuel » puisse aussi bien investir l’espace rural, « entre tous les espaces de la réalité auxquels il a le désir de se “nouer”, la ville est l’un de ceux qu’il affectionne particulièrement (20)». La ville est le lieu de la modernité – par son « activité continue » et par « l’extrême concentration des actes humains » – et c’est l’« espace public par excellence, lieu de l’échange, de la rencontre : de l’art avec un public, en prise directe ; de l’artiste avec autrui ». Ardenne dote l’artiste contextuel d’une « pulsion participative ou “agorétique” (21)», qui, pour lui, « désigne les formules artistiques contextuelles comme des formules d’essence politique, que cette politisation du propos en appelle à l’engagement solidaire, au respect humaniste du prochain ou à des propositions frisant l’insolite ».
17. OakOak, 2011
Sous l’angle du contexte, l’art urbain rencontre des problématiques similaires à celles du Land Art : l’articulation site et non-site, œuvre et représentation de l’œuvre ; la photographie comme témoin nécessaire d’une réalisation éphémère qui pourtant l’arrache à son contexte et la fige dans le temps. C’est aussi un art du ready-made, qui joue sur la ville comme artefact et sur la « transfiguration du banal ». Si ses formes et motivations sont multiples, son contexte est bien ce qui le détermine : c’est avant tout un art de la ville.
18 Paul Ardenne, Un art contextuel, p. 81
19 Paul Ardenne, Un art contextuel, p. 38
20 Ibid., p. 87 et citations suivantes
21 Ibid., p. 37-38 et citation suivante
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