(Figure 3)
Les populations indigènes avant l’arrivée des colons vivent principalement au bord des fleuves et développent une production agricole majoritairement concentrée dans les plaines alluviales et complétée par les ressources halieutiques, la chasse et la cueillette (également sur le « terre ferme »). De petits groupes itinérants parcourent les forêts interfluviales (terre ferme) (Lamotte, 2008).
Puis entre le 16ème et le 19ème siècle, les Européens imposent la concentration des indigènes sur la terre ferme au sein de villages organisés par les religieux. Cette politique a provoqué la disparition d’une grande partie des indigènes et entraîné une diminution de l’exploitation des plaines alluviales (Meggers, 1984).
Une première immigration dans le territoire Baixo Amazonas, mais relativement limitée, a eu lieu avec le boom du caoutchouc. Ce boom a amené l’entreprise Ford à s’installer à l’extrême-sud de l’actuel territoire, puis dans la région de l’actuelle ville de Belterra. Ces investissements, du fait des modèles de production peu adaptés dans un cas, et de l’arrivée du caoutchouc synthétique dans l’autre, se sont soldés par des échecs.
Puis au milieu de la première moitié du 19ème siècle avec la reconquête des plaines alluviales, la taille des troupeaux augmente et des prairies sont créées sur la terre ferme au bord des fleuves et proches des villes, pour accueillir les troupeaux en saison des pluies. Les agriculteurs sont repoussés plus loin dans les terres.
En 1942, un premier projet de colonie agricole organisée sur le territoire est réalisé dans la région de Monte Alegre. 3000 immigrés japonais se réunissent ainsi rapidement en coopérative, l’ancêtre de l’actuelle Cirama (Coopérative intégrale de réforme agraire).
En 1967, un entrepreneur nord américain acquiert de gigantesques terres dans l’actuelle municipalité d’Almeirim et met en place le projet « Jari » qui consiste en la plantation de pins et d’eucalyptus pour la fabrication de cellulose qui est encore en service, mais dorénavant contrôlée par un groupe brésilien.
Puis à partir de 1970 les grands projets de la dictature sont engagés: construction de la transamazonienne qui passe au sud du BAM (arrivée de nombreux migrants en provenance du Nordeste) et de la BR163 qui relie Cuiaba, dans le Mato Grosso, et Santarém, chef-lieu du territoire. Une route reliant les villes de la rive gauche de l’amazone (Oriximina, Obidos, Alenquer et Monte Alegre) est de même construite. Puis la foret nationale tapajos (Flona) est créée en 1974 dans le territoire, le long de la BR163. Dans cette même période des « projets d’assentamentos dirigés » intégralement contrôlés par l’INCRA sont mis en place. C’est à cette période que le « plateau de Santarém » est colonisé. La progression des prairies continue le long des routes.
À partir des années 80, des « projets d’assentamentos rapides » dans lesquelles l’INCRA, cette fois, n’assure que la démarcation et l’émission des titres de propriété sont installés. Cependant le processus de formation des assentamentos n’a que peu souvent abouti.
En 79, la réserve biologique Trombetas est créée dans la municipalité d’Oriximiná et une entreprise minière (Mineração do norte) s’installe pour exploiter le bauxite dans ce qui deviendra plus tard, en 89, la forêt nationale Saraca Taquera, voisine de la Réserve.
À partir de 1989, des territoires spéciaux sont créés pour les peuples indigènes et quilombolas (communautés issues des descendants d’esclaves fugitifs) qui leur confèrent une plus grande souveraineté vis-à-vis des autorités et leur permettent de bénéficier de fonds supplémentaires. Ainsi la première réserve indigène (TI Nhamunda/mapueira) est créée en 1989 au nord ouest du territoire. Puis quatre autres terres indigènes seront créées plus tard au nord du territoire sur de grandes surface (TI do tumucumaque et la TI do Rio Paru do este en 1997). Quelques communautés indigènes ont été reconnues ou sont en cours de reconnaissance le long des fleuves Tapajos et Arapiuns, dans la muncipalité de Santarém.
À partir des années 2000, la nature Quilombola de certaines communautés est reconnue, en particulier au nord-est de la ville d’Oriximiná et à l’est de la ville de Santarém.
Une réserve extractiviste (RESEX) dont la particularité est de comporter une grande partie de sa surface affectée à l’extractivisme, soit l’exploitation des ressources de la forêt autres que celle du bois à des fins commerciales (caoutchouc, miel, cueillette), est créée en 1998 à l’ouest de la municipalité de Santarém, puis une autre a été créée depuis peu dans la municipalité de Prainha.
Depuis 2000, à la suite de l’installation du terminal d’une entreprise de grain à Santarém, des migrants du sud du pays achètent des terres sur le plateau de Santarém et au nord de la municipalité de Belterra et implantent des systèmes de production fondés sur la production de Soja. Cette brusque arrivée et accaparement de terres, associés à des modes de production radicalement opposés à ceux pratiqués dans la région, entraine de nombreux conflits avec les petits agriculteurs et leurs organisations (en particulier les syndicats).
Depuis les années 2000 également, des entreprises sylvicoles plus ou moins légales développent leurs activités entre les municipalités de Santarém et de Juruti, ce qui provoque des conflits avec les habitants. Au contraire, l’installation de l’entreprise Alco qui développe ses activités dans la municipalité de Juruti semble emporter l’adhésion grâce aux perspectives de développement qu’elle offre (notamment, plus d’argent pour la préfecture).
A partir de 2005, dans la plupart des espaces non occupés au nord du territoire, des réserves d’État sont mises en place pour donner une destination à ces terres (préservation) et pour contrer leur appropriation par de grands propriétaires.
En 2005, avec la création d’une agence régionale de l’INCRA dont le directeur est issu des mouvements sociaux (ex-directeur du Ceft-Bam), de nombreux assentamentos sont créés. Ils permettent la régularisation accélérée des terres et un soutien de l’Etat et du gouvernement fédéral. L’objectif est de stabiliser les agriculteurs familiaux et de limiter l’appropriation des terres par les grands propriétaires. Cependant un grand nombre de ces assentamentos sont déclarés illégaux par la justice fédérale, car suspectés d’être mobilisés par les industries du bois, ce qui bloque le processus de développement des assentamentos. Encore aujourd’hui, un grand nombre d’assentamentos ne sont pas régularisés et peu d’agriculteurs ont obtenus la délimitation de leurs terres.
Il faut ainsi rappeler, qu’au cours de la période contemporaine, l’appropriation illégale de terres a été une pratique constante. Encore actuellement, de vastes régions du territoire sont aux prises avec cette pratique alors que les autorités se révèlent incapables de les combattre.