La directive 2007/36/CE fixe des normes d’exigences communes concernant les droits
des actionnaires de sociétés cotées dont les actions sont assorties de droit de vote. Elle a pour
objectif de faciliter l’exercice des droits des actionnaires dans les assemblées générales,
notamment sur une base transfrontalière, en prenant en compte les possibilités offertes par les
technologies modernes(114). Elle vise non seulement – comme nous l’avons vu précédemment
avec l’étude de l’article 5 de ce texte – à pallier l’accès difficile et lent à l’information des
actionnaires non-résidents (qui détiennent le tiers du capital social des sociétés cotées dans
l’UE), mais encore à rendre plus facile l’exercice du droit de vote à distance en procédant à la
simplification des conditions auxquelles celui-ci est soumis(115).
Parmi les droits conférés à l’actionnaire figure celui d’inscrire, individuellement ou
collectivement, des points à l’ordre du jour et de déposer des projets de résolution (art. 6). Les
législations nationales peuvent subordonner l’exercice de ce droit à une participation
minimale dans le capital de la société, qui ne doit pas dépasser 5 %. Le droit français prévoit
un tel seuil minimal de 5 % (art. L. 225-105 C. Com). Il en est de même de la loi allemande
relative aux sociétés par actions (§ 122, al. 2 AktG). En application de l’article 9 de la
directive, chaque actionnaire dispose par ailleurs du droit de poser des questions concernant
des points inscrits à l’ordre du jour de l’assemblée générale, et la société a l’obligation de
répondre à celles-ci. Les Etats membres sont cependant en droit de prendre, ou de permettre
aux sociétés de prendre des mesures permettant de s’assurer de l’identification des
actionnaires, du bon déroulement des assemblées générales et de leur préparation, ainsi que de
la protection de la confidentialité et des intérêts commerciaux des sociétés.
Les dispositions de la directive qui participent sans doute le plus à la consécration de
la notion d’actionnaire transnational concernent les modalités de l’exercice du droit de vote
des actionnaires. Elles prévoient tout d’abord que la participation et le vote à l’assemblée
générale ne peuvent être soumis à aucune limitation particulière autre que la date
d’enregistrement : les personnes ayant la qualité d’actionnaire à cette date fixée par chacun
des Etats membres sont ainsi habilitées à voter lors de l’assemblée (art. 7). L’article 8 de la
directive constitue une ouverture majeure(116), en ce qu’il contraint les Etats membres à
autoriser les sociétés à offrir à leurs actionnaires « toute forme de participation à l’assemblée
générale par voie électronique ». Il précise par ailleurs que l’utilisation des moyens
électroniques ne peut être soumise à aucune autre exigence ou contrainte que celles qui sont
nécessaires à l’identification des actionnaires et à la sécurité de la communication
électronique, et uniquement dans la mesure où elles sont proportionnées à la réalisation de ces
objectifs. Cette disposition accrédite l’hypothèse selon laquelle « la présence physique de la
personne est toujours plus insignifiante »(117). Elle ne constitue cependant pas une nouveauté
pour le droit français, dans la mesure où, depuis la loi NRE, les sociétés peuvent prévoir dans
leurs statuts la possibilité de participer à distance à l’assemblée générale, par visioconférence
ou par internet (art. L. 225-107-II, R. 225-72 et R. 225-86 C. Com.)(118). Le droit allemand a
pris en compte cette possibilité de participation par voie électronique à l’assemblée générale
en insérant au sein de la loi allemande relative aux sociétés par actions une disposition selon
laquelle les statuts peuvent prévoir, ou laisser à l’appréciation du directoire d’organiser un tel
mode de participation aux assemblées générales (§ 118 al. 2 AktG)(119).
Un autre point essentiel relatif au droit de vote des actionnaires concerne la
représentation, c’est-à-dire l’exercice des droits de vote non pas par les actionnaires en
personne, mais par des intermédiaires – des mandataires – ou par le biais d’un vote par
procuration. Les règles en vigueur sur ce point au sein de l’UE étaient très différentes,
certaines ayant un caractère très restrictif(120). En vertu de l’article 10, chaque actionnaire peut
voter par procuration en confiant ce document à toute personne physique ou morale aux fins
de participer à l’assemblée générale et d’y exercer ses droits en son nom. Les Etats membres
doivent supprimer toute restriction quant aux personnes pouvant être mandatées par un
actionnaire, à l’exception de l’exigence de capacité juridique. Des restrictions en cas de
conflits d’intérêts potentiels entre le mandataire et l’actionnaire sont cependant possibles. Les
législations nationales doivent autoriser les actionnaires à désigner et révoquer leur
mandataire par voie électronique. Elles ne peuvent soumettre la validité d’une procuration à
une exigence de forme autre que la forme écrite. Les Etats membres doivent par ailleurs, en
application de l’article 11, autoriser les sociétés à offrir à leurs actionnaires la possibilité de
voter par correspondance avant l’assemblée générale. La transposition de ces dispositions se
trouve, en droit français, aux articles L. 225-106 et L. 225-107 C. Com. (ainsi qu’aux
dispositions réglementaires correspondantes) et, en droit allemand, au § 118, al. 1 AktG.