L’économie de marché doute d’elle même et génère le doute à son égard. Quand le marché ne parvient plus à équilibrer les égoïsmes le ciment social des valeurs collectives s’en trouve chamboulé. Equité bousculée, responsabilité négligée, individualisme exacerbé, régulation inopérante rendent nécessaire un réel examen de conscience du système. Les idéaux politiques et de création de richesse de l’occident semblent défaillants.
L’économie de marché se montre impuissante à fonder une éthique et un souci de l’intérêt général. Les responsabilités individuelles sont noyées dans la masse des chaînes de crédits et de risques que tout un chacun soutient en voulant tout au moindre prix.
La civilisation occidentale s’écroule car « ses dieux sont impuissants à la sauver » d’après Didier Long qui se fait l’écho d’Augustin D’Hippone. Aujourd’hui ce sont les idéaux de création de richesse de l’occident qui semble défaillants. L’avidité consumériste ne remplit pas le cœur de l’homme et elle vide l’espace capitaliste et politique de son sens. Il faut constater qu’au cour de l’histoire ce sont les religions qui ont fourni les repères de sens qui permettaient d’articuler une éthique personnelle, l’intérêt général et un rapport à cette planète qui sortent d’une simple logique articulée autour de l’appât du gain et de l’accumulation des richesses. Cependant pour André Compte-Sponville dans son ouvrage le capitalisme est-il moral ?, il y’a trois explications au retour de la morale dans nos sociétés :
– le passage d’une génération à l’autre ;
– le triomphe du capitalisme consécutif à l’effondrement de l’union des républiques socialistes soviétiques ;
– « la mort de Dieu » avec un mouvement sans précédent de laïcisation et sécularisation de la société.
A cela s’ajoute le fait que la morale fait son apparition dans les comportements des entreprises, ainsi naît le concept d’éthique d’entreprise qui n’est autre que la version managériale de la morale. Il s’agit essentiellement de changement de discours. La mode est à l’éthique alors chacun balaye devant sa porte. Pour ce faire les entreprises se dotent généralement de codes ou chartes éthiques . L’éthique devient performante, l’éthique fait vendre et peut rapporter beaucoup d’argent.
Toutefois l’éthique comme source de profit est aussi source de nombreuses perplexités. Tout d’abord, la vertu par elle seule peut-elle faire gagner de l’argent ? Cela semble difficile comment une chose aussi immatérielle pourrait-elle être créatrice de richesse. Enfin le choix d’une solution dans une position complexe se fait-il par intérêt ou par devoir ? Pour des raisons morales ou des raisons économiques ? La question revient alors à chercher à savoir ce qui doit guider les stratégies d’investissement dans une entreprise. Si ce choix est censé avoir une valeur morale mais accompli par intérêt, alors la valeur morale est perdue car par définition ce qui est moral doit être désintéressé. Mais on peut se poser la question suivante existe t-il une action totalement désintéressée ? « Felix qui potuit cognoscere rerum » causas. L’éthique d’entreprise n’est alors ni plus ni moins que la réalisation d’actions conformes à la morale, mais dénuées de valeur morale car opérées par intérêt.
Le sujet d’inquiétude, à ce propos, est qu’à force d’utiliser le mot morale à tort et à travers on finit par vider la notion de son sens et l’éthique d’entreprise finit par n’être plus qu’une peau de chagrin. C’est pourquoi il faut tenter de définir clairement quels sont les objectifs visés par une moralisation du capitalisme et fixer des règles claires en la matière.
Association des diplômés de l'Institut des Assurances de Lyon