Si la faute pénale intentionnelle du préposé est susceptible d’engager sa responsabilité civile, en toute opposition avec l’arrêt Costedoat, la garantie du commettant n’en demeure pour autant pas moins maintenue (A). En outre, nous étudierons la combinaison des arrêts Costedoat et Cousin sous forme de tableau récapitulatif (B).
A. LE MAINTIEN DE LA GARANTIE DU COMMETTANT
En affirmant que le préposé condamné pénalement pour avoir commis une faute intentionnelle, fût-ce sur ordre de son commettant, engage nécessairement sa responsabilité civile à l’égard de la victime, la Cour de Cassation a suscité une nouvelle interrogation : la responsabilité civile du commettant peut-elle être toujours recherchée par la victime à titre de garantie ? En réalité, la Cour de Cassation a entendu restaurer ici l’ensemble du régime de responsabilité du commettant du fait de son préposé. Ainsi, l’engagement de la responsabilité civile personnelle du préposé ne fait pas obstacle à ce que la responsabilité civile du commettant soit également recherchée. Ainsi, la victime dispose de deux voies de recours, à l’instar de ce qui se faisait sous l’ancien régime de responsabilité antérieur aux arrêts Société des parfums de Rochas et Costedoat. En effet, elle pourra agir d’une part à l’encontre du commettant et, d’autre part, à l’encontre du préposé. En outre, elle pourra obtenir leur condamnation in solidum, auquel cas le commettant ayant indemnisé la victime pourra se retourner ensuite contre le préposé, l’inverse n’étant pas possible. On retrouve ainsi le souci de faire du préposé auteur de la faute pénale le débiteur final de l’indemnisation.
Se pose alors une question fondamentale : on sait qu’aujourd’hui, seule la condamnation pénale du préposé qui a agi dans les limites de sa mission est à même de rétablir sa responsabilité civile personnelle. Cependant, si aucune poursuite pénale soit sur initiative du parquet soit par la constitution de partie civile de la victime n’est engagée, le préposé demeurera irresponsable et il appartiendra au commettant d’indemniser la victime sans possibilité de recours ensuite contre le préposé. A ce stade, on peut légitiment se demander s’il serait possible que le commettant qui indemnise la victime se constitue partie civile pour bénéficier ensuite d’un tel recours. Autrement dit, peut-on soutenir que le commettant a subi personnellement un préjudice du fait de l’infraction commise par son préposé, lui conférant ainsi le droit de se constituer partie civile ? En effet, l’article 2 du Code de procédure pénale dispose que « L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction ». Aucune réponse précise n’a été encore apportée à cette question.
Pour notre part, on considérera que cette possibilité est difficile à soutenir lorsque le préposé a commis l’infraction pénale intentionnelle sur ordre de son commettant. En effet, le commettant ne peut raisonnablement alléguer avoir subi un préjudice en raison de sa propre directive. Reconnaître le droit pour le commettant de se constituer partie civile dans une telle situation serait donc contraire au principe selon lequel «Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes». En revanche, dans l’hypothèse où le préposé se serait rendu coupable d’une infraction pénale intentionnelle de sa propre initiative, et donc à l’insu de son commettant, la question mérite réflexion.
B. LA COMBINAISON DES ARRETS COSTEDOAT ET COUSIN
Au lendemain de l’arrêt Costedoat, l’Assemblée Plénière, par l’arrêt commenté, a apporté une brèche
considérable au principe de l’immunité du préposé. Le régime de responsabilité du préposé s’en trouve fortement ébranlé.