Au vu du système de surveillance étroit qu’il existe dans les lieux de détention et pour l’avoir vécu, il était clair que nous ne pouvions pas utiliser ce terrain comme champ d’observation. N’importe qui ne peut pas aller en prison et « voir » ce qui s’y passe.
Ainsi, nous étions obligées de recueillir les informations différemment. Nous sommes allées à la bibliothèque pour consulter les mémoires précédents et trouver divers ouvrages. Nous avons pu constater que les thèmes de l’affectivité et de la sexualité dans les milieux carcéraux sont peu abordés. Dans le sens où il existe de la littérature mais elle est diluée dans divers périodiques.
Au départ, nous pensions ainsi que le terrain de recherche était inévitablement les prisons, et la population ciblée les détenus ou éventuellement les praticiens. Mais en cours de route, nous avons dû nous adresser au tissu social entourant d’anciens détenus incarcérés. Il a été beaucoup plus facile pour nous d’aborder le sujet, puisque le poids institutionnel n’était plus présent.
Nous avons eu l’idée d’approcher des associations qui s’occupaient d’anciens détenus.
Cependant, en discutant avec d’autres personnes faisant un travail sur la résilience en prison, il nous a été transmis que certaines associations ne voulaient pas entrer en matière, nous n’avons donc pas entamé les démarches auprès de ces dernières.
Nous avons pu rencontrer un directeur de pénitencier grâce au « bouche à oreille » d’une amie qui le connaît personnellement. Il nous a clairement dit que sans cette amie, il n’aurait pas accédé à notre demande.
Il en a été de même pour d’autres prisons.
Ce dernier nous a accueillies en nous spécifiant que si nous étions venues il y a dix ans en arrière, le sujet étant complètement tabou, nous n’aurions même pas pu aborder ce thème. Mais que de nos jours, il y avait tout de même une évolution dans les mentalités.
Ainsi tous les accès au milieu pénitencier ont été possibles uniquement grâce aux contacts personnels.
Malgré le fait que la société est aujourd’hui considérée comme libérée et plus ouverte, il y a peu d’informations sur la condition de vie, les parcours de vie, l’affectivité et la sexualité des détenus.
En effet, lorsque nous avons construit notre projet lors du module « Travail de Bachelor partie 1 », en 2008, nous avons trouvé deux auteurs connus qui nous paraissait intéressant en matière de sexualité en prison : Dominique Lhuillier et Jacques De la Haye.
Après avoir rencontré le directeur d’un foyer accompagnant des personnes en semi-liberté, nous avons trouvé dans la bibliothèque de la HES-GE, un autre auteur (cité dans la partie corpus théorique), qui a publié un livre avec plus de soixante témoignages de détenus.
Comme écrit dans notre esquisse pour le module « Travail de Bachelor partie 1 », pour nous, il était important de pouvoir comprendre les enjeux d’un sujet dit tabou.
Suite à diverses lectures, nous avons pu constater que lors d’une privation de liberté, l’identité des personnes est fortement touchée.
Ils commencent par être un numéro de dossier, puis, se perdent dans un nombre important de détenus, confinés dans un même endroit et les besoins individuels sont peu pris en compte. Nous souhaitions aller au cœur de ce problème surtout que c’est un milieu sécuritaire où il n’est pas facile d’accéder.
Pour pouvoir aborder des personnes en semi-liberté, nous avons également fait fonctionner notre réseau social. Nous avons pu rencontrer le directeur d’un foyer de personnes vivant en semi-liberté grâce à une connaissance qui a un lien familial avec ce dernier. Il nous a introduites dans le lieu et nous avons pu ainsi, nous présenter aux résidents.
Notre directeur de mémoire nous a également aidées grâce à ses contacts dans le milieu pénitentiaire.
Il a rencontré un autre directeur d’un foyer de personnes vivant en semi-liberté et par conséquence, nous avons pu entrer en contact avec lui par courrier électronique.
Ce dernier étant très pris, il était ouvert à des entretiens téléphoniques.
Il nous a envoyé des observations écrites sur notre grille d’entretien, il nous a permis ainsi une remise en question fort judicieuse sur les thèmes que nous allions aborder.
Pour finir, n’ayant pas pu accéder au champ d’observation qui était la prison, nous avons fait le choix de nous diriger vers des foyers accueillants des personnes en semi-libertés afin que nous puissions rencontrer des hommes avec un parcours carcéral.