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2. L’offre groupée crédit / assurance de groupe emprunteur : une technique licite car entrant dans le champ d’application des exceptions au principe de prohibition des offres groupées

ADIAL

La question qui se pose ici est celle de savoir si l’interdiction édictée par l’ article L. 312-1-2 du Code Monétaire et Financier s’applique aux offres groupées de crédits et d’assurances et, si la réponse est positive, dans quelle mesure de telles offres pourraient s’inscrire dans l’une des deux exceptions prévues par la loi, soit au titre des offres groupées de produits ou de services indissociables, soit au titre des offres groupées dont chaque composants peut être achetés individuellement.

a) La garantie d’assurance peut-elle être assimilée à un produit ou prestation de services groupés au sens de la loi ?

D’abord il est intéressant de souligner que l’article L.312-1-2 du Code Monétaire et Financier se trouve dans un chapitre qui concerne les « Comptes et dépôts » alors qu’il existe un chapitre différent dans ce même code qui traite des « Crédits ».
Il semblerait donc que l’offre groupée crédit-assurance de groupe emprunteur ne soit pas soumise à la prohibition légale des ventes liées posée par cet article.
C’est, notamment, ce que semble penser une partie de la doctrine telle que B. SAINT-ALARY ou encore R. BONHOMME .
C’était d’ailleurs la position de Madame PARLY, secrétaire d’Etat au Budget lors des débats parlementaires sur la loi Murcef puisque selon elle : « les dispositions relatives à l’interdiction des ventes liées dans le secteur bancaire n’ont pas vocation à remettre en cause les articles du Code de la consommation existants en matière de crédit immobilier.
Elles portent sur les produits et services relevant de la convention de compte visée au premier alinéa de l’article 6, et non pas sur les opérations d’épargne et de crédit qui n’y sont pas directement liées » .
Ainsi, l’opération de crédit, exception faite du simple découvert en compte, n’a pas de lien direct avec le compte de dépôt et par conséquent, l’interdiction des ventes liées ne pourrait pas concerner les crédits régis par le Code de la consommation .

Cependant, cette solution oublie le renvoi fait par l’article L.122-1 du Code de la consommation à l’article du Code monétaire et financier qui nous intéresse ici.
Or l’article du code de la consommation est d’application plus large puisqu’il a vocation à régir en général le refus et la subordination de vente de produits ou de prestation de services sans qu’il ne soit fait de distinction en fonction de la nature de ces produits ou de ces prestations de services.

Nous pouvons donc penser que l’article L.312-1-2 du Code monétaire et financier s’applique effectivement au couple crédit / assurance de groupe emprunteur du fait de ce renvoi même s’il se trouve mal placé dans le code.
Cette thèse a d’ailleurs été confortée par les travaux préparatoires de la loi Murcef.
A cette occasion, les parlementaires ont eu à s’interroger sur l’application de la notion de service indissociable au crédit .
Face à la proposition du député Charles de COURSON de déclarer indissociables les prêts immobiliers et les assurances de groupe qui y sont associées, il avait été admis par Madame Nicole BRICQ que l’article L. 312-9 du Code de la consommation rendait déjà obligatoire l’adhésion à une assurance de groupe pour les prêts immobiliers soumis au Code de la consommation. Nous reviendrons plus longuement sur la question de l’offre groupée assurance emprunteur / crédit immobilier à la consommation dans notre deuxième partie.

On peut donc logiquement en déduire que le législateur n’a pas voulu exclure les opérations de crédit de la législation sur les ventes groupées en matière bancaire. Et d’ailleurs, il l’a clairement affirmé à l’occasion de ces travaux en déclarant inopportun le débat sur l’indissociabilité des assurances adossées aux crédits immobiliers.
Pour cette raison, une clarification de la question par voie règlementaire ou jurisprudentielle aurait été souhaitable.
Nous pensons pour notre part que les opérations de crédit sont soumises à l’interdiction des ventes groupées en nous fondant sur l’analyse des débats parlementaires.
Cette question risque de toute façon de devenir rapidement obsolète pour les crédits immobiliers à la consommation avec le projet de loi voté par le Sénat et en cours de vote devant l’Assemblée Nationale, et l’est déjà pour les autres crédits à la consommation.

Suivant cette hypothèse, la prohibition posée par cette disposition suppose que deux conditions soient remplies à savoir, que le prêteur subordonne le crédit à l’existence d’une garantie d’assurance et que celle-ci soit comprise dans le contrat d’assurance de groupe souscrit pour ses emprunteurs.
Dans ce cas il s’agit bien d’une offre groupée au sens de cet article.

Cependant, deux types de dérogations à cette prohibition de principe des offres groupées sont prévus par ce même article.

b) L’offre groupée crédit / assurance emprunteur peut-elle entrer dans le champ d’application des exceptions prévues à la prohibition de principe des offres groupées ?

L’article L. 312-1-2 du Code Monétaire et Financier, qui pose le principe de la prohibition des offres groupées pour les établissements de crédit et les organismes mentionnés à l’article L. 518-1 du même code, prévoit dans le même temps deux exceptions à cette illicéité.

La première concerne les produits ou prestations de service inclus dans l’offre groupée qui peuvent être achetés individuellement. Dans ce cas l’offre groupée devient licite.
Entre dans le cadre de cette dérogation l’hypothèse d’une personne qui peut obtenir le crédit sans adhérer à cette assurance ou encore si une personne qui n’emprunte pas peut demander malgré tout cette adhésion.

Cette possibilité est la même que celle de l’article L. 122-1 du Code de la Consommation même si ce dernier ne l’autorise pas de façon expresse.
Un auteur relevé à juste titre que « la possibilité d’achat individuel qui justifie la faculté au prestataire de proposer parallèlement des ventes groupées de produits ou de services découle directement de l’article L. 122-1 du Code la consommation, bien que cet article ne le prévoit pas directement ».
Ainsi, le législateur n’interdit pas les offres groupées qui peuvent être bénéfiques pour les clients car, « il aurait été d’ailleurs contestable de poser un obstacle de principe à une innovation commerciale constituant une forme de concurrence dans un secteur économique que l’on suspecte souvent d’entente sur les conditions appliquées ».

Mais, dans le même temps, le législateur garde le silence sur le prix des produits ou services qui peuvent être achetés individuellement.
Ainsi, rien n’interdit que le prix de l’offre groupée soit différent de celui des produits ou services achetés isolement et notamment que ces derniers soient plus chers que lorsqu’ils sont proposés dans un package.
Le banquier pourra donc user de son ingéniosité commerciale en permettant aux clients de bénéficier de tarifs plus intéressants lorsqu’ils achètent un package.
Et notamment lorsqu’ils adhèrent à l’assurance de groupe emprunteur qu’il propose.

Cependant, il est bien évident que lorsque le prix des produits offerts séparément est manifestement exagéré par rapport à leur prix dans le package, on serait en présence d’un abus de droit et cette pratique serait certainement sanctionnée.
D’ailleurs la mise en œuvre de ces méthodes de promotion met à la charge des banquiers des obligations informatives fondées sur l’article 7 du décret n° 84-708 du 24 juillet 1984 selon lequel : « les établissements de crédit sont tenus de porter à la connaissance de leur clientèle et du public, les conditions générales de banque qu’ils pratiquent pour les opérations qu’ils effectuent ».
Ce texte a longtemps fondé les obligations d’information du banquier.
Ces devoirs ont été renforcés avec la loi Murcef puisque l’article L. 312-1-1 du Code Monétaire et Financier édicte des obligations plus contraignantes, en l’occurrence la conclusion d’une convention de compte et les informations relatives aux modifications tarifaires en cours de contrat.
Ces nouveaux textes sont susceptibles de s’appliquer lorsque la banque omet de préciser le prix de chaque composante du lot pouvant être acquise séparément, de même que le prix global du package.

Cette exception n’est cependant pas celle qui va nous intéresser en l’espèce puisque l’assurance de groupe emprunteur suppose que le groupe d’assurés soit composé uniquement d’emprunteurs.

La seconde dérogation se base sur le caractère indissociable des éléments de l’offre groupée.
Le problème ici réside dans la définition même de l’indissociabilité : que faut-il entendre par indissociabilité ? .Le texte ne nous donne aucune définition.
Pour les crédits immobiliers à la consommation nous l’avons vu le caractère indissociable résulte de l’article L.312-9 du Code de la consommation qui prévoit le régime juridique de l’adhésion obligatoire à l’assurance de groupe emprunteur.
En revanche, pour les autres types de crédit l’indissociabilité semble pouvoir résulter du fait que l’ensemble des éléments de l’assurance ne peut être trouvé ailleurs que chez le prêteur.
De même, il semble que l’indissociabilité puisse être conventionnelle puisque la cour de cassation admet la licéité de la clause qui fait dépendre le maintien de l’assurance au maintien du crédit instaurant ainsi une indivisibilité et donc une indissociabilité du crédit et de l’assurance de groupe emprunteur.

En conséquence, il semble que les prohibitions légales ne concernent pas l’assurance de groupe emprunteur souscrite et imposée par le prêteur pour l’octroi du crédit.
Ceci semble d’autant plus vrai que l’on est en droit de penser qu’une restriction à la liberté contractuelle ne peut résulter que de dispositions législatives suffisamment claires pour éviter les réflexions telles que celles que nous venons de faire.
Mais, avant de tirer des conclusions trop hâtives, nous allons tenter de définir la notion d’indissociabilité.

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