Cette théorie se situe dans le prolongement du courant sociocognitif de l’apprentissage social (lui même issu du béhaviourisme et du cognitivisme). Elle considère les individus, non pas comme des organismes réactifs et démunis face aux contingences Psychosociologiques, mais comme étant à la fois les produits et les créateurs de leur environnements, comportements et actions. Ces facteurs s’influencent réciproquement et, du coup, enregistrent une dépendance fonctionnelle appelée la causalité triadique réciproque. (Beauchamp, 2008)
Les individus sont donc des agents actifs dans le façonnement de leurs vies, ce qui implique du contrôle et de la régulation de leurs actes (le principe d’agentivité). Or, il apparaît que le sentiment d’efficacité personnelle est justement la pierre angulaire du principe d’agentivité humaine, dans le sens de l’exercice de l’individu d’une influence personnelle sur son propre fonctionnement et sur l’environnement (Rondier, 2004).
L’auto-efficacité ou l’efficacité personnelle(37) (Bandura, 2003) y est liée « […] à la perception d’une personne de sa capacité à exécuter des tâches indépendamment d’autrui. » (Jewett et Lavalle, 2008, p.196). Selon cette théorie, l’efficacité personnelle influence foncièrement les choix des individus en matière d’activités, des efforts consentis pour la réalisation de ces activités et de la persévérance individuelle. Bandura (2003) souligne que les croyances de l’efficacité personnelles émanent :
– Des expériences actives de maîtrise (les succès et échecs de performance du passé), plus un individu expérimente des comportements réussis, plus il gagnera en croyance en ses capacités personnelles à réaliser la performance (Rondier, 2004) et vice versa ;
– L’expérience vicariante ou modelage (résulte de la comparaison normative qu’effectue un individu avec ses pairs dans des situations identiques) ;
– La persuasion verbale, renvoie au fait qu’à travers un processus de questionnements, suggestions et conseils, les individus peuvent être confortés dans leurs croyances en leurs potentialités et atouts à effectuer brillamment un comportement. C’est la rétroaction fournie par l’entourage (parents, pairs enseignants).
Les sujets qu’on persuade verbalement qu’ils possèdent les capacités de maîtriser certaines activités ont plus de chances de produire un effort supplémentaire et de le maintenir que ceux qui doutent d’eux-mêmes et qui se basent sur leurs insuffisances personnelles quand surviennent les difficultés. (Bandura, op.cit., p.156)
– Les états physiologiques et émotionnels (c’est« […] l’information somatique transmise…par l’état physiologique et émotionnel ») (ibid., p.163). Ainsi un individu faisant montre d’un état émotionnel aversif (angoisse, anxiété, stress…) sera amené à douter de ses capacités à réaliser le comportement et par conséquent, conduire à l’échec. (Rondier, 2004) Même l’humeur selon Bandura (1998, cité par Chabrol et Radu, 2008, p.152) influence directement le sentiment de l’efficacité personnelle, « […] une humeur positive la renforce, alors qu’une humeur négative l’affaiblit ».
Selon cette théorie, le sujet social n’émane pas uniquement des circonstances, mais il est aussi doté de capacités à s’autoréguler et à agir sur son propre développement en se basant sur les circonstances de la vie. Il peut faire preuve d’agentivité personnelle pour se positionner comme acteur de ses actes. (Vianin, 2006)
Plus les gens ont un sentiment d’efficacité personnelle fort, et plus ils acquièrent des compétences autorégulatrices, Ces dernières permettent d’analyser la tâche et ses exigences, d’élaborer des scénarii d’actions, de se fixer des objectifs pour encadrer les efforts et de gérer les moments de doute et de stress. Par conséquent, « […] un sentiment élevé d’efficacité autorégulatrice peut faciliter la performance dans divers domaines. », (Bandura, op.cit., p.87) y compris l’apprentissage.
En effet, plus les étudiants perçoivent que leur auto efficacité est à même de leur permettre de répondre aux exigences relatives au niveau d’étude désiré, plus ils vérifient avec application les différents choix d’études et plus leurs intérêts vis-à-vis de ces études s’accroît. (Blanchard, 2005)
Ainsi, les recherches faite en se basant sur la théorie de Bandura ont démontré que les étudiants croyant pouvoir s’auto-réguler et contrôler leur apprentissage ont tendance à se fixer de grands objectifs académiques et atteignent des niveaux élevés de performance par rapport à ceux qui croient ne pas pouvoir gérer leur apprentissage. (Zimmerman, 1998 ; Brophy, 2004)
Nelms (2008), émet avec conviction l’hypothèse que les étudiants ayant un sentiment d’efficacité personnelle faible sont beaucoup plus susceptibles à plagier intentionnellement que ceux avec un sentiment d’effectivité personnelle élevé. Hypothèse effectivement corroborée par Marsden et al. (2005 cités par (Chen et Teresa Ku, 2008, p.80) qui, à l’issue d’une recherche empirique menée au sein de L’Université Nationale Australienne sur 954 étudiants, « […] ont trouvé une forte relation entre l’auto-éfficacité et le plagiat. », plus précisément, une très forte corrélation entre un degré moindre d’auto-efficacité et un degré élevé de plagiat électronique.
Stephens et Gehlback (2007, sités par Anderman et Anderman, 2009, p.165) ont trouvé, dans le même esprit, que les étudiants qui souscrivent à des objectifs de maîtrise personnelles, [les étudiants confiants dont la perception de l’efficacité personnelle est élevée embrassent des objectifs ambitieux (Zimmerman, Bandura et Martinez-pons, 1992)]
« […] enregistrent moins d’instances de plagiat que leur pairs. » (Notre traduction) Pintrich (2003, p.108) souligne lui aussi que les étudiants dont la perception de l’efficacité personnelle « […] ou en terme familier leur confiance en leur capacités à exécuter des tâches » est élevée « essaient de paraphraser les textes, faire des résumés en leurs propres mots ou établissent des cartes heuristiques ». En d’autres termes, les processus cognitifs mobilisés par eux bannissent le plagiat électronique.
L’auto-efficacité donc, telle que préalablement mentionné est «[…] la croyance qu’a une personne de ce qu’elle est capable de faire et non de ce qu’elle sait faire » ( Schunk et Pajares, 2005 , p.118), et à ce titre, les étudiants auto-efficaces se créent des conditions optimales d’apprentissage , ne se laissent pas distraire car croient que leurs efforts seront récompensés, ne se laissent pas découragés « en dépit des obstacles ou devant des échecs temporaires » ( Hellriegel et Stocum, 2006, p.153) et font montre de pugnacité face aux problèmes en usant de stratégies cognitives et métacognitives. Aussi ne voient –ils pas l’utilité de la tricherie moyennant plagiat électronique. (Schunk et Pajares,op.ci)
Murdock et Anderman (2006) dont l’étude a révélé une forte corrélation entre le sentiment d’efficacité personnelle et la tricherie, le plagiat électronique inclus, arguent que, quand les étudiants ont une conviction subjective de leur capacité à réussir dans une tâche académique, la triche n’est plus pour eux une stratégie utile.
Aussi faudrait-il souligner que les étudiants auto-efficaces ne sont pas enclins à plagier, parce qu’ils voient dans l’apprentissage académique, quelque chose qu’ils font pour eux-mêmes plutôt qu’une chose faite à eux ou pour eux. Ils croient que l’apprentissage académique est une activité proactive appelant la propre initiative en terme de processus aussi bien motivationnels et comportementaux que métacognitifs (Zimmerman, 1998,)
37 L’auto-efficacité et l’estime de soi sont souvent utilisées de manière interchangeable alors qu’en fait ces deux concepts signifient deux choses totalement différentes. L’estime de soi « […] évalue les qualités et les compétences du Soi et elle renvoie aux jugements de valeurs de la personne concernant ce qui la caractérise et l’identifie ». (De Saint Julien, 2005, p.142) L’autoefficacité a trait à l’évaluation de ses propres aptitudes alors que l’estime de soi se rattache à l’évaluation de sa valeur personnelle. Une bonne estime de soi ne conduit pas nécessairement à une bonne performance. Pour atteindre celle-ci il faudrait plus que de l’estime de soi, il faudrait une confiance robuste en son efficacité à entamer et poursuivre l’effort que requiert cette performance. Ainsi, des personnes peuvent s’estimer inopérantes et inefficaces dans une entreprise donnée sans perdre pour autant leur estime de soi, parce que leur valeur personnelle n’est pas engagée dans ladite entreprise. (Bandura, 2003) L’auto-efficacité ou le sentiment d’efficacité personnelle n’est pas conçu comme un trait de personnalité stable et immuable mais plutôt comme une « […] une sorte de fonction psychique caractérisant l’interaction entre la personne et son activité » (Miralles, 2007, p.233) D’où son caractère fluctuant selon le temps, les situations et les événements qui peuvent soit le booster soit le faire chuter.