En tant que nouveau président élu et reconnu par l’ensemble de la communauté internationale, Alassane Ouattara avait décidé de mettre à profit cette reconnaissance mondiale dans sa bataille pour anéantir la résistance que Gbagbo, son adversaire du second tour, voulait lui opposer. Ainsi, le Président Ouattara avait écrit à la BCEAO pour demander à la Banque centrale de suspendre tout décaissement ordonné par Laurent Gbagbo qui, après le 28 novembre 2010 n’était plus légitimement fondé à agir au nom de la Côte d’Ivoire. En fait le Trésor public ivoirien détient un compte auprès de la Banque centrale auquel l’Etat se réfère pour ses transactions financières importantes. C’est un découvert qui permet à l’Etat de disposer de liquidité afin de faire face à ses engagements financiers. Tous les Etats membres de la BCEAO fonctionnent de la même manière(158).
Sachant que l’argent est le nerf de la guerre sans lequel aucun Etat ne peut rien entreprendre, le Président Ouattara avait écrit à la BECEAO afin que cette Institution commune n’honore plus les décaissements ordonnés par Gbagbo. Et selon les sources dignes de confiance, la Banque centrale aurait répondu à Ouattara pour lui signifier qu’il acceptait de suspendre ces décaissements à l’ordre de Gbagbo.
En effet le 5 décembre 2010, le président Alassane Ouattara avait adressé au Gouverneur de la BCEAO un courrier dont la teneur suit : ” En attendant des instructions plus précises sur les modalités de fonctionnement des comptes publics ivoiriens ouverts dans les livres de la BCEAO, je vous demande d’instruire nos services d’avoir à soumettre à l’approbation préalable du Premier ministre de Côte d’Ivoire M. Soro Kigbafori Guillaume tout mouvement interne ou en direction de l’extérieur effectué sur les comptes du Trésor public et de ses démembrements ainsi que sur ceux des entreprises financières à participation publique “. Tous les autres guichets auxquels la Côte d’Ivoire s’approvisionnait étaient fermés momentanément. Il en va ainsi de la Banque de France, de la BAD du FMI, de la Banque mondiale, etc. Mais aussi de toutes les structures financières regroupées au sein de l’association des banques et établissements financiers de Côte d’Ivoire.
La seconde mesure importante arrêtée par Alassane Ouattara était le rappel à Abidjan de tous les ambassadeurs que comptait la Côte d’Ivoire à l’étranger. Tous devaient recevoir les directives des nouvelles autorités. Le président Alassane Ouattara avait également adressé des courriers officiels le 07 décembre 2010 à des chefs d’Etat pour mettre fin aux fonctions de plusieurs diplomates ivoiriens à l’étranger.
Au Secrétaire général de l’ONU Ban-ki Moon, Alassane Ouattara avait écrit ceci : ” Excellence monsieur le Secrétaire général de l’ONU, à la lumière de la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire, j’ai décidé de retirer à M. Alcide Djédjé, représentant permanent de la Côte d’Ivoire auprès des Nations Unies ma confiance. Aussi ai-je l’honneur de vous prier de ne tenir à compter de ce jour aucun compte des engagements que celui-ci pourrait être amené à prendre ni de donner crédit à ce qu’il pourrait déclarer en mon nom ou au nom de la République de Côte d’Ivoire et des Institutions. Dans le même temps, je procède à la nomination de son successeur “avait écrit le président Alassane. Qui dans le même élan avait adressé un courrier similaire à M. Manuel Barosso (Union européenne) et au Roi Albert II de Belgique pour mettre fin aux fonctions de la diplomate Marie Gossé, ambassadeur auprès du Royaume de Belgique et de l’Union européenne. Un autre courrier avait été adressé à Nicolas Sarkozy pour également mettre fin aux fonctions de Pierre Kipré en sa qualité d’ambassadeur à Paris.
En outre des courriers similaires avaient été adressé au président Barack Obama et au Premier ministre David Cameron d’Angleterre pour mettre respectivement fin aux fonctions de Koffi Yao Charles (Etats-Unis) et Djangoné Bi (Angleterre).
Au Golf hôtel d’Abidjan où il avait établi temporairement ses quartiers, le Président Ouattara continuait d’enregistrer des ralliements de taille. De hautes personnalités civiles et militaires, tout grade confondus se rendaient à l’hôtel du Golf dans la plus grande discrétion, souvent nuitamment, pour faire allégeance à Alassane Ouattara.
Fait important à souligner, parmi ces visiteurs nocturnes d‘Alassane Ouattara se trouvaient des barons de l’ex-régime. Ils n‘allaient pas tous dans l’intention de solliciter un poste au sommet de l’administration publique mais pour chercher protection auprès du nouveau président élu.
158 Le Nouveau Réveil – 08/12/10 : « Après l’avoir proprement battu dans les urnes, le Président Alassane Ouattara est en passe de faire plier Gbagbo sans jeter ses militants à la rue ou se salir les mains. A travers une batterie de mesures aussi intelligentes que redoutables décidées avec la précieuse collaboration des Institutions financières internationales, le président de la République vient de priver Gbagbo d’un instrument incontournable de la gouvernance : le pouvoir financier ».