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§ 4. Responsabilité personnelle du dirigeant

Responsabilité des dirigeants du fait de leur préposé et la délégation de pouvoir
Dans certain pays, la délégation de pouvoir n’est pas possible : c’est le cas au Brésil notamment.
En France, un dirigeant peut voir sa responsabilité engagée du fait d’une infraction commise par l’un
de ses préposés. Sur le plan pénal, cette responsabilité trouve sa source « soit dans la loi soit dans
une faute personnelle du dirigeant pour défaut de surveillance, de direction de son personnel ou
l’organisation générale de son entreprise »23. Sur le plan civil, hormis le manquement du chef
d’entreprise à son obligation générale de surveillance, les dispositions de l’article 1384 alinéa 5 du
Code civil (à savoir la responsabilité du commettant du fait des préposés) peuvent également être
invoqués.
Néanmoins, la jurisprudence, et notamment l’arrêt de la Cour de Cassation en date du 11 mars
199324, a admis que le dirigeant pouvait s’exonérer de sa responsabilité en prouvant l’existence
d’une « délégation de pouvoirs » et ceci de façon certaine et sans ambiguïté : « Sauf si la loi en
dispose autrement, le chef d’entreprise, qui n’a pas personnellement pris part à la réalisation de
l’infraction, peut s’exonérer de sa responsabilité pénale, s’il rapporte la preuve qu’il a délégué ses
pouvoirs à une personne pourvue de compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires ».

Mais en pratique, « la nécessaire solvabilité du responsable en vue d’indemniser les victimes et
l’impossibilité de déléguer des responsabilités incombant au mandataire , devraient conduire à
retenir en la matière plutôt la responsabilité de l’entreprise ou celle du dirigeant coupable d’avoir
enfreint des obligations auxquelles il était personnellement tenu et non susceptibles de délégation».
Lorsqu’il statue sur l’action civile, le juge pénal met en oeuvre les règles de fond de la responsabilité
civile(…) et applique l’article 1384 alinéa 5 du code Civil. La jurisprudence et notamment l’arrêt
Costedoat25, estime « que n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans
excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant. Ainsi d’après l’analyse
Hubert Groutel26, « le préposé qui a commis une infraction ne pourra désormais être déclaré
civilement responsable, par le juge civil ou pénal, que s’il est établie qu’il a excédé les limites de la
mission qui lui avait été impartie par son commettant ».
Le dirigeant qui agit en qualité de représentant légale de la société peut être l’auteur d’une faute
personnelle détachable de ses fonctions. A ce titre « la responsabilité personnelle d’un dirigeant à
l’égard des tiers ne peut être retenue que s’il a commis une faute séparable de ses fonctions qui lui
soit imputable personnellement »27. Il en est ainsi lorsque, comme le précise l’arrêt rendu par la Cour
de Cassation en date du 20 mai 2003, « le dirigeant commet intentionnellement une faute d’une
particulière gravité incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions sociales » 28. Nous ne
développerons pas davantage la notion de « faute détachable des fonctions » dans le cadre de notre
étude.
A Hong Kong, L’ordonnance stipule également que les employées/salariés ou les entrepreneurs
peuvent engager leurs responsabilités personnelles pour les actes ou omissions commis dans le cadre
de leur fonction. En même temps, l’employeur peut être responsable pour « toute chose faite par
une personne qui travaille sous sa subordination ou « toute chose faites par une personne qui est
l’agent d’une autre personne avec l’autorisation de cette autre personne » à moins qu’il ne démontre
que des mesures ont été prises pour prévenir ce type d’actes.
En Equateur, Responsabilité personnelle des MS (administrators).Il faut noter qu’en règle générale
les « administrators » agissant pour le compte de la compagnie ne sont pas personnellement
responsable pour ce genre d’actes(à savoir Représenter la société dans des opérations non prévus
par les statuts ; Faire des affaires/contracter (business) avec la compagnie qu’il dirige pour éviter
tout conflit d’intérêt ; représenter les partenaires ou les actionnaires lors des AG).
Néanmoins selon la Ley de companias les dirigeants sont responsables pour la performance dans
l’exercice de leur obligations(ils ont une obligation de résultat).
Responsabilité hors cadre des fonctions
D’une part, pour les actes antérieurs à la cessation des fonctions, le dirigeant reste responsable. Le
vote du quitus n’a pas pour effet d’éteindre les actions auxquelles ils peuvent être soumis.

D’autre part, pour les actes postérieurs à leur cessation des fonctions, cela pose problème en cas de
non publication de la cessation des fonctions ( L210-9 al.2 du Code de Commerce) dont la société ne
peut valablement s’en prévaloir. Donc le principe est l’irresponsabilité des mandataires sociaux pour
les faits postérieurs à leur cessation des fonctions à condition que la cessation des fonctions soit
valablement publiée.
Sous-section 2 : Responsabilité aggravée en cas d’ouverture d’une procédure collective
Si par leur faute ou leur imprudence, les dirigeants ont contraint la société au dépôt de bilan, ils
encourent des sanctions pénales, civiles et dans certains cas professionnelles.
Dans ce cas de figure, les dirigeants doivent faire face à une triple responsabilité : responsabilité
civile pour faute de gestion, faillite personnelle et délit de banqueroute. Est seulement concernée la
responsabilité patrimoniale des dirigeants.
Cette responsabilité revêt deux formes : l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif et
l’obligation aux dettes.
D’une part, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif résulte de l’article L 651-2 du Code de
Commerce29. Sont visés par cette action aussi bien les dirigeants de droit à savoir le gérant de SARL,
les membres du directoire, les membres du conseil d’administration et plus généralement tout
dirigeant d’une personne morale. Mais également les dirigeants de fait qui via des « actes positifs de
gestion ont une ingérence effective dans le fonctionnement de la société »30
Un arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 19 mai 199531 précise que la recherche de
responsabilité du dirigeant de fait sur le fondement des articles L 651-1 et L 651-2 du Code de
commerce n’exige pas la mise en cause préalable ou simultanée du dirigeant de droit.
Pour cela il faut prouver que le dirigeant a commis une faute de gestion et que cette faute est à
l’origine de l’insuffisance d’actif c’est-à-dire l’absence d’actifs pour rembourser les créanciers.
Cette action se prescrit pour trois ans à compter du plan de redressement ou de liquidation judiciaire
et à la demande du mandataire judiciaire, liquidateur ou du ministère public. Cette action est
incompatible avec l’action en responsabilité de droit commun contre les mandataires sociaux. A
noter que pour la condamnation elle ne peut pas être supérieure à l’insuffisance d’actif.
Par ailleurs, l’obligation aux dettes sociales prévue par la loi du 25 juillet 2005 sur la sauvegarde des
entreprises a supprimé l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre des dirigeants, personnes
physiques et remplacée par une obligation nouvelle aux dettes sociales. Il s’agit d’une procédure
visant à sanctionner le dirigeant (et pas une action en responsabilité) qui a commis l’une des cinq
fautes énumérées à l’article L 652-1 du Code de commerce, à savoir : « disposer des biens de la
personne morale comme des siens propres ; accomplir des actes de commerce dans un intérêt
personnel sous le couvert de la société ; faire usage des biens ou du crédit de la personne morale
contraire à l’intérêt de celle-ci et à des fins personnelles ; poursuivre abusivement, dans un intérêt
personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements ;
dissimuler ou détourner tout ou partie de l’actif ou augmenter frauduleusement le passif ».
Toutefois les fautes du dirigeant doivent être à l’origine de la cessation des paiements et non à
l’insuffisance d’actifs.
L’article L 652-1 du Code de commerce, précise que la condamnation à l’obligation aux dettes
sociales ne peut être prononcée qu’en cas de liquidation judiciaire.
En Belgique, Responsabilité des dirigeants en cas de liquidation judiciaire (anciennement appelé
faillite)Pour cela il faut prouver une négligence grossière et manifeste. Pas nécessaire de prouver le
lien de causalité entre la faute et la faillite. Les juges limiteront la responsabilité personnelle du
dirigeant s’il apparait que la compagnie avait déjà des actifs insuffisants.

23 Lamy assurances, édition 2009, n°2664, p.1007.
24 Cass. Crim, 11 mars 1993, n°91-83.655, BID 1993, n°7-8, p.28
25 Arrêt Assemblée Plénière, 25 février 2000
26 Responsabilité Civile et Assurance 2001, Chronique n°19
27 Voir en ce sens l’arrêt Cass.Com, 22 mai 2001, n°98-16.379, RCA 2001, Comm. N°265
28 Cass. Com, 20 mai 2003, n°99-17.092, Lamyline
29 Article L 652-2 issu de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises
30 Lamy assurances 2009, n°2472, P. 1010
31 CA Paris, 3ème ch, 19 mai 1995, BRDA 1995, n° 14 p. 5

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