La communauté internationale n‘avait pas la moindre intention de desserrer l‘étau sur le président autoproclamé de la Côte d‘Ivoire et avait commencé à mettre ses menaces à exécution. Ainsi, l‘avion officiel de Laurent Gbagbo, qui se trouvait à l‘aéroport de Bâle-Mulhouse, avait été saisi «à la demande des autorités légitimes (ndlr: du président élu Alassane Ouattara) de Côte d‟Ivoire», avait expliqué un porte-parole du Ministère français des affaires étrangères.
Cette immobilisation avait été révélée par le site internet de la Neue Zürcher Zeitung(NZZ). L‘avion «appartenant à la Côte d‟Ivoire», selon un porte-parole de l‘Office fédéral de l‘aviation civile cité par l‘AFP, stationnait sur l‘aéroport exploité conjointement par la Suisse et la France, mais situé en territoire hexagonal à proximité de la ville de Mulhouse, pour des opérations de maintenance. Cet avion, qui ne serait pas le seul à appartenir au pouvoir ivoirien, devait, avance la NZZ, subir une inspection de la société Jet Aviation, spécialisée dans la construction et l‘entretien d‘avions privés.
La société n‘avait pas commenté l‘information. Un porte-parole des services extérieurs de l‘Union Européenne, qui avait officialisé sa décision de priver de visas Laurent Gbagbo et 18 de ses proches et le principe d‘un gel de leurs actifs, n‘avait non plus souhaité faire de commentaire.
En Afrique, les menaces à l‘encontre du président sortant, qui s‘accroche au pouvoir depuis sa défaite au second tour de l‘élection du 28 novembre 2010, s‘étaient également faites.
Réunis en sommet extraordinaire à Abuja, Nigeria, à la veille de Noël, les chefs d‘Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats d‘Afrique de l‘Ouest (CEDEAO, quinze membres) avaient déploré «le niveau excessivement élevé de pertes en vies humaines» et enjoint à Laurent Gbagbo de se retirer sans délai. «En cas de rejet de cette demande non négociable, la Communauté n‟aura d‟autre choix que de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris l‟usage de la force légitime, pour réaliser les aspirations du peuple ivoirien», avait martelé la CEDEAO par voie de communiqué, menaçant explicitement, pour la première fois depuis le début de la crise, le président illégitime d‘une opération militaire. Aucun détail n‘avait été donné sur la forme qu‘emprunteraient cette opération et la force d‘intervention qui la mènerait, dont les spécialistes considèrent que sa mise sur pied allait nécessiter plusieurs mois.
L‘organisation régionale avait dépêché à Abidjan les présidents de trois de ses membres (Bénin, Sierra Leone et Cap-Vert) pour tenter de faire entendre raison à Laurent Gbagbo et ménager «une sortie de crise par le dialogue», selon le ministre béninois des Affaires étrangères cité par l‘AFP. « Ils seront accueillis en frères et en amis», avait promis le clan Gbagbo.
Ce dernier avait pourtant ouvertement réagi à la mise en demeure de la CEDEAO, qualifiée «d‟inacceptable» par un porte-parole. Les responsables ouest-africains «savent que s‟ils attaquent la Côte d‟Ivoire de l‟extérieur, cela va se transformer en guerre civile à l‟intérieur», avait pour sa part défié Don Mello, un ministre de Laurent Gbagbo.
De son côté, Alassane Ouattara, le président internationalement reconnu, avait brisé le silence dans lequel il se cantonnait depuis début décembre 2010. Il avait sommé les forces de défense et de sécurité(FDS), loyales à Laurent Gbagbo, de se rallier à lui afin «d‟assurer leur mission républicaine de protection des populations contre les miliciens et mercenaires étrangers qui font couler le sang des Ivoiriens».
196 Le Temps.ch – 27/12/10 : « Paris a saisi dimanche l‘avion du président autoproclamé qui stationnait à Bâle-Mulhouse pour opérations de maintenance. Réunie en sommet extraordinaire à la veille de Noël, la CEDEAO a menacé de recourir à la force pour déloger le président autoproclamé ».