Ainsi, nous avons pu démontrer à travers ce mémoire que la pédagogie Montessori constitue, encore aujourd’hui, le fil conducteur de certains enseignants, soucieux du bien être de leurs élèves, de leur développement, de leurs progrès. Nous avons vu que l’ambiance, le mouvement créateur et le renversement du rapport entre le maître et l’élève apparaissent comme des formes typiques de cette pédagogie nouvelle. Elles ont cependant leurs limites : un attachement trop marqué de l’élève à l’enseignant, un complexe d’infériorité de cet adulte, une culpabilité et une remise en cause de ses méthodes d’enseignement, qui les perçoit comme peu acceptables au sein d’un collège. Les pratiques pédagogiques inconscientes de la coordonnatrice ne sont pas nécessairement les seules qui puissent répondre à un enseignement adapté en ULIS. C’est un modèle parmi d’autre.
En quoi le handicap nécessite un accompagnement pédagogique spécifique ? Il demande un suivi individuel de l’élève, une capacité d’innovation, de créativité de la part du pédagogue, ce qui rejoint la pédagogie Montessori. De plus, la déficience, quelle qu’elle soit, entraine un ressenti particulier (compassion ou empathie). Peut-on alors enseigner sans ambiance, sans laisser place au mouvement, sans tisser de liens avec l’enfant, sans mettre un terme à l’opposition entre l’enfant et l’adulte ? Cela nous semble une situation difficile à mettre en œuvre … car l’importance du cadre de travail est égale à celle des relations de confiance.
Enfin, nous apporterons un terme à nos observations en citant Pierre BONJOUR et Michèle LAPEYRE, « « il n’y a pas de pédagogie spéciale pour enfants atteints de tel ou tel handicap, mais une pédagogie qui s’applique à chaque enfant dans ce qu’il a de spécial, qu’il soit ou non handicapé », écrivait déjà Henri Lafay dans son rapport (Lafay, 1986). Tout pédagogue est « spécialisé » à partir du moment où il est soucieux d’offrir à l’enfant un cadre sécurisant et chargé de sens ; à partir du moment où il maintient « une interaction de tutelle », c’est-à-dire une relation entre « le trop » et « le pas-assez », en soutenant suffisamment l’enfant pour qu’il se maintienne dans la situation-problème. Cet enseignant « spécialisé » sait que c’est l’enfant qui est acteur de son savoir.
Il ne cherche pas à répéter ce qui a produit l’échec et s’attache à trouver des stratégies de détour pour que la situation scolaire soit d’abord une expérience formative. » [53]
[53] BONJOUR Pierre. LAPEYRE, Michèle. 2004. Le projet individualisé, clé de voûte de l’école inclusive ? Du discours à la méthode, Le Sémaphore. Ramonville Saint-Agne, Erès, p.67