L‘histoire électorale de la Côte d‘Ivoire rime avec violences et incompréhensions entre les acteurs politiques engagés dans la compétition. En 1990, les premières élections multipartites, après trente ans de monopartisme, avaient déjà donné lieu à des violences, notamment dans le centre ouest du pays. Les élections présidentielles de 1995 se sont déroulées sur fond de violences avec le boycott actif des deux principaux partis politiques d‘opposition d‘alors (le Front populaire ivoirien(FPI) et le Rassemblement des républicains(RDR)) qui ont exigé en vain l‘institution d‘une commission électorale indépendante. Avec l‘élection présidentielle de 2000, l‘on était parvenu à admettre l‘idée d‘une commission électorale indépendante, mais celle-ci avait été dissoute par le général Robert Guéi au moment de la proclamation des résultats qui étaient à l‘avantage de l‘opposant d‘alors, Laurent Gbagbo.
C‘est finalement par un coup de force que ce dernier a pu arracher la victoire dans « des conditions calamiteuses », de son propre aveu. Dix ans après, le même scénario se reproduit, lorsque les résultats de la Commission électorale indépendante (CEI) donnant l‘opposant Alassane Ouattara vainqueur à l‘élection présidentielle sont invalidés par le Conseil constitutionnel qui proclame plutôt la victoire de Laurent Gbagbo. Pourtant, comme l‘avait certifié Young-Jin Choi, le représentant spécial du secrétaire général de l‘ONU en Côte d‘Ivoire, le peuple ivoirien avait bel et bien choisi le candidat Alassane Ouattara comme le vainqueur de l‘élection présidentielle.
Le chemin pour parvenir à une démocratie véritable reste long et difficile. Vingt ans après l‘instauration du multipartisme, la Côte d‘Ivoire n‘y était pas encore parvenue. Elle avait tout de même fait un pas sur l‘organisation pratique et transparente des élections, à travers une commission électorale indépendante. L‘organisation d‘élections libres et régulières était certes une qualité nécessaire, mais la succession et l‘alternance au pouvoir en était une autre et représentait un élément fondamental pour la démocratie.
Page suivante : 6.6.2 Les défis de la cohésion sociale et de la stabilité institutionnelle