Autre fait marquant de l’après ERIKA, qui est également l’un des apports majeurs du
procès ERIKA : la reconnaissance du dommage écologique pur (ou stricto census). Le
procès en est la première véritable reconnaissance et cela aboutira à la directive de 2004 et
à la loi de 2008.
Précisons qu’il ne sera pas fait ici une étude approfondie du dommage écologique strictocensus,
d’autres travaux ayant été réalisés par le passé.
Cependant, un travail sur la pollution, quel quelle soit, ne peut être sérieusement réalisé
sans la mention de ces deux événements majeurs que représentent la directive de 2004 et
la loi de 2008.
Il s’agit donc de donner un aperçu de cette notion et de la législation correspondante, afin
de saisir l’importance qu’elle prend actuellement dans l’esprit des juges. Cette législation
venant indirectement se greffer dans le « millefeuilles » que constitue la réglementation en
matière de pollution des mers par hydrocarbures.
Indirectement seulement car la directive de 2004 ne s’applique pas aux pollutions
maritimes du fait des conventions internationales existantes dans ce domaine.
Comme nous l’avons vu précédemment, la difficulté en cas de marée noire (comme pour
toute autre pollution de la nature) est de chiffrer les préjudices, compte tenu de la difficulté
que constitue la tarification de la faune et la flore.
Le parlement Européen adopte ainsi, le 21 avril 2004, la directive sur la responsabilité
environnementale.
Aux termes de la directive, les dommages environnementaux sont définis comme suit :
– Les dommages, directs ou indirects, causés au milieu aquatique(hormis
pollution des mers par hydrocarbures).
– Les dommages, directs ou indirects, causés aux espèces et habitats naturels
protégés, plus communément appelés dommages à la biodiversité (cela
représente tous les dommages affectant gravement la constitution ou le
maintient d’un état de conservation favorable des espèces et habitats naturels
protégés).
– La contamination directe ou indirecte des sols.
Le principe de responsabilité s’applique aux dommages environnementaux et aux menaces
imminentes de tels dommages lorsqu’ils résultent d’activités professionnelles, dès lors qu’il
est possible d’établir un lien de causalité entre le dommage et l’activité en question.
La directive distingue alors deux situations complémentaires, auxquelles s’applique un
régime de responsabilité distinct: celui des activités potentiellement dangereuses( régime
de responsabilité sans faute) et celui de toutes les activités professionnelles hors annexe III
( activité non répertoriée, donc un régime de responsabilité pour faute) .
Lorsqu’une menace imminente de dommage environnemental apparaît, l’autorité
compétente désignée par chaque État membre oblige l’exploitant (pollueur potentiel) à
prendre les mesures préventives appropriées ou elle les prend elle-même et recouvre par la
suite les frais afférents à ces mesures.
Lorsqu’un dommage se produit, l’autorité compétente oblige l’exploitant concerné à prendre
les mesures de réparation appropriées (déterminées sur la base des règles et principes
énoncés à l’annexe II de la directive) ou elle les prend elle-même et recouvre par la suite
les frais. Si plusieurs dommages se sont produits, l’autorité compétente peut décider de
l’ordre de priorité dans la réparation des différents dommages.
La réparation des dommages environnementaux prend différentes formes selon le type de
dommage:
– pour les dommages affectant les sols, la directive exige que les sols
concernés soient décontaminés jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucun risque
grave d’incidence négative sur la santé humaine;
– pour les dommages affectant les eaux ou les espèces et habitats naturels
(biodiversité), la directive vise à la remise de l’environnement en l’état
antérieur au dommage. À cet effet, les ressources naturelles endommagées
ou les services détériorés doivent être restaurés ou remplacés par des
éléments naturels identiques, similaires ou équivalents, soit sur le lieu de
l’accident, soit si besoin est, sur un site alternatif.
La directive sera transposée en droit Français par la loi du 1er août 2008 sur la
responsabilité environnementale.
Pour résumer l’importance de cette loi, nous pouvons retenir cette phrase du rapporteur de
la loi, Alain GEST : « il ne s’agit pas uniquement de prévoir une réparation pécuniaire,
mais d’éviter la dégradation d’un site ou d’en organiser la remise en état ».