A/ Des fondements jurisprudentiels de l’obligation d’information à une obligation réglementaire
« [L]’intérêt de la rédaction d’une note d’information réside bien sûr dans sa clarté, son
caractère complet et la mise en évidence des données essentielles du choix offert au
contractant, mais il est un second intérêt, tout aussi essentiel, c’est que le contractant auquel
est remise cette note ait le temps de la lire, de l’analyser, d’en mesurer les zones d’ombre que,
profane, il est tenté d’apercevoir à chaque ligne, ce afin de pouvoir poser au proposant toutes
les questions qu’elle lui suggère. » (CA Rennes 15 février 2006 RG 04/07506).
Cette analyse indique la teneur du préjudice que peut subir un preneur d’assurance faute
d’information. L’arrêt rajoute, pour condamner l’assureur au paiement des frais irrépétibles de
la procédure judiciaire, que pour s’être abstenu de préciser que la valeur des unités de
comptes pouvait tendre vers zéro, l’assureur avait manifesté une « déloyauté certaine » – c’est
donc au titre de l’obligation d’exécuter les obligations de bonne foi158 que se fonde
l’appréciation de l’obligation générale d’information.
C’est pour protéger ces intérêts que la jurisprudence a développé une obligation générale
d’information à la charge des professionnels de l’assurance. Elle sanctionne les assureurs
faute d’adéquation entre les besoins exprimés par le prospect et les formules proposées.
L’assureur doit veiller à informer son client des qualités et de l’évolution de son contrat, au
titre d’une obligation générale d’information et de conseil159, qui revête la qualité d’une
obligation de moyens160. La jurisprudence l’apprécie dans le détail des faits : il ne suffit pas
de se dédouaner en apposant sur les documents des formules qui limitent la responsabilité du
professionnel, tels la courante formule selon laquelle « Les performances passées ne préjugent
pas des performances futures », mais d’apporter une information par des actes positifs.
A ce titre, l’existence d’arbitrages peut faire présumer que le souscripteur avait été informé de
l’évolution des valeurs (Cas Com 10 juillet 2010 précité).
B/ Approche pragmatique de l’obligation d’information – la pratique des formations initiées par les assureurs
Les compagnies d’assurance délivrent une information contractuelle, économique et
financière, ainsi que des notions fiscales attachées à leurs produits. Pour celles qui travaillent
avec des intermédiaires, c’est souvent leur réseau d’inspecteurs, secondé par les associations
souscriptrices de contrats collectifs vie, qui les organise localement pour réunir leurs clients
actuels et prospects. Il s’agit d’un véritable discours commercial par lequel ils présentent leurs
chiffres, les rendements de leurs unités de compte (par comparaison avec les valeurs de
référence des marchés sur lesquelles elles se positionnent, quand il en existe), rendent compte
de la gestion qui a été faite des supports dans le passé, au soutien de documentation de
conseils de bon sens pour arbitrer les contrats. Suite à leur exposé, ils offrent à l’auditoire de
répondre aux questions d’ordre général. Ils ne manquent pas de suggérer la prise de rendezvous
en agence pour délivrer un conseil plus personnalisé : un moyen de concilier information
et démarche commerciale, qui sont presque toujours étroitement liées.
C/ L’information par voie publicitaire – le cas particulier de l’information sur les frais d’arbitrage
Même si nous avons souligné la proximité entre discours commercial et information, il
convient que les mentions des documents publicitaires soient exactes et insusceptibles
d’induire en erreur le client.
A ce titre, une décision fait écho à l’article R310-5 qui énonce que “Les titres de toute nature,
les prospectus, les affiches, les circulaires, les plaques, les imprimés et tous les autres
documents destinés à être distribués au public ou publiés […] ne doivent contenir aucune
assertion susceptible d’induire en erreur sur la véritable nature de l’entreprise ou l’importance
réelle de ses engagements.”
Une association avait tenté de répondre au manque de transparence en matière de frais (faute
d’harmonisation) en créant ” un indicateur du coût de l’assurance vie”. Il s’agissait de
regrouper sous la désignation d’un seul taux annuel, tous les frais d’un même produit.
Nombreux sont les assureurs vie et intermédiaires qui s’en sont alarmés. La cour d’Appel de
Colmar161 a condamné cette “association ouverte d’assurés en jugeant qu’une publicité
comparative portant sur des contrats d’assurance-vie, fondée sur la comparaison des seuls
frais mentionnés dans les conditions générales des contrats ou dans les fiches simplifiées
visées par l’Autorité des marchés financiers (AMF), présente un caractère trompeur et de
nature à induire en erreur le consommateur au sens de l’article L. 121-8 du code de la
consommation. En effet, l’annonceur n’ignorait pas que les frais conventionnels pris en
considération étaient théoriques et donnaient lieu à des négociations entre assureurs et
souscripteurs et que, pratiquant d’emblée des taux plus bas, il profitait de cette présentation
fallacieuse. Par ailleurs, en faisant usage de la notion d’indicateur de coût effectif global et
d’indicateur de rentabilité effective globale, il a cherché à donner un caractère quasi officiel
aux résultats de son comparateur.” Un souscripteur ou adhérent pourrait arguer de ces
manoeuvres pour mettre en cause la responsabilité de l’assureur (dont l’association
souscriptrice au titre d’un contrat groupe est, rappelons le, le mandataire).
157 H. GROUTEL, le devoir de conseil in le devoir de conseil en assurance vie :RD Bancaire et bourse janvierfévrier,
1999, suppl. Ingénierie patrimoniale, p. 4
158 Code civil 1134 alinéa 3
159 Cass. 1re civ., 10 juillet 2001 : Resp. civ. et assur. 2001, chron. 21 ; Juris-Data n 2001-010780
160 Cass. 1re civ., 7 mars 1989 : Bull. civ. 1989, I, n° 107
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