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A : Les propositions françaises.

ADIAL

276. Les principales propositions françaises émanent de l’avant-projet de réforme du droit des obligations appelé aussi « avant-projet Catala » du nom de son créateur. Cependant, si l’on examine celui-ci, on ne peut qu’être surpris de sa teneur. En effet, les auteurs de ce projet ont résolument pris le parti d’intégrer la notion d’obligation essentielle et cela malgré toutes les critiques qui ont pu être faites à son encontre . Certes, cet avant-projet n’a pas pour objectif de bouleverser notre droit des contrats. Madame Pascale Fombeur a d’ailleurs parfaitement précisé que « la réforme est l’occasion de reprendre des solutions dégagées par la jurisprudence pour les codifier et répondre à l’objectif d’accessibilité du droit ».

277. C’est ainsi, que l’article 1366 de l’avant-projet dispose que « sauf faute lourde ou dol de sa part, le débiteur n’est tenu de réparer que les conséquences de l’inexécution raisonnablement prévisible lors de la formation du contrat ». Ce texte n’est en réalité qu’une reprise de notre actuel article 1150. Cependant, on peut faire le constat que la faute lourde est consacrée par l’avant-projet . Il resterait tout de même à savoir de quelle manière celle-ci est entendue…Puis quelques articles plus loin, l’avant-projet consacre de manière surprenante la notion d’obligation essentielle, d’une part, et la jurisprudence de la Chambre commerciale du 21 février 2006 qui a sévi notamment avec l’arrêt Faurecia du 13 février 2007 d’autre part. En effet, son article 1382-2 dispose qu’un « contractant ne peut exclure ou limiter la réparation du dommage causé à son cocontractant (…) par le manquement à l’une de ses obligations essentielles ». Cela conforte la solution de l’arrêt susvisé qui, au nom de l’exigence de cohérence contractuelle, annule ou répute non écrite les clauses limitatives de responsabilité qui, en cas d’inexécution d’une obligation essentielle, permettent au débiteur d’échapper à toute responsabilité ou l’astreignent au paiement d’un plafond de réparation dérisoire, parce qu’au regard de l’importance de l’obligation inexécutée, ces clauses sont en contradiction avec l’engagement qu’avait souscrit le débiteur. En détachant très nettement le manquement à une obligation essentielle de la faute lourde, les auteurs ont très certainement eu pour motivation de faire l’économie d’un débat doctrinal portant sur la définition de la faute lourde. Certes, à cette période-là, cet article de l’avant-projet pouvait se justifier car la notion d’obligation essentielle n’avait pas encore révélé ses effets nocifs, mais il semble curieux qu’à l’heure actuelle la disposition demeure dans ce projet. Par ailleurs, il est à noter que l’article ne fait aucune référence à la cause, celle-ci semblant être cette fois-ci plus ou moins évincée . Cependant, cet article laisse planer un doute : il ne parle que des clauses limitatives de responsabilité purement contractuelles, il ne fait aucune mention de celles supportées par décret. De ce fait, on ne sait si le manquement à une obligation essentielle permettra de neutraliser ces clauses. Cependant, de l’avis des auteurs , il semblerait paradoxal que le manquement à une obligation essentielle emporte la suppression de la clause d’origine conventionnelle, mais qu’elle n’emporte aucune conséquence sur de telles clauses lorsqu’elles sont d’origine légale. Ainsi, la notion d’obligation essentielle est consacrée dans la tâche d’évincer les clauses litigieuses.

278. Toutefois, en amont de l’article 1382-2 de l’avant-projet, se trouve un article 1125 alinéa 2 qui semble semer le trouble. En effet, celui-ci dispose que « est réputée non écrite toute clause inconciliable avec la réalité de la cause » et se dispense cette fois-ci d’évoquer la notion d’obligation essentielle . Ainsi, cela consacrerait l’arrêt Chronopost du 22 octobre 1996 réaffirmé plus ou moins par l’arrêt du 18 décembre 2007 . Il s’agit, au nom d’une certaine morale contractuelle et d’une nécessité de cohérence, de neutraliser les clauses limitatives de responsabilité lorsque celles-ci permettent au débiteur de se délier à trop bon compte de son engagement, et de se dispenser de l’exécution de son obligation essentielle. Ainsi, cet article permet tout de même d’envisager avec une certaine sérénité l’avenir des clauses limitatives de responsabilité. Cependant, avec l’article 1382-2 que nous avons étudié précédemment, on ne peut que constater la coexistence dans l’avant-projet de deux règles qui emportent des conséquences radicalement différentes pour la vitalité des clauses limitatives de responsabilité , l’article 1125 étant beaucoup plus conciliant avec ces clauses que l’article 1382-2 qui les raye de la charte contractuelle de manière automatique en cas de manquement à une obligation essentielle, quel que soit l’effet produit sur l’engagement souscrit par le débiteur. Néanmoins, si l’on regarde le nouveau projet de réforme diffusé fin juillet 2008, on constate que la notion de cause est tout simplement remplacée par la vague notion de « contenu certain » . Ainsi, dans cet esprit, il faut certainement penser que les rédacteurs de ce nouveau projet entendent faire prévaloir la notion d’obligation essentielle…et cela d’autant plus que suite aux modifications apportées à ce nouveau projet, il en ressort un nouvel article 87 qui dispose que « toute clause qui vide de sa substance l’obligation essentielle du débiteur et contredit ainsi la portée de son engagement est réputée non écrite » .

279. Il convient enfin de signaler que, contrairement à ce que préconisait certains auteurs , l’avant-projet n’élabore pas une réforme d’ensemble des clauses abusives dans les rapports entre professionnels.

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