La question s’est posée de savoir si un propriétaire non-occupant était recevable à agir en réparation d’un trouble dont, par hypothèse, il ne subit pas les effets . Comme nous l’avons déjà remarqué, la Cour de Cassation a répondu par l’affirmative, en admettant qu’un propriétaire, même s’il ne réside pas sur son fonds, est recevable à demander qu’il soit mis fin aux troubles provenant du fonds voisin . Dans son rapport pour 1995 , la Cour explique que « cette décision règle une question qui n’avait pas encore été jugée : l’action pour trouble anormal de voisinage peut-elle être mise en mouvement par les propriétaires du bien où le trouble est subi, indépendamment du fait qu’ils ne résident plus sur les lieux ? Par la présente décision, la Cour de Cassation s’est orientée vers une solution qui permet au propriétaire d’agir même si l’immeuble est inoccupé et quand bien même la victime directe, locataire ou occupant à titre gratuit, s’abstiendrait de le faire. D’ailleurs, si le bien est loué, la diminution de la jouissance que subira le locataire pourra se répercuter sur le montant des loyers payés et affecter ainsi les revenus du bien, c’est-à-dire finalement la jouissance du propriétaire . C’est « le fonds qui subit un préjudice, plus particulièrement dans sa valeur, en même temps que le propriétaire dans sa jouissance » .
De plus, la jurisprudence a réaffirmé, par un arrêt du 17 mars 2005 que l’on a cité précédemment, l’idée que le trouble de voisinage ne se limite pas aux seuls troubles de jouissance personnelle du bien et que ce trouble peut également consister en une dépréciation de la valeur du fonds. La solution de cet arrêt ouvre largement droit à réparation et s’inscrit dans un mouvement permissif de la jurisprudence. Derrière la personne se trouve donc l’objet de la propriété et il en résulte que sous l’appellation trouble de voisinage, on pourrait trouver désormais non seulement « tout dommage causé à un voisin » mais aussi un « dommage causé à un fonds par un autre fonds » .