14. Plan
S’intéresser à la conception subjective de la faute lourde implique, d’abord, de définir précisément ce que sous-entend cette notion (§1) pour, ensuite, s’attacher aux raisons qui ont pu pousser la jurisprudence et la doctrine à défendre une telle conception (§2).
§1 – La présentation de la conception subjective de la faute lourde
15. Origines jurisprudentielles de la faute lourde
Comme nous avons déjà pu le préciser, les rédacteurs du Code civil n’ont pas tenu à consacrer légalement la notion de faute lourde ce qui fait que celle-ci ne figure pas dans le Code(1). Ce sont alors les juges qui sont intervenus pour faire produire à une telle faute les mêmes effets que la faute dolosive(2). Il est ainsi de jurisprudence constante que la faute lourde est « équipollente » au dol(3). Il convient de bien cerner la signification du terme « équipollent » employé par les juges. Cette équivalence ne tient pas aux concepts mêmes de faute lourde et de dol mais bien à leurs effets. Ainsi, tout comme la faute dolosive, la caractérisation d’une faute lourde permettra au créancier de l’obligation inexécutée de demander l’entière réparation de son préjudice ainsi que l’éviction d’une éventuelle clause limitative ou exonératoire de responsabilité insérée à la convention dont pourrait se prévaloir le débiteur pour écarter ou limiter sa responsabilité contractuelle. Cependant, la définition de ces deux fautes reste autonome. La faute lourde n’est pas une faute dolosive.
16. Définition jurisprudentielle de la faute lourde
Après avoir admis que la faute lourde était équipollente au dol, les juges se devaient d’en apporter une définition. C’est ce qu’ils ont fait en rendant des arrêts consacrant une conception subjective de la faute lourde, c’est-à-dire une conception attachée au comportement répréhensible du débiteur négligent(4). La formule employée par la juges est alors toujours sensiblement la même. Elle consiste à affirmer que « la faute lourde est caractérisée par un comportement d’une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l’inaptitude du débiteur de l’obligation à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il avait acceptée »(5). Cette approche de la faute lourde est dite classique ou traditionnelle car c’est elle qui s’est imposée en droit positif pendant de nombreuses années.
Une telle définition appelle cependant quelques précisions pour cerner clairement ce qu’est et ce que n’est pas la faute lourde.
17. La faute lourde, une faute non intentionnelle
Il convient de relever que cette définition jurisprudentielle de la faute lourde ne fait aucunement référence à un éventuel élément moral(6) nécessaire à sa caractérisation. La conséquence à en tirer est que la faute lourde ne doit pas être analysée comme une faute volontaire, à la différence du dol commis au moment de l’exécution des conventions. La doctrine est, d’ailleurs, unanime sur ce point.
Ainsi, M. LARROUMET écrit que « la faute lourde (culpa lata) est, à n’en pas douter, une faute non volontaire. En cela elle se distingue de la faute dolosive […] »(7). JOSSERAND, souligne également que la faute lourde « ne coïncide pas, dans sa constitution organique, avec le dol ou avec la fraude : si ceux-ci n’impliquent pas toujours et nécessairement […] l’emploi de manoeuvres caractérisées, de machinations, du moins sont-ils, par essence et par définition même, d’ordre intentionnel, au lieu que la faute, même lourde, est pure de tout élément d’ordre malicieux ou malveillant ; si grave que soit le manquement, si élevé que soit le dommage, le coupable « ne l’a pas fait exprès » ; il n’avait pas voulu cela ; le préjudice causé, simple résultante, n’avait pas le but qu’il poursuivait ; en un mot, il était de bonne foi »(8). Dans le même sens, enfin, M. LALOU précise que la faute lourde ne se confond pas avec la faute intentionnelle car « il peut y avoir faute lourde sans mauvaise foi de son auteur, c’est-à-dire sans que celui-ci ait voulu les conséquences dommageables de l’acte ou de l’omission » (9).
Cela ne signifie pas, pour autant, que faute lourde et mauvaise foi soient deux notions parfaitement étrangères. En effet, le fait d’être particulièrement négligent est parfois le signe d’une attitude déloyale(10). Cependant, il ne faut pas schématiser à l’excès. La commission d’une faute lourde ne suppose pas qu’il y ait nécessairement mauvaise foi de son auteur. C’est pourquoi la preuve d’un élément intentionnel n’est pas essentielle à la caractérisation d’une telle faute. La victime doit uniquement démontrer l’ « extrême gravité » de l’attitude du débiteur défaillant.
18. La faute lourde, une faute particulièrement grave
Le fait que la faute lourde ne soit pas une faute volontaire pourrait laisser penser qu’elle se rapproche de la faute ordinaire qui se traduit concrètement par une simple inexécution contractuelle. Cependant, une telle position est à rejeter. La jurisprudence précise bien dans sa définition de la faute lourde que celle-ci suppose « un comportement d’une extrême gravité […] dénotant l’inaptitude du débiteur de l’obligation à l’accomplissement de la mission contractuelle qu’il avait acceptée ». De cette référence à « un comportement d’une extrême gravité » deux remarques peuvent être formulées.
D’abord, elle sous-entend que la faute lourde n’est pas une faute comme les autres. Elle est une faute particulièrement grave. Comme le souligne Madame NGUYEN THANH-BOURGEAIS, la faute lourde « est de même nature que la faute ordinaire dont elle est seulement séparée par une différence de gravité, ce qui entraîne des incertitudes, car aucun texte ne dit au-dessus de quel seuil la faute devient lourde »(11).
Ensuite, il convient de souligner que l’extrême gravité qui permet de caractériser la faute lourde se rapporte au comportement du débiteur(12). Or, comme une telle faute n’est ni intentionnelle ni ordinaire, il convient alors d’admettre que celle-ci ne peut résulter que d’une particulière négligence, imprudence ou inattention du débiteur. Une telle conception de la faute lourde se veut alors très proche de celle défendue par Justinien. Selon lui « la faute lourde consiste à ne pas comprendre ce que tout le monde comprend, « non intelligere quod omnes intelligent » »(13).
Cependant, cette approche de la faute lourde ne doit pas tromper. L’auteur d’une telle faute n’est pas nécessairement inintelligent ou imbécile. Négligence, imprudence ou encore inattention ne sont pas synonymes d’idiotie ou de simplicité d’esprit. En effet, la perfection n’existant pas, tout homme, quel qu’il soit, n’est pas à l’abri de commettre, un jour, une faute relevant de l’étourderie, de la distraction, de la maladresse, de l’inadvertance…
Par conséquent, nous rejoignons JOSSERAND lorsqu’il affirme que ce qui caractérise la faute lourde « c’est son énormité […] : c’est par son poids que la faute lourde, conformément à la terminologie, se distingue de la faute ordinaire, de même que c’est par son caractère involontaire qu’elle se différencie du dol. Plus précisément, elle dénote, chez son auteur, une véritable incapacité : il s’est montré inégal au devoir qui lui incombait ; dans la sphère où il se mouvait, il a fait preuve d’incapacité, d’inaptitudes flagrantes. […] Telle est […] la caractéristique constante de la faute lourde : une énormité qui dénonce l’incapacité, l’inaptitude du coupable à s’acquitter des obligations dont il est tenu, de la mission, contractuelle ou extra-contractuelle, qui lui incombe »(14). En d’autres termes, la faute lourde, entendue subjectivement, est donc celle qui découle « d’un comportement anormalement déficient »(15).
Cependant, cette précision apportée quant aux contours de la faute lourde ne permet pas de résoudre toutes les difficultés. En effet, la question se pose de savoir à partir de quel moment le juge estimera que la négligence du débiteur défaillant est d’une ampleur telle qu’elle nécessitera de basculer de la qualification de faute légère à celle de faute lourde.
19. Appréciation et contrôle de la faute lourde
Il revient aux juges du fond, selon leur appréciation souveraine, de déterminer le comportement qui constituera ou non une faute lourde. Ils doivent alors apprécier la gravité du comportement du débiteur défaillant en le comparant à celui qu’il aurait dû normalement adopter. Pour se faire, il leur arrive de prendre en compte, dans leur appréciation, les moyens que le débiteur avait en sa possession pour lui permettre d’exécuter sa prestation contractuelle, ou encore la conscience du danger ou du risque qu’il aurait dû avoir et dont il aurait dû mesurer l’ampleur(16), ou, enfin, la répétition de faits constitutifs d’erreurs, de négligences(17).
Il est très difficile de donner des éléments précis sur lesquels vont s’appuyer les juges pour retenir s’il y a ou non faute lourde car leur décision est parfois guidée par des raisons de pure politique juridique(18). Ils seront, par exemple, plus sévères envers certaines catégories de débiteurs comme les professionnels(19). Ceux-ci, en raison de leur compétence, sont censés se montrer plus prudents que des profanes. De même, s’il s’agit d’un dommage corporel, les juges seront plus enclins à admettre qu’il y a faute lourde.
Néanmoins, la liberté des juges quant à la qualification de faits constitutifs d’une faute lourde n’est pas sans limite. En effet, la Cour de cassation exerce un contrôle sur une telle qualification(20).
Pour avoir une appréhension plus précise d’attitudes pouvant être caractéristiques d’un comportement d’une extrême gravité du débiteur, il paraît intéressant de donner quelques exemples jurisprudentiels.
20. Exemples de faute lourde retenue par la jurisprudence
Constituent une faute lourde, le fait pour le conducteur d’un camion de laisser celui-ci sans aucune surveillance la nuit alors même qu’il contient des marchandises précieuses(21), le fait qu’un manutentionnaire utilise un appareil de levage manifestement inadapté(22), le fait, pour des vendeurs, de ne pas avoir vérifié, par un moyen véritablement sûr, la qualité du produit mis en vente(23), ou de ne pas avoir fait exécuter des travaux conformes aux règles de l’art alors qu’ils s’y étaient engagés auprès des acheteurs(24) ou , encore, de fournir un pesticide qui se révèle nocif à l’usage(25).
21. De la définition de la faute lourde subjective à sa justification
Les contours de la faute lourde subjective étant précisés, il est nécessaire de comprendre ce qui a poussé les juges à retenir une telle conception de la notion.
§2 – Les justifications à cette conception subjective de la faute lourde
22. Une justification en rapport avec la notion de faute dolosive
Pour comprendre ce qui a poussé les juges à consacrer une conception subjective de la faute lourde, c’est-à-dire une faute attachée au comportement particulièrement répréhensible du débiteur défaillant, il est nécessaire de revenir à la position jurisprudentielle selon laquelle la faute lourde est « équipollente » au dol. Pourquoi les juges ont-ils admis un tel principe ? Il est souvent invoqué, pour répondre à cette interrogation, un argument d’ordre historique. On hériterait du droit romain cette règle d’équivalence du dol et de la faute lourde(26). Cependant ce n’est pas cet argument qui légitime la conception subjective de la faute lourde. Pour comprendre sa raison d’être, il faut se référer au dol et se demander ce qui justifie qu’il soit si lourdement sanctionné.
23. Une sanction lourde de la faute dolosive en raison de son atteinte à la bonne foi contractuelle
La faute dolosive est sanctionnée d’une triple manière. D’abord, elle permet d’engager la responsabilité contractuelle de la partie malhonnête. Ensuite, le débiteur défaillant ne peut pas se retrancher derrière une clause limitative ou exonératoire de responsabilité. Enfin, il est tenu de réparer l’intégralité du préjudice subi par le contractant lésé(27). Or, cette répression ne peut trouver une justification qu’au regard du comportement hautement anticontractuel du débiteur. Le fait de refuser sciemment d’exécuter ses obligations traduit une profonde mauvaise foi qui se doit d’être sanctionnée sévèrement. La doctrine est unanime sur ce point. C’est parce que le contractant a eu un comportement déloyal qu’il convient de le réprimer plus gravement. Ainsi, MM. STARCK, ROLAND et BOYER écrivent « le débiteur qui, intentionnellement, n’a pas exécuté, qui, donc, a fait preuve de mauvaise foi, ne mérite pas le bénéfice d’une règle limitant la responsabilité »(28). Dans le même sens, M. RAOUL-CORMEIL écrit « parce que le contrat est d’abord un acte de prévision, le débiteur de mauvaise foi est redevable des dommages imprévus. […] Cet accroissement de responsabilité contractuelle est également dans son principe une sanction prévisible : le débiteur de mauvaise foi pouvait exécuter ses obligations mais il ne l’a pas voulu. Si la bonne exécution du contrat dépendait de sa seule bonne volonté, alors sa mauvaise foi fait supporter toutes les conséquences du dol. […] Le dol, c’est-à-dire la mauvaise foi, fonde suffisamment l’accroissement indistinct de la responsabilité contractuelle du mauvais contractant »(29). MM. TERRÉ, SIMLER et LEQUETTE sont tout autant explicites.
Après avoir rappelé que les conventions doivent être exécutées de bonne foi en vertu de l’article 1134 alinéa 3 du Code civil, ils précisent que « le dommage causé intentionnellement par le débiteur doit être réparé par lui en totalité, quand même il n’en aurait pas prévu l’étendue au jour où il contractait. C’est la sanction de sa mauvaise foi »(30).
24. Justification probatoire à l’assimilation du dol et de la faute lourde
Si la faute dolosive est lourdement sanctionnée en droit des contrats c’est donc en raison de son caractère intentionnel. Or, la faute lourde n’est pas une faute intentionnelle. Celle-ci est classiquement définie comme « une erreur, une négligence énorme, impardonnable, mais son auteur n’avait ni l’intention de nuire, ni même la connaissance du tort qui en résulterait pour le créancier ; il est encore de bonne foi. Bonne foi et mauvaise foi, telle est la différence fondamentale entre les deux notions »(31).
Certes, la faute lourde, en ce qu’elle revêt une certaine gravité pour être caractérisée, suppose que lui soit appliquée une sanction plus sévère qu’en cas de simple faute. Cependant il convient d’admettre que le comportement délibéré propre au dol devrait rendre son assimilation à la faute lourde inapproprié car agir en sachant délibérément que l’acte commis sera nuisible pour l’autre partie se révèle être plus répréhensible que n’importe quelle autre attitude non-intentionnelle. D’ailleurs, la jurisprudence qui tend à assimiler les fautes lourde et dolosive en matière de responsabilité contractuelle est très critiquée par la doctrine. Comme le souligne certains auteurs, « on fait remarquer qu’il n’est ni logique, ni équitable de traiter de la même manière la personne qui a voulu le dommage et celle qui ne l’a pas voulu si stupide soit-elle »(32).
On peut alors se demander ce qui a conduit les juges à rendre la faute lourde équipollente au dol. On a fait valoir que cette assimilation se justifiait pour des raisons pratiques et, plus précisément, de preuve(33). À cet égard, Madame NGUYEN THANH-BOURGEAIS écrit « L’assimilation a surtout été défendue comme une règle de preuve. En effet, il n’est pas aisé de savoir ce qui s’est passé dans l’esprit de la personne qui a adopté un tel comportement et, notamment, si elle a voulu réellement le dommage causé. Faute de saisir directement l’intention de nuire qui appartient au domaine psychologique, on est obligé de se référer à la structure objective des agissements. Or, l’énormité de la faute lourde est l’un des éléments qui portent à penser que l’agent était en état de dol. Le fait qu’une faute objective grave révèle en général l’intention de nuire chez celui qui l’a commise est une constatation d’expérience qui conduit à admettre, non pas que la négligence à son degré le plus répréhensible participe psychologiquement de l’intention coupable, mais, qu’en réalité, elle la fait présumer »(34).
Cette assimilation du dol et de la faute lourde permettait aussi d’éviter qu’en pratique le contractant malhonnête puisse tenter d’échapper à sa responsabilité contractuelle en arguant le fait qu’il avait été particulièrement stupide. Ainsi, en posant le principe d’équivalence de la faute lourde au dol, le débiteur ayant eu un comportement particulièrement déloyal ne pouvait plus se retrancher derrière l’argument de la bêtise(35).
25. Une justification expliquant la conception subjective de la faute lourde
La jurisprudence a donc décidé de faire produire au dol et à la faute lourde les mêmes effets pour deux raisons principales, celles-ci étant toutes deux d’ordre probatoire. La première a pour but de permettre au créancier de l’obligation inexécutée qui n’arriverait pas à prouver l’élément intentionnel propre au dol de pouvoir quand même recourir à un autre moyen juridique lui offrant des effets identiques à savoir la réparation intégrale de son préjudice ainsi que le rejet d’une clause limitative ou exonératoire de responsabilité. La seconde raison consiste à ne pas donner la possibilité au débiteur défaillant d’invoquer le prétexte de l’inattention ou de la négligence pour échapper aux lourdes conséquences d’une faute dolosive.
Cependant, pour que l’équivalence des deux notions puisse exister, il était nécessaire de donner une qualification juridique propre à ces comportements extrêmement imprudents. Les juges ont choisi la qualification de faute lourde. Ils ont alors précisé que la simple négligence ne suffisait pas à caractériser une telle faute, une certaine gravité étant requise. Cette exigence se justifie parfaitement au regard de la gravité propre à la faute dolosive. En effet, bien que les deux notions ne soient pas identiques, pour admettre que la faute lourde puisse entraîner les mêmes effets particulièrement pesants du dol, il fallait au moins convenir que celle-ci revête un certain degré de gravité.
26. Une conception de la faute lourde devant être approuvée
Il convient d’admettre que la définition subjective conférée à la faute lourde est pertinente. En effet, elle se veut cohérente tant par rapport à la définition même de la notion de faute que par rapport à la gamme des fautes existant en droit positif(36).
Cependant, la jurisprudence ne s’est pas stabilisée sur cette conception subjective de la faute lourde car depuis déjà plusieurs années elle a également adopté une approche objective de la notion.
1 Voir supra, n° 2.
2 Voir notamment en ce sens : G. VINEY et P. JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 3ème éd., 2006, p. 628, n° 605 ; D. NGUYEN THANH-BOURGEAIS, « Contribution à l’étude de la faute contractuelle : la faute dolosive et sa place actuelle dans la gamme des fautes », RTD Civ. 1973, p. 496 et s., spéc. p. 510, n° 24.
3 Voir en ce sens : Cass. req., 24 oct. 1932 : D. P. 1932, 1, p. 176, note E. P. – Cass. civ., 29 juin 1932 : D. P. 1933, 1, p. 49 (1ère espèce), note L. JOSSERAND. – Cass. com., 7 mai 1980 (deux arrêts) : Bull. civ. IV, n° 184 et 185 ; R., p. 42 ; D. 1981, p. 245, note CHABAS. – Cass. com., 15 déc. 1992 : Bull. civ. IV, n° 420. – Cass. 1ère
civ., 24 févr. 1993 : Bull. civ. I, n° 88 ; D. 1994, p. 6, note AGOSTINELLI ; D. 1993, somm., p. 249, obs. HASSLER ; JCP 1993, II, 22166, note PAISANT ; Defrénois 1994, p. 354, obs. D. MAZEAUD.
4 Voir en ce sens : G. VINEY et P. JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 3ème éd., 2006, p. 636, n° 610 ; Fr. TERRÉ, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 10ème éd., 2009, p. 580, n° 575.
5 Cass. com., 17 déc. 1951 : Bull. civ. III, 396. – Cass. com., 3 avr. 1990 : Bull. civ. IV, n° 108. Voir aussi : Cass. com., 5 janv. 1988 : Bull. civ. IV, n° 8, p. 6. – Cass. com., 3 oct. 1989 : Bull. civ. IV, n° 246, p. 165 ; D. 1990, p. 81, concl. M. JÉOL. – Cass. com., 28 mai 1991 : Bull. civ. IV, n° 193. – Cass. com., 13 nov. 1990 : Bull. civ., IV, n° 271. – Cass. com., 10 mars 2009 : Bull. civ. IV, n° 38 ; D. 2009, AJ, p. 869, obs. DELPECH ; JCP 2009, n° 38, p. 42, obs. Ph. STOFFEL-MUNCK ; RLDC 2009/60, n° 3413, obs. MAUGERI ; RDC 2009, p. 1044, obs. CARVAL.
6 Par élément moral nous entendons élément volontaire et non condition d’imputabilité.
7 Ch. LARROUMET, Droit civil, tome 3, Les obligations, Le contrat, 2ème partie, Les effets, Economica, 6ème éd., 2007, p. 683, n° 625.
8 Note L. JOSSERAND, sous Cass. civ., 29 juin 1932, préc. : D. P. 1933, 1, p. 49 et s., (1ère espèce), spéc. p. 50.
9 Voir notamment : H. LALOU, « La gamme des fautes », D. H., 1940, chron., p. 17 et s., spéc. p. 20. Voir aussi : G. VINEY, « Remarques sur la distinction
entre faute intentionnelle, faute inexcusable et faute lourde », D. 1975, chron., p. 261 et s., spéc. p. 262 : « A priori, il semble d’ailleurs qu’aucune confusion n’est possible puisque c’est un élément purement subjectif, l’intention de nuire, qui caractérise le dol, tandis que la faute lourde ne se distingue de la faute simple que par la gravité objective de l’inexécution ». D. NGUYEN THANH-BOURGEAIS, « Contribution à l’étude de la faute contractuelle : la faute dolosive et sa place actuelle dans la gamme des fautes », RTD Civ. 1973, p. 496 et s., spéc. p. 512, n° 26 : « Dans son ensemble […] la doctrine admet qu’existe sur le plan moral une différence irréductible de nature entre dol et faute lourde. Si grave soit la faute lourde, en aucun cas elle n’est intentionnelle comme le dol, car son auteur n’a pas voulu la réalisation du dommage ».
10 Voir en ce sens : G. VINEY, art. préc., spéc. p. 261. Voir aussi, p. 262 : « Pourtant, il est aisé de s’apercevoir que les interférences ne sont nullement exclues. L’intention peut en effet facilement se déduire de la gravité exceptionnelle de l’inexécution, à tel point que c’est précisément la présomption de dol tirée de l’énormité de la faute qui fonde […] l’adage Culpa lata dolo aequiparatur ».
11 D. NGUYEN THANH-BOURGEAIS, « Contribution à l’étude de la faute contractuelle : la faute dolosive et sa place actuelle dans la gamme des fautes », RTD Civ. 1973, p. 496 et s., spéc. p. 512, n° 26.Voir aussi en ce sens : Ch. LARROUMET, Droit civil, tome 3, Les obligations, Le contrat, 2ème partie, Les effets, Economica, 6ème éd., 2007, p. 683, n° 625.
12 D’où, comme nous avons pu le préciser, le qualificatif de conception subjective. Voir supra, n° 9 et 16.
13 Note L. JOSSERAND, sous Cass. civ., 29 juin 1932, préc. : D. P. 1933, 1, p. 49 et s., (1ère espèce), spéc. p. 50.
14 Note L. JOSSERAND, sous Cass. civ., 29 juin 1932, préc. : D. P. 1933, 1, p. 49 et s., (1ère espèce), spéc. p. 50.
15 G. VINEY et P. JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 3ème éd., 2006, p. 636, n° 611.
16 Voir en ce sens : Cass. com., 5 juill. 1988 : Gaz. Pal. 1988, 2, p. 272. – Cass. com., 15 nov. 1988 : Bull. civ. IV, n° 312.
17 Voir en ce sens : G. VINEY et P. JOURDAIN, op. cit., p. 637 à 639, n° 611 et 611-1.
18 Voir en ce sens : D. NGUYEN THANH-BOURGEAIS, « Contribution à l’étude de la faute contractuelle : la faute dolosive et sa place actuelle dans la gamme des fautes », RTD Civ. 1973, p. 496 et s., spéc. p. 511, n° 25. Voir aussi : Note L. JOSSERAND, sous Cass. civ., 29 juin 1932, préc. : D. P. 1933, 1, p. 49 et s., (1ère espèce), spéc. p. 50.
19 Voir en ce sens : Cass. 1ère civ., 22 nov. 1978 : JCP 1979, II, 19139, note G. VINEY. – Cass. com., 4 janv. 1979 : D. 1979, IR, p. 357, obs. M. VASSEUR. Voir également : G. VINEY et P. JOURDAIN, op. cit., p. 638, n° 611.
20 Voir en ce sens : Cass. civ., 15 janv. 1929 : D. H. 1929, p. 204. – Cass. civ., 11 janv. 1932, D. H. 1932, p. 131. – Cass. req., 22 févr. 1932 : D. P. 1932, 1, p. 25, note de M. ROUAST. – Cass. civ. 29 juin 1932, préc.
21 Cass. com., 7 mai 1980 : Bull. civ. IV, n° 184 ; R., p. 42 ; D. 1981, p. 245 (1ère espèce), note CHABAS. – Cass. com., 3 avr. 2002 : Bull. civ. IV, n° 68.
La faute lourde n’est, par contre, pas retenue à l’encontre du conducteur du camion si le véhicule était fermé et équipé d’un dispositif antivol. Voir en ce sens : Cass. com., 16 nov. 1993 : JCP 1994, IV, 178.
22 Cass. com., 13 nov. 1990 : JCP 1991, IV, 6.
23 En l’espèce il s’agissait de la vente de semences de betteraves sucrières : Cass. 1ère civ., 11 oct. 1966 : JCP 1967, II, 15193, note G. DE LA PRADELLE.
24 Les travaux en question concernaient le traitement d’un immeuble contre les termites : Cass. 3 ème civ., 10 févr. 1999 : RCA 1999, n° 110.
25 Cass. 1ère civ., 22 nov. 1978 : JCP 1979, II, 19139, note G. VINEY.
26 Voir en ce sens, D. MAZEAUD : « Les clauses limitatives de réparation » in Les obligations en droit français et en droit belge, Bruylant, Dalloz, 1994, p. 155 et s., spéc. p. 174, n° 29.
27 Sur ce point, voir supra, n° 8.
28 B. STARCK, H. ROLAND, L. BOYER, Droit civil, Les Obligations, vol. 2, Contrat, 6ème éd., Litec, 1998, p. 581, n° 1673.
29 G. RAOUL-CORMEIL, La mauvaise foi dans les relations de droit privé interne, thèse Caen, 2002, p. 325 et 326, n° 295. Voir aussi Fr. GORPHE, Le principe de la bonne foi, Dalloz, 1928, p. 69 et 70 : « Ce dol commis dans l’exécution de l’obligation est aussi délictueux que celui commis dans sa formation […]. Il est vrai qu’il change de nom : c’est une fraude, si, selon l’usage et malgré la terminologie de l’art. 1150, l’on réserve le terme de dol à la tromperie s’exerçant sur la volonté d’un cocontractant, et qu’on appelle fraude l’atteinte intentionnelle aux droits acquis. Mais l’habit ne fait pas l’homme : la fraude est aussi coupable que le dol. Pour les Romains, de qui nous viennent ces notions, la fraude, comme le dol, constituait un délit : il n’y a pas de raison que sa nature essentielle ait changé. La différence, d’ailleurs, n’est pas tellement grande entre ces deux violations de la bonne foi : frustrer un créancier, n’est ce pas tromper sa confiance et décevoir sa légitime attente ? Et dans tous les cas, aussi bien de fraude que de dol, jamais on ne peut à l’avance se décharger de la responsabilité qu’on peut encourir de ce chef : la faute délictuelle, peut-on dire, se trouve soustraite à l’autonomie de la volonté ».
30 Fr. TERRÉ, Ph. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 10ème éd., 2009, p. 570, n° 565.
31 Fr. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, op. cit., p. 579, n° 575. Voir aussi, H., L., J. MAZEAUD et Fr. CHABAS, Leçons de droit civil, Obligations, Théorie générale, tome 2, 1er vol., Montchrestien, 9ème éd., 1998, p. 454, n° 447 : « La faute lourde est une faute qui n’est ni intentionnelle, ni volontaire, mais particulièrement grossière ».
32 H., L., J. MAZEAUD et Fr. CHABAS, Leçons de droit civil, Obligations, Théorie générale, tome 2, 1er vol., Montchrestien, 9ème éd., 1998, p. 456, n° 447.
33 Voir en ce sens : P. BONASSIES, Le dol dans la conclusion des contrats, thèse Lille, 1955, p. 454, n° 9 : « Il est […] impossible au juge, placé devant des faits d’incurie grossière et inadmissible, de décider s’il y a eu ou non intention de nuire. C’est alors que l’adage selon lequel « culpa lata dolo aequiparatur » vient à son secours en rendant inutile d’impossibles analyses psychologiques ».
34 D. NGUYEN THANH-BOURGEAIS, « Contribution à l’étude de la faute contractuelle : la faute dolosive et sa place actuelle dans la gamme des fautes », RTD Civ. 1973, p. 496 et s., spéc. p. 512, n° 26. Voir également : D. MAZEAUD : « Les clauses limitatives de réparation » in Les obligations en droit français et en droit belge, Bruylant, Dalloz, 1994, p. 155 et s., spéc. p. 174 et 175, n° 29 : « […] on fait état, pour justifier cette assimilation, d’un argument de nature probatoire. L’absence de cette assimilation réduirait à néant la solution de l’inefficacité des clauses limitatives en cas de dol, tant il est vrai qu’il est délicat de prouver l’intention de nuire ou même la conscience de l’inexécution. Pour ce faire, en effet, il faut sonder l’âme du débiteur, or le juge n’est pas un confesseur. Il serait alors trop facile pour un débiteur de mauvaise foi d’invoquer sa faiblesse d’esprit pour bénéficier de la clause. Aussi, convient-il d’éviter que le débiteur malhonnête prenne « le masque facile de la bêtise et dissimule son infidélité délibérée sous une imbécilité apparente. Aussi, la faute lourde doit-elle, d’après certains, faire présumer le dol, à charge pour le débiteur de démontrer qu’il a été plus bête que méchant ».
35 Voir en ce sens : Fr. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 10ème éd., 2009, p. 581, n° 576 ; Y. FABRE, Essai sur la nature juridique du dol dans la formation des contrats, thèse Toulouse, 1941, p. 44, n° 32.
36 Voir infra, n° 38.
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