Heidt montre que plusieurs modèles existent pour classifier les médias selon leur efficacité éducative. Nous ne pouvons utilisé celui de Bretz qui distingue sept classes de médias en fonction du type d’informations qu’ils présentent (auditive, visuelle fixe ou animée, textuelle etc). Trois modèles ont cependant retenu notre attention.
Le premier est celui de D.T. Tosti et J.R. Ball. Il s’agit d’un des modèles les plus cohérents dont la nouveauté est de proposer une distinction entre média et mode de présentation. Ils utilisent l’exemple de l’éléphant(128). Selon Tosti et Ball , « un étudiant n’apprend pas par le média. Il apprend par la forme de présentation. Les médias ne font guère plus que présenter la chose à apprendre sous une forme de présentation choisie précédemment »(129). Les deux auteurs distinguent six dimensions(130) de la forme de présentation. Si l’on se réfère aux deux typologies (l’une construite sur les deux critères n°1 et n°2 et l’autre sur les n°1 et n°3), le web-documentaire se situerait entre le laboratoire d’image et la diapositive, le film, la peinture et la photographie. La notion de multimédia prend ici tout son sens. Si nous construisons notre propre typologie à partir du premier et quatrième critères, nous constatons que la diapositive et le webdoc se rejoignent une nouvelle fois. Tout comme la diapositive, le web-documentaire invite à l’action et au commentaire, à la contextualisation. Dès lors, peut on déduire que le mode d’enseignement du web-documentaire prend source dans celui de la diapositive ? Un tel modèle ne permet pas de tirer ce genre de conclusion mais toutefois donne l’opportunité de saisir quelques manières de présenter et faire circuler le savoir. Dans cette optique, le web-documentaire est proche de la diapositive.
Le modèle de Clark est essentiel dans le sens où il prend en compte que les effets d’un apprentissage sont le fruit « d’interactions entre les traits spécifiques du traitement du message éducatif et les caractéristiques propres de l’individu apprenant »(131). Les variables liées aux médias et celles liées à l’individu interagissent dans le procès d’apprentissage. Clark veut prendre en considération le comportement des personnes. Cela nous paraît essentiel tant nous l’avons observé au cours des entretiens. Les individus observés se comportent différemment par rapport à un même webdocumentaire et leur apprentissage du sujet en est impacté.
Enfin, il existe le modèle de Salomon. Ce dernier soutient que l’essentiel dans le comportement de l’individu réside moins dans les réactions extérieures de l’apprenant que dans les opérations internes. « Les médias doivent être décrits par rapport aux différents niveaux de supplantation des opérations mentales qu’ils peuvent atteindre. Il veut dire par là que les médias peuvent être intentionnellement conçus pour présenter explicitement et donc supplanter ce qu’autrement l’apprenant aurait à faire lui -même intérieurement et pour cela se fonde sur ce que nous croyons savoir des opérations mentales associées à une tâche d’apprentissage précise. »(132).
Nous pensons que le web-documentaire, en proposant un modèle de pensée associative, anticipe une démarche intellectuelle propre à l’apprentissage. Le web-documentaire dévoile l’ensemble des mécanismes techniques et propose une poétique du lien. Cette double caractéristique incarne les processus à l’œuvre lors de l’apprentissage.
128 « l’image d’un éléphant dans un livre et la description verbale de l’éléphant par un maître sont différents à la fois quant au média et au mode de présentation, tandis que l’image de l’éléphant dans le livre et sur une diapositive est présentée par deux médias différents mais sous la même forme de présentation. Finalement, l’image d’un éléphant dans un livre et la description verbale imprimée dans un autre livre utilisent le même média mais diffèrent quant à leur mode de présentation. »
129 HEIDT Erhard U. La taxinomie des médias, in Communication, 33, 1981, pp. 51-74
130 1- la forme d’encodage du stimulus (structure environnementale, picturale, symbolique et verbale) ; 2- la durée du stimulus (temps de présentation) ; 3- la forme de la demande de réponse (implicite, sélective, construite, vocale, motrice et affective) ; 4- la fréquence de la demande de réponse ; 5- la forme d’organisation ou l’intention (besoin, acquisition, prescription, enrichissement, motivation) ; 6- l’organisation de la fréquence ( fréquence de la décision de changement de présentation, du rare au fréquent)
131 Ibid
132 Ibid
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