Cass. 3e civ. 30 mars 2010, n°09-12.652 et 09-13.307
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Chambéry 20 janvier 2009), que les époux X… reprochant à
la société Atelier d’architecture de l’Albanne et à M. Y… son gérant associé unique et
liquidateur, maîtres d’oeuvre qu’ils avaient choisi pour réaliser leur maison, une
implantation non conforme au permis de construire obtenu, ayant entraîné leur
condamnation à payer une amende et à démolir les ouvrages réalisés, ont assigné M. Y…
à titre personnel et ès qualités, ainsi que son assureur, la Mutuelle des architectes
Français (MAF) en indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le premier moyen du pourvoi A 09-13. 307, ci-après annexé :
Attendu qu’ayant relevé que l’architecte avait obtenu le permis de construire puis déposé
deux demandes de permis modificatifs qui avaient été rejetées malgré les recours
gracieux et judiciaires introduits par les époux X…, ce dont il ne résultait pas une absence
d’aléa, et souverainement retenu que si cet architecte avait volontairement implanté la
maison d’une manière non conforme au permis de construire, il n’avait manifestement pas
voulu les conséquences qui en sont résultées, la cour d’appel a pu en déduire que les
dispositions de l’article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances ne devaient pas
recevoir application ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi P 09-12. 652 en ce qu’il vise la condamnation de la MAF
au paiement de la somme de 53 402, 97 euros :
Attendu que la cour d’appel n’ayant retenu la perte d’une chance que pour les chefs de
préjudice distincts des dépenses engagées à fonds perdu, le moyen manque en fait ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi P 09-12. 652 :
Vu les articles 561 et 562 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes des époux X… à l’égard de M. Y…, à
titre personnel et en qualité de gérant unique associé et liquidateur de la société Atelier
d’architecture de l’Albanne, l’arrêt retient que les époux X… n’ont pas satisfait à l’injonction
donnée par les premiers juges de détailler les demandes formées contre M. Y… et contre
la SARL Atelier d’architecture de l’Albanne ;
Qu’en statuant ainsi, alors que, saisie de l’entier litige par l’appel de la MAF et les
conclusions des époux X… tendant à la condamnation de M. Y…, elle devait statuer sur les
demandes formées devant elles, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen du pourvoi P 09-12. 652 en ce qu’il vise la condamnation de la MAF
au paiement de la somme de 146 084, 03 euros :
Vu les articles 1147 et 1149 du code civil ;
Attendu que pour condamner la MAF à payer aux époux X… la somme de 146 084, 03
euros, l’arrêt retient que ceux-ci ne peuvent invoquer qu’une perte de chance de faire
édifier une maison sur leur terrain ;
Qu’en statuant ainsi, tout en incluant dans cette somme le coût de la démolition et de la
reconstruction de l’ouvrage demeuré inachevé ainsi que le préjudice résultant de
l’impossibilité de jouir du-dit ouvrage, la cour d’appel a violé les textes susvisés
Et sur le second moyen du pourvoi A 09. 13-307 :
Vu l’article 1134 du code civil, ensemble l’article L. 113-9 du code des assurances ;
Attendu que pour condamner la MAF à payer aux époux X… les sommes de 53 402, 97
euros et 146 084, 03 euros, l’arrêt retient que celle-ci n’était pas fondée à se prévaloir du
défaut de paiement d’une prime pour invoquer les dispositions des articles L. 113-8 et L.
113-9 du code des assurances dès lors que la garantie n’était pas soumise à la
déclaration préalable de chaque chantier ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’article 5. 222 de la police applicable stipulait qu’en
l’absence de mauvaise foi, toute omission ou inexactitude dans les déclarations d’activité,
constatée après sinistre, donnait droit à l’assureur de réduire l’indemnité conformément à
l’article L. 113-9 du code des assurances, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déclare irrecevables les demandes des
époux X… à l’encontre de M. Y… et condamne la Mutuelle des architectes Français à
payer aux époux X… les sommes de 53 402, 97 euros et 146 084, 03 euros, l’arrêt rendu
le 20 janvier 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Chambéry ; remet, en
conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient
avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Chambéry,
autrement composée ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt
sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le
président en son audience publique du trente mars deux mille dix.
Cass. 2e civ. 1 juillet 2010, n°09-10590
Donne acte à la société JST transformateurs, anciennement dénommée Va Tech Jeumont
Schneider transfos de ce qu’elle s’est désistée de son pourvoi dirigé contre les sociétés
Total petrochemicals France et Aig Europe ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société JST transformateurs, anciennement
dénommée Va Tech Jeumont Schneider transfos, (la société) a livré une installation de
motorisation électrique de compresseurs à la société Atofina, aux droits de laquelle se
trouve la société Total Pétrochimie France ; que les transformateurs d’alimentation de
cette installation sont tombés en panne à plusieurs reprises en 1987, 1996, 1997, 1998 et
1999 ; qu’une expertise judiciaire a été ordonnée par ordonnance de référé du 4 juillet
1996 ; que, le 14 février 2001, la société Atofina a assigné en responsabilité contractuelle
la société Jeumont Schneider ; que le 17 septembre 2001, la société a appelé en garantie
ses assureurs, la société AGF pour la période allant jusqu’au 31 mars 1999 et la société
Axa corporate solutions (Axa) pour la période postérieure ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la débouter de ses demandes tendant à être
garantie par la société AGF, alors, selon le moyen :
1°/ que, quand l’action de l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la
prescription court du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré, seule
la date de l’assignation délivrée à cet assuré devant être prise en compte pour déterminer
le point de départ de la prescription biennale ; qu’en se fondant sur le fait inopérant «qu’il
s’est bien écoulé plus de deux ans, sans assignation interruptive, ne serait-ce qu’entre
avril 1998 et septembre 2001», cependant que seule la date de l’assignation délivrée à
l’assuré devait être prise en considération, la cour d’appel a privé sa décision de base
légale au regard de l’article L. 114-1 du code des assurances ;
2°/ qu’ayant constaté que la société n’avait été assignée en responsabilité que le 14
février 2001, la cour d’appel ne pouvait déclarer prescrite son action en garantie exercée
contre la société AGF le 17 septembre suivant sans méconnaître les conséquences
légales de ses propres constatations au regard de l’article L. 114-1 du code des
assurances ;
Mais attendu que, selon l’article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances, quand l’action
de l’assuré contre l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la prescription
biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou
a été indemnisé par ce dernier ; qu’une assignation en référé en vue de la nomination d’un
expert constitue une action en justice ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel a décidé à bon
droit que la première assignation en référé délivrée en 1996 par le tiers fixait le point de
départ de la prescription biennale ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé :
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l’article L. 114-1 du code des assurances ;
Attendu que pour débouter la société de ses demandes tendant à être garantie par la
société AGF, l’arrêt retient que la première assignation en référé délivrée en 1996 par le
tiers fixe le point de départ de la prescription biennale ;
Qu’en statuant ainsi, tout en constatant que des sinistres étaient intervenus
postérieurement, en juin 1997, septembre 1997 et avril 1998, la cour d’appel n’a pas tiré
les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article 16 du code de procédure civile, ensemble l’article L. 113-5 du code des
assurances ;
Attendu que l’assureur qui, en connaissance des résultats de l’expertise dont le but est
d’établir la réalité et l’étendue de la responsabilité de son assuré qu’il garantit, a eu la
possibilité d’en discuter les conclusions, ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre,
soutenir qu’elle lui est inopposable ;
Attendu que pour débouter la société de ses demandes tendant à être garantie par la
société Axa, l’arrêt retient que celle-ci n’a pas été appelée à l’expertise qui fonde la
condamnation de son assurée et ce alors que cet appel en la cause était tout à fait
possible ;
Qu’en statuant ainsi, alors que n’était alléguée aucune fraude au préjudice de l’assureur
qui avait pu discuter contradictoirement les conclusions du rapport d’expertise, la cour
d’appel a violé les textes susvisés ;
Et sur les premier et second moyen, pris en leur dernière branche, qui sont identiques :
Vu l’article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l’article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter la société de ses demandes tendant à être garantie par les
sociétés AGF et AXA des condamnations prononcées à son encontre, l’arrêt retient qu’il
résulte des notations de l’expert qu’à partir du deuxième sinistre de 1997, la société
Jeumont Schneider, malgré les diagnostics et les recommandations formelles de celui-ci,
formulées dès les premières réunions, a cependant persévéré dans une attitude de refus
de prise en compte, soit au stade de la conception, soit au stade de la fabrication, des
solutions conformes aux règles de l’art suggérées, qu’elle a agi ainsi en connaissance de
cause, de manière manifestement intentionnelle et en tout état de cause dolosive,
provoquant les sinistres en série et faisant disparaître l’aléa qui est de l’essence même du
contrat d’assurance ; que l’argument de la disparition de l’aléa et de la faute dolosive est à
l’évidence invoqué avec d’autant plus de motifs à l’occasion du dernier incident rencontré,
le cinquième claquage, dont il résulte clairement du rapport d’expertise qu’il aurait pu être
évité si les recommandations de l’expert avaient été suivies ;
Qu’en se déterminant ainsi, par des motifs dont il ne résulte pas que le souscripteur de
l’assurance ait eu la volonté de commettre le dommage tel qu’il est survenu, la cour
d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a débouté la société JST transformateurs
de ses demandes tendant à être garantie par les sociétés AGF et Axa des condamnations
prononcées à son encontre, l’arrêt rendu le 31 octobre 2008, entre les parties, par la cour
d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans
l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la
cour d’appel de Versailles.
Cass. 3e civ. 2 mars 2011, n°09-72.744
Donne acte à la Mutuelle des architectes français du désistement de son pourvoi en ce
qu’il est dirigé contre la société IDPE ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris 21 octobre 2009 rectifié le 2 décembre 2009), que la
société Beker Bau a confié à M. X…, architecte assuré auprès de la Mutuelle des
architectes français (MAF), et à MM. Y… et Z… également architectes, une mission de
maîtrise d’oeuvre pour la réhabilitation d’un immeuble ; que les travaux réceptionnés en
1994 n’ayant pas été réalisés conformément au permis de construire délivré en 1991, M.
X… et M. A…, représentant de la société Becker Bau, ont été pénalement sanctionnés et
la mise en conformité de l’immeuble a été ordonnée ; qu’à la suite de travaux un permis
modificatif a été obtenu et le certificat de conformité délivré en 2005 ;
Sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du
pourvoi incident, réunis :
Attendu que la MAF et M. X… font grief à l’arrêt de les condamner, in solidum avec MM.
Y… et Z…, à payer à la société Becter Bau la somme de 600 000 euros à titre de
dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que le maître d’ouvrage condamné pénalement
du chef de construction non conforme au permis de construire ne peut exercer de recours
contre les constructeurs en réparation des préjudices résultant de l’infraction commise ;
qu’en l’espèce, par arrêt du 11 septembre 2000, devenu définitif, la cour d’appel de Paris a
déclaré M. A…, en sa qualité de secrétaire général de la société Becker Bau, coupable du
délit de construction sans permis ; qu’en faisant droit à l’action en responsabilité dirigée
par cette société contre les architectes, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;
Mais attendu que la cour d’appel, qui a relevé que l’architecte avait modifié les plans du
permis de construire et réalisé les travaux conformément aux plans modifiés pour tenter
ensuite vainement de faire accepter la modification de la façade par l’architecte des
bâtiments de France faute de pouvoir revenir sur ces travaux après que le maître de
l’ouvrage ait vendu à des tiers les locaux concernés, a pu déduire de ces constatations
que le dommage subi était le résultat de la conjonction des fautes commises par le maître
de l’ouvrage et par l’architecte et que ce dernier devait indemniser la société Becker Bau à
concurrence de la somme qu’elle a souverainement fixée ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé de ce chef ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième troisième et quatrième
branches :
Attendu que la MAF fait grief à l’arrêt de la condamner in solidum avec MM. X…, Y… et
Z…, à payer à la société Becter Bau la somme de 600 000 euros à titre de dommagesintérêts,
et de la condamner à garantir M. X… de cette condamnation, alors, selon le
moyen :
1°/ que la stipulation d’une police d’assurance imposant à l’architecte d’exercer
normalement sa profession est une condition de la garantie et non une clause
d’exclusion ; qu’en l’espèce, la police d’assurance de M. Herbez précisait notamment que
le contrat avait “pour objet de garantir l’assuré contre les conséquences pécuniaires de
toutes ses responsabilités professionnelles, découlant de l’exercice normal à titre libéral
de sa profession d’architecte” ; qu’en décidant que l’exigence d’un exercice normal de la
profession constituait une exclusion indirecte de garantie, la cour d’appel a violé les
articles 1134 du code civil et L. 113-1 du code des assurances ;
2°/ que l’obligation d’indépendance de l’architecte à l’égard du maître d’ouvrage est
essentielle et résulte clairement des dispositions légales applicables ; que dans ses
conclusions d’appel, la Mutuelle des architectes français a soutenu que son assuré, M.
X…, avait violé cette obligation fondamentale car il était associé et gérant de la société
maître d’ouvrage, avait cédé ses parts contre l’engagement de l’acquéreur de lui verser un
complément de prix de cession en fonction du résultat de l’opération, et avait ainsi un
intérêt direct à ce que cette opération génère un bénéfice le plus important possible ; que
la cour d’appel a admis que la rémunération de M. X… était liée au succès commercial de
l’opération ; qu’en condamnant néanmoins l’assureur de M. X… à réparer le préjudice du
maître d’ouvrage, la cour d’appel a violé les articles 1134 du code civil, 3, 8, 9, 12, 13 et 46
du décret du 20 mars 1980 ;
3°/ que la garantie de l’assureur n’est pas due en cas d’absence d’aléa ; que cette règle
s’applique même en cours de contrat ; que l’assureur ne doit donc pas sa garantie lorsque
par la faute de l’assuré qui enfreint délibérément et en toute connaissance de cause les
règles d’urbanisme applicables, l’aléa disparaît, le sinistre étant inévitable ; que comme
elle le faisait valoir dans ses conclusions d’appel, le maître d’ouvrage et l’architecte M. X…
dont les intérêts objectifs étaient les mêmes, ont volontairement contourné les dispositions
du permis de construire en espérant une régularisation ultérieure, et ont ainsi ôté au
sinistre tout caractère aléatoire ; que pour décider que la garantie de l’assureur de M. X…
était due, la cour d’appel s’est bornée à relever que la méconnaissance du permis ne
permettait pas de caractériser la volonté du responsable de créer le dommage, et donc
une faute intentionnelle ; qu’en s’abstenant de répondre au moyen invoquant l’absence
d’aléa, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant souverainement retenu, d’une part, que la double confusion
reprochée à M. X… constituait une faute disciplinaire mais ne caractérisait pas un exercice
anormal de la profession d’architecte par référence aux textes législatifs et réglementaires
régissant sa profession et, d’autre part, que la faute relevée ne suffisait pas à caractériser
la volonté de M. X… de créer le dommage, la cour d’appel, qui n’avait pas à répondre à un
moyen relatif à l’absence d’aléa que ses constatations rendaient inopérant, a, par ces
seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la MAF aux dépens des pourvois ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la MAF à payer à la société Becker
Bau la somme de 2 500 euros, et à MM. Y… et Z…, ensemble, la somme de 2 500 euros ;
rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le
président en son audience publique du deux mars deux mille onze.
Cass. 3e civ. 29 mars 2011, n°09-16.749
Attendu, d’une part, qu’ayant relevé que si la société PL Construction, entreprise tous
corps d’état, chargée d’édifier le pavillon des époux X…, avait pu connaître des problèmes
de trésorerie lors de la conclusion, le 6 mars 2006, du contrat, cela n’impliquait pas qu’elle
n’avait pas, à cette époque, été en mesure de régler ses sous-traitants d’autant que les
maîtres de l’ouvrage avaient payé d’avance une somme de 74 853 euros excédant le
montant du devis des travaux de gros-oeuvre évalué à 45 643 euros, qu’il n’était pas établi
que cet entrepreneur n’avait pas fait faire de devis pour les autres travaux (charpente,
couverture, menuiserie etc…), et, que l’impossibilité d’exécution du contrat, après la
construction des murs du sous-sol, résultait de la mise en redressement judiciaire de la
société PL Construction, constaté l’existence de désordres consistant en des malfaçons et
en une absence de plans d’exécution et de supervision des travaux, les tâches de grosoeuvre
ayant été morcelées entre trois entreprises, ce qui, selon l’expert, révélait
manifestement des négligences et le non-respect par M. Y…, maître d’oeuvre, de sa
mission, la cour d’appel, qui a pu en déduire que si un certain nombre de fautes avaient
été commises par l’entrepreneur et l’architecte, il n’était pas établi par l’assureur qu’elles
l’avaient été intentionnellement dans le but de provoquer le sinistre, privant ainsi d’aléa le
contrat d’assurance souscrit par ces parties auprès de la Mutuelle des architectes
français, a, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations
rendaient inopérantes, légalement justifié sa décision ;
Attendu, d’autre part, qu’abstraction faite du motif surabondant relatif à la non-acceptation
par l’assuré de conventions spéciales ayant modifié les conditions générales du contrat, la
cour d’appel, devant laquelle la MAF avait fait valoir qu’étaient exclues de sa garantie les
conséquences des maniements de fonds, n’a pas violé le principe de la contradiction en
retenant que le trop-perçu ne s’analysait pas comme la conséquence d’un maniement de
fonds puisqu’il provenait de malfaçons et d’absence de finitions imputables à la faute des
assurés, et, ce faisant, a répondu aux conclusions prétendument omises ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Mutuelle des architectes français aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Mutuelle des
architectes français et condamne la Mutuelle des architectes français à payer aux époux
X… la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le
président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille onze.
Cass. 2e civ. 30 juin 2011, n°10-23.004.
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 mai 2010), que la société Cabinet
Borne et Delaunay (la société), syndic d’une copropriété, a souscrit au nom de cette
dernière un contrat d’assurance “multirisques immeuble” auprès de la société Azur ; que la
nullité de ce contrat, pour fausse déclaration intentionnelle, a été prononcée par une
décision irrévocable ; que la société, condamnée à garantir la copropriété des
condamnations mises à sa charge à la suite de plusieurs sinistres de dégâts des eaux
dont un locataire avait été victime, a assigné en garantie son assureur responsabilité civile
professionnelle la société d’assurance Sprinks, aux droits de laquelle est venue la société
Albingia (l’assureur) ; que ce dernier, se prévalant des dispositions de l’article L. 113-1 du
code des assurances, a opposé la nullité du contrat d’assurance ;
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir
condamner l’assureur à la relever et la garantir de l’intégralité des condamnations
prononcées à son encontre par l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 24 octobre
2005, soit la somme en principal de 99 304,09 euros avec intérêts au taux légal à compter
du 27 juillet 2006, date du paiement, déduction faite de la franchise contractuelle, et aux
dépens, alors, selon le moyen, que la faute intentionnelle ou dolosive excluant la garantie
de l’assureur est celle qui implique la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu’il
est survenu ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que la société avait, au moment
où elle souscrivait la police d’assurance «multirisque immeuble», la volonté et la
conscience de mettre à la charge de son propre assureur les conséquences du dommage
qui résulterait de sa fausse déclaration intentionnelle ; que ce faisant, la cour d’appel n’a
pas démontré que la société au moment de souscrire la police d’assurance multirisque
pour le compte de la copropriété, avait la volonté de mettre à la charge de son propre
assureur responsabilité civile professionnelle l’indemnisation de tout dégât des eaux
pouvant être subi par la copropriété qu’il gérait ; qu’en statuant par voie de simple
affirmation et par des motifs dont il ne résulte pas que la société ait eu la volonté certaine
de commettre le dommage tel qu’il est survenu, la cour d’appel n’a pas donné de base
légale à sa décision au regard de l’article L. 113-1 du code des assurances et de l’article
1134 du code civil ;
Mais attendu que l’arrêt retient que selon l’article L. 113-1 du code des assurances
l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou
dolosive de l’assuré ; qu’en l’espèce, la faute commise par l’assurée et invoquée par
l’assureur pour dénier sa garantie, consiste à avoir souscrit une police d’assurance
“multirisques immeuble” dans des conditions de mauvaise foi telles que la nullité de la
police était encourue et a été décidée par décisions de justice ; que la faute intentionnelle
au sens de l’article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances s’entend de celle
impliquant la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu’il est advenu ; qu’en
l’espèce, en souscrivant de mauvaise foi une police d’assurance “multirisques immeuble”
auprès de la société Azur, et en sachant que cette police encourait la nullité pour un motif
évident que manifestement l’assureur ne manquerait pas de soulever, la société a voulu
faire supporter à son propre assureur de responsabilité civile professionnelle la charge du
sinistre non indemnisé par la société Azur ;
Que par ces constatations et énonciations faisant ressortir que la société avait, au moment
où elle souscrivait la police d’assurance “multirisques immeuble”, la volonté et la
conscience de mettre à la charge de son propre assureur les conséquences du dommage
qui résulterait de sa fausse déclaration intentionnelle et en conséquence avait l’intention
de causer le dommage tel qu’il est survenu, la cour d’appel a légalement justifié sa
décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le cabinet Borne et Delaunay aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du cabinet Borne et
Delaunay ; le condamne à payer la somme de 2 500 euros à la société Albingia ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le
président en son audience publique du trente juin deux mille onze.
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