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Section 2 : les préjudices indemnisables sur le fondement de la responsabilité environnementale

ADIAL

La réparation ne concerne que les dommages écologiques listés par la loi LRE de 2008. Elle précise que la réparation doit se faire, par priorité, en nature, ce qui permettra de préserver la fonction écologique d’une espèce ou d’un habitat. L’obligation de réparation peut aller très loin et coûter très cher, à titre d’exemple le responsable d’un préjudice écologique a été condamné à assumer le cout du suivi de la reconstitution des habitats naturels pendant 5 ans(126).

On constate une augmentation et une complexité des sinistres, par conséquent, il doit y avoir une prise de conscience des assurés quant à l’importance de garantir leur responsabilité face à ces risques environnementaux. De plus, lorsqu’un exploitant est responsable d’un dommage à l’environnement, notamment lorsqu’il est d’une grande importance, celui-ci est largement relayé par les médias, ce qui peut être préjudiciable pour la réputation et l’image de l’entreprise, surtout aujourd’hui, où la protection de l’environnement est devenue une préoccupation pour une grande majorité de personnes.

Par ailleurs, un groupe de travail a proposé une nomenclature des préjudices environnementaux, il s’agit d’une nomenclature unique des préjudices indemnisables en cas d’atteintes à l’environnement. Pendant cette étude, il a été constaté que de plus en plus de décisions prenaient en compte le préjudice écologique (exemple : l’affaire Erika). Il a également été relevé que les définitions des différents chefs de préjudices étaient imprécises. Cette étude a donc proposé une homogénéisation, sur le modèle de la nomenclature Dintilhac, en distinguant les dommages causés à l’environnement et dommages causés à l’homme. En définissant les dommages causés à l’environnement comme « l’ensemble des atteintes causées aux écosystèmes dans leur composition, leurs structures et/ou leur fonctionnement (…) au-delà et indépendamment de leurs répercussions sur les intérêts humains »(127).

C’est grâce à l’affaire du naufrage du Erika(128) que le préjudice écologique pur a été reconnu judiciairement pour la première fois. Il s’agissait d’un navire citerne transportant 30 000 tonnes de fioul de Dunkerque à Livourne. Une cassure à la coque entraina le naufrage du navire dans la Zone Economique Exclusive près du littoral français. En quelques jours, la cargaison se répand dans les eaux et atteints les cotes de la Bretagne à l’ile de Ré. La Cour de cassation retient une faute de témérité à l’encontre de la société Total, contrairement à la cour d’appel qui, se fondant sur la « civil Liability Convention » de 1992, la société Total en qualité d’affréteur bénéficiait de l’immunité du régime spécial de la Convention et ne retient que la responsabilité des acteurs hors du champ de cette Convention (mandataire du propriétaire, gestionnaire du navire, société de classification). La Cour de cassation considère que Total avait fait preuve d’une faute de témérité en ne respectant pas « les règles qu’elle avait elle-même mises en place pour ne pas risquer d’affréter un navire inapte au transport de produits gravement polluants » et bénéficiait donc à tort de cette immunité. L’atteinte à la nature n’est désormais plus sans prix.

La nature doit être appréciée comme un bien commun et non plus une res nullius (chose n’appartenant à personne). Ainsi, lorsque celle-ci est victime d’atteinte, le responsable sera contraint de réparer le dommage qu’il a causé.

Une proposition de loi a été déposée au Sénat et adoptée le 16 mai 2013 (voir annexe II), relative à l’insertion du préjudice écologique au titre IV du Code civil « responsabilité du fait des dommages à l’environnement ». Cette loi a pour objectif de donner un fondement juridique incontestable au préjudice écologique et son indemnisation. Il est envisagé l’insertion d’un article 1386-19 du Code civil aux termes duquel « toutes personne qui cause par sa faute un dommage à l’environnement est tenue de le réparer ». Ainsi qu’un article 1386-20 du Code civil prévoyant que « la réparation du dommage à l’environnement s’effectue prioritairement en nature ». De plus, « lorsque la réparation en nature du dommage n’est pas possible, la réparation se traduit par une compensation financière versée à l’État ou à un organisme désigné par lui et affectée, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d’État, à la protection de l’environnement. » Le nouvel article 1386-21 du Code civil envisagerait quant à lui que « les dépenses exposées pour prévenir la réalisation imminente d’un dommage, en éviter l’aggravation, ou en réduire les conséquences, peuvent donner lieu au versement de dommages et intérêts, dès lors qu’elles ont été utilement engagées. »

126 TGI Digne-les-Bains 21 mars 2012
127 L.NEYRET, G. J.MARTIN, Focus « la nomenclature des préjudices environnementaux vient de paraitre », RCA, juin 2012, p.2.
128 Cass. crim. 25 septembre 2012, n°10-82938, publié au bulletin ; L.BLOCH, « Ma très « cher » Erika », RCA, décembre 2012, p.3.

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