L’objectif de cette recherche était de faire l’état des lieux du plagiat électronique au niveau de l’enseignement supérieur universitaire. Et à ce titre, nulle velléité d’explication per se du phénomène n’y figure, tout au plus une tentative d’en faire le point en l’explorant et le décrivant.
Aussi, avons-nous investigué ses formes et causes, étudié son association au genre et examiné son étendue à travers les champs disciplinaires de la formation universitaire. Nous y sommes parvenus moyennant deux instruments de collecte de données : la méthode Delphi et le questionnaire auto-rapporté (Self-reported questionnaire).
Il appert donc de notre recherche, que le plagiat électronique est répandu dans notre université à des proportions, allons-nous dire, préoccupante. Comparativement à d’autres pays européens ou anglo-saxons, nos étudiants en usent à volonté. Eu égard au silence assourdissant de l’université vis-à-vis du phénomène, nous nous pouvons le leur reprocher. Ils n’y sont ni formés ni informés ni préparés. Ethiquement parlant, l’université en est responsable.
Elle est tenue, par la mission de formation et de qualification qui est la sienne, de prendre les mesures éducatives, préventives et punitives qui s’imposent et ce, pour la préservation de la qualité de son image et celle de ses outputs.
Notre recherche a révélé donc qu’aucun champ disciplinaire n’est exempt de plagiat électronique. Les facultés à vocation scientifique (FST et FP) sont plus touchées que celles des Lettres et Sciences Humaines, ce qui s’avère être vraisemblablement une tendance internationale. Par ailleurs, aucune association n’a pu être trouvée entre le genre et le plagiat électronique, convergeant ainsi avec certaines recherches anglo-saxonnes. En outre, le copier-coller, forme représentative du plagiat électronique s’il en est, semble ne pas être corrélé à Internet, ce qui en même temps converge et diverge avec certaines études d’outre-Atlantique.
Par contre une corrélation assez forte est trouvée entre la faculté et le plagiat électronique, résultat corroboré par le test de Kruskal Wallis qui a révélé que les causes, du moins intrinsèques (personnels), de ce dernier sont affectés par l’appartenance à une faculté. Pour les causes justement, les étudiants en avancent quelques-uns ; certains d’ordre personnels tels que l’ignorance de ce qu’est le plagiat électronique, la non connaissance des règle de citation, et d’autres d’ordre situationnel comme l’indifférence et la pression des enseignants, la pauvreté des bibliothèques et la facilité de le faire.
En sus, nous présentons suite à une espèce de « benchmarking » que nous avons accompli au travers la littérature sur le thème, une batterie de mesures préventives et curatives qui peuvent être prises, avec toutes les modifications d’adaptation et d’opérationnalisation qui s’imposent, aussi bien au niveau de l’institution, soit-elle université ou faculté, qu’au niveau des enseignants.
Nous y préconisons que l’institution adopte une approche holistique et proactive du phénomène. Comme le recommande Joyce (2004), elle est à trois ardillons, l’éducation, la prévention et la détection. Pour le premier, de loin le plus crucial, nous proposons la mise en place d’une bonne guidance des étudiants pour développer leur littératie informationnelle voire la rehausser. Les enseignants et les bibliothécaires sont les meilleurs intervenants pouvant le faire. Wilhoit (1994), exhorte en effet les enseignants à former et à préparer leurs étudiants à la recherche et à l’écrit académique et les tenir pour responsables lorsque le plagiat advient, Ce qui réduit la probabilité d’en faire. Ils sont aussi appelés à repenser le design de leurs devoirs et évaluation de sorte à rendre le plagiat électronique inefficace. Nous y proposons une panoplie de mesures que la littérature présente comme pertinentes. Le bibliothécaire peut également prendre le relais via des ateliers, des séminaires des bibliothèques virtuels où « […] parents et étudiants ont accès 24/7 à un éventail de ressources…et matériels instructifs pouvant les aider à comprendre et à éviter le plagiat ». (notre traduction) (Rohrbach et Valenza, 2005, p.120)
Pour le second ardillon, l’institution devra se doter d’une définition claire et bien arrêtée du plagiat électronique, mettre en place, d’une manière participative, un code de conduite réglementant le comportement de tout un chacun, et d’introduire en plus d’un code d’honneur voué au respect des valeurs de l’intégrité académique, la signature d’une charte anti-plagiat.
Par ailleurs, elle pourrait prévoir dans son programme annuel toute une gamme d’activité de formation et de sensibilisation à la problématique du plagiat électronique. Elle devrait en outre, fluidifier la communication avec le corps enseignants pour qu’il y consensus quant aux mesures à prendre et les protocoles à adopter.
Par rapport au dernier ardillon, l’implantation d’un outil de détection de plagiat est une nécessité incontournable. Toutefois sans formation des enseignants et du staff administratif à son usage, il ne serait qu’une mesure cosmétique. Nous y proposons aussi la création d’un centre d’enregistrement des cas de plagiat, et de former des agents pour le gérer. Il leur sera assigné la tâche d’instruire, au côté des enseignants, les cas de plagiat. Par ailleurs, un système punitif transparent et largement diffusé et, dont l’application ne souffrira nulle entorse, devra accompagner toute les mesures énumérées.
Il serait, à notre sens, illusoire de croire que la situation s’améliorera d’elle-même, pour peu que l’institution se presse à prendre ses responsabilités et s’attelle y obvier. Au-delà de ce constat et des droits d’auteur qui en pâtissent, ce sont les étudiants non plagiaires qui en font les frais, dans un système universitaire déjà suffisamment sélectif et, par ricochet, ce sont les diplômes de l’université qui ne sont plus des labels de qualité. Par voie de conséquence, nous le disions, « […] une approche institutionnelle de prévention et détection de plagiat est vitale afin de protéger tant les intérêts de l’institution que ceux de l’étudiant. » (Notre traduction)(Baggaley et Spencer, 2005, p.61)
Compte tenu des limites de notre recherche, et vu le caractère vaste et complexe du phénomène du plagiat électronique, il serait toujours intéressant que d’autres recherches s’y penchent. Il y va de la bonne santé de l’institution universitaire. Nous soulignons ci-après quelques pistes de recherche futures :
McCabe et Trevino, (1996, cité par Newton, 2009), souligne l’absence d’études longitudinales du phénomène de la triche académique. Ainsi, une recherche de ce genre pourrait faire le point sur l’évolution du phénomène du plagiat électronique dans un établissement d’éducation.
Une étude comparative entre le plagiat conventionnel et plagiat électronique au niveau universitaire serait éclairante à plus d’un égard.
Une recherche qui mettrait la lumière sur l’étendue du plagiat électronique dans un établissement de l’enseignement public et un établissement de l’enseignement privé, d’en faire la comparaison serait également une piste de recherche à suivre.
Notre recherche a révélé que l’indifférence des enseignants est la cause majeure du plagiat électronique des étudiants. Ashworth, Bannister et Thorne (1997), souligne à juste titre que l’indifférence des enseignants inhibe l’obligation morale d’éviter la triche par les étudiants. Il serait donc intéressant qu’une recherche puisse trouver ce qui se cache derrière cette indifférence.
L’investigation de la perception des enseignants et des étudiants de l’implantation d’un outil de détection de plagiat serait aussi informative avant la mise en place d’un tel outil.
Une étude comparative entre la compréhension des étudiants ce qu’est le plagiat électronique et celle des enseignants au niveau universitaire, ne fera aussi qu’enrichir notre compréhension du phénomène.
Par ailleurs, un nombre de facteurs tels que (la note, l’âge, le genre, le climat de l’établissement, l’enseignant, les sanctions, les attitudes) pourraient être investigués pour voir s’ils sont déterminants du plagiat électronique.