L’alinéa 3 de l’article 1 de la loi 47.96 dispose que « les affaires de la région sont librement gérées par un conseil démocratiquement élu pour une durée de six ans, conformément à la législation en vigueur ». Cette disposition laisse s’interroger sur le sort des actes et des délibérations du conseil régional sur lesquels pèse une suspicion d’illégalité. L’article 44 de la loi précitée dans son alinéa 5 stipule que « en cas de refus du conseil régional(…), le gouverneur du chef-lieu de la région peut saisir le tribunal administratif ». Il en est aussi de l’article 45 alinéa 2 « La nullité de droit est prononcée à tout moment par le tribunal administratif(…) ». Alors que l’article 70 alinéa 2 de la loi 17.08 portant charte communale énonce que « Si le conseil communal maintient sa décision après le nouvel examen, le Premier ministre peut, dans un délai de trois mois, décider par décret motivé, sur proposition du ministre de l’intérieur, de la suite à donner, (…) ». Les mêmes dispositions sont réitérées au niveau de l’article 61 alinéa 2 de la loi 79.00 portant charte provinciale et préfectorale. Il découle de ces dispositions que le contrôle des actes illégaux des conseils régionaux relève des juridictions administratives, alors que les actes illégaux des autres types de collectivités locales demeurent sous contrôle administratif.
Les pouvoirs publics français semblent adopter cette juridictionnalisation du contrôle de tutelle dès les réformes de la décentralisation de 1983 tout en supprimant le contrôle préalable et en renforçant le contrôle de la légalité des actes des collectivités locales. Sur le plan administratif, le préfet n’est plus juge administratif, il transmet aux juridictions compétentes les actes illégaux des collectivités locales par le bais du « déféré préfectoral »(1). Au Maroc, le procédé parait plus ou moins pertinent pour les régions car celles-ci impliquent une certaine marge d’autonomie vis-à-vis des autorités centrales compte tenu de leurs particularités. Cette autonomie ne pourrait être respectée que par un contrôle juridictionnel.
La juridictionnalisation du contrôle de la légalité des actes des collectivités locales consiste à éviter les ingérences des autorités centrales dans les affaires locales. Cependant, émanciper les élus représente un risque dont le garde-fou est à la fois le contenu de la loi et le sérieux de l’exercice du contrôle de légalité(2). Cette émancipation, si elle demeurait souhaitable pour tous les types des collectivités locales, elle n’est réalisée que relativement au profit des régions, et ce, en raison des spécificités que présentent ces dernières.
1 G. Gontcharoff, Connaissance des institutions publiques ; repères à l’usage des acteurs sociaux, édition. L’HARMATTAN, 1994, p. 426
2 Ibid., p. 423
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