Le retour au territorial est donc une tentative de désectoriser l’action de Etat en intégrant les différents pôles (intervention, urbanisme, action sociale, enseignement, action en matière de sécurité…) dans une perspective horizontale. Tout le problème est de savoir s’il est possible aujourd’hui d’élaborer des politiques non sectorielles.(1)
Territorialisation des politiques publiques(2) et émergence des politiques publiques territoriales n’est pas la même chose. Si la première s’inscrit dans le cadre de la redéfinition du rôle de l’Etat et la recherche de sa légitimité dans le territoire après l’échec de la sectorialité, la seconde est une conséquence de la multiplication des intérêts locaux qui sont à la charge des collectivités locales. Et le constituant a été logique dans la formulation de l’article 137 de la constitution du 1 juillet 2011 « Les régions et les autres collectivités territoriales participent à la mise en OEuvre de la politique générale de l’Etat et à l’élaboration des politiques territoriales à travers leurs représentants à la Chambre des Conseillers ». Ces deux logiques ; descendante et ascendante n’auraient pour objectif que de chercher à mettre en place une politique de proximité axée essentiellement sur l’implication de plus en plus des autorités décentralisées dans la formulation des politiques publiques tout en se liant institutionnellement et politiquement avec l’Etat par la chambre des conseillers. Il s’agit d’une véritable réconciliation entre le territoire et le national, mais cette fois-ci par le truchement de la participation, la concertation et de la contractualisation au lieu de la subordination et de l’exécution des décisions venant du centre.
A vrai dire, la satisfaction des intérêts locaux par une approche innovante à la fois intégrée et managériale dénote un retour au local d’une manière autre qu’auparavant. Il n’est plus temps des notables ou des corporatismes traditionnels mais plutôt un retour avec un référentiel modernisateur ou du «marché »(3).
En d’autres termes, une relocalisation des politiques publiques par l’esprit d’entreprise faisant des élus locaux de véritables managers pour être capables de formuler des politiques économiques et sociales locales efficaces. Plus nettement, les collectivités locales tendent à se définir comme des producteurs de politiques publiques de sorte que l’on constate une substitution d’une logique de l’efficacité à une logique de la légalité. Alors que, traditionnellement, l’élu doit d’abord se conformer à la règle de droit, il doit aujourd’hui faire la preuve de sa capacité à maîtriser le développement économique et social de sa commune, de sa province ou préfecture ou de sa région(4). C’est ainsi que la sectorialité a vite montré son ineffectivité pour donner lieur à une vision plus satisfaisante des politiques publiques, et ce, grâce à l’articulation qui existe entre la planification régionale et la planification nationale.
1 Ibid., p 186
2 Pour plus d’infos sur la territorialisation des politiques publiques, voir Chahid Fatima, « La territorialisation des politiques publiques » in : REMALD, collection « Manuels et travaux universitaires », n°63, 2005
3 P. Muller, Les politiques publiques entre secteurs et territoires, in : politique et management public, vol. 8, n° 3, 1990, p. 30-31
4 Ibid., p. 29