L’exclusion des idées du champ du droit d’auteur est la première conséquence du critère de la
forme. Elle trouve son origine d’une part dans la volonté de permettre un essor de la création
en évitant l’assèchement des idées, et d’autre part dans l’impossibilité technique de protéger
l’idée d’une oeuvre. Ainsi dans un arrêt du 3 juin 1998(18), le Tribunal de grande instance de
Paris a-t-il estimé qu’une publicité utilisant une toile ressemblant à une oeuvre de Pablo
Picasso n’enfreignait pas le droit d’auteur. Le « style » cubiste de Picasso est assimilé à une
idée et n’est pas protégeable.
Protéger les idées serait contre-productif, car cela irait à l’encontre du progrès social. On peut
ajouter qu’une idée est basée généralement sur une idée préexistante, surtout en art
contemporain. Un arrêt du 25 mars 1987 (19) a ainsi réaffirmé que le concept de l’empaquetage
utilisé par les artistes contemporains Christo et Jeanne Claude, n’empêchait pas sa
réutilisation dans le cadre d’une action publicitaire. Sans forme ou support physique, une
oeuvre n’est tout simplement pas protégeable et n’est pas regardée comme telle par le droit.
La principale contrainte de cette approche, est de différencier l’idée de la forme. Ce qui peut
être simple pour l’art classique, pose beaucoup plus de problèmes concernant l’art
contemporain, qui considère le concept comme supérieure à la forme. On pense notamment au
travail des artistes conceptuels comme Joseph Kosuth(20). Dans son oeuvre de 1964 « one, two,
three chairs », l’objet devient accessoire. Sa valeur artistique tient surtout à la démarche de
l’artiste, plus qu’aux objets qui la réalise. Pour cette oeuvre, le spectateur est invité à réfléchir
sur trois moyens de considérer une chose : Par une définition linguistique, par une
représentation photographique et par une représentation matérielle.
18 TGI Paris, 3 juin 1998 Gazette du Palais, 2e sem. p. 689
19 TGI Paris, 25 mars 1987 Dalloz 1988
20 Cf Annexe VI