1°)Des débuts difficiles
L’évolution des risques environnementaux et de leurs répercussions sur la santé s’inscrit dans le processus historique de développement que connaissent les économies et les sociétés. On peut tenter de schématiser le processus de transition des sociétés agricoles du XIXème vers les économies post modernes du XXIème siècle :
– Agriculture et industrie naissante,
– Développement de l’industrie et des services,
– Essor des technologies de l’information et de la communication, globalisation économique
– Etape du développement durable ou des systèmes écologiques planétaires menacés.
Tant la nature, que l’ampleur des problèmes environnementaux majeurs, de même que leurs conséquences sanitaires, évoluent durant ce processus de transition économique.
Dans les économies traditionnelles par exemple aux problèmes environnementaux majeurs (eau potable, hygiène de l’habitat, qualité de l’alimentation) sont associées les maladies infectieuses et transmissibles, les carences nutritionnelles et la mortalité néo-natale. Avec l’industrialisation, la rationalisation de la production de masse et l’urbanisation, de nouvelles menaces apparaissent en raison d’émissions croissantes de substances toxiques susceptibles de s’accumuler dans l’eau, l’air, les sols, les aliments. Si on constate, au cours de cette période, une diminution des pathologies infectieuses et transmissibles il n’en est pas de même des pathologies chroniques comme les cancers, les problèmes respiratoires, les troubles neurologiques qui eux voient leur importance grandir jour après jour.
Cette évolution s’est produite en même temps que l’on assistait à l’allongement de l’espérance de vie résultant de l’amélioration globale des conditions socio-économiques dans les pays de l’OCDE. Cela pose un problème aux observateurs car il est devenu plus difficile de départager, dans les pathologies chroniques, ce qui relève des conséquences de l’allongement de la durée de vie et ce qui est lié à l’exposition aux dangers environnementaux modernes.
Une analyse similaire distingue les dangers environnementaux dits « traditionnels » sur la santé (eau potable ,alimentation, hygiène, habitat,…) associés à la pauvreté et au faible niveau de développement, des dangers environnementaux « modernes » qui sont associés au développement non durable. Cette conception a fait l’objet d’un cadre d’analyse global développé par l’OMS depuis un dizaine d’années sous le nom de « Driving force- Pressure- State- Exposure- Effect- Action ».
L’ambition de ce cadre d’analyse est d’éclairer les principales relations entre les trois composantes (développement, environnement, santé) et de faciliter l’identification des politiques et des mesures susceptibles de contrôler et de prévenir les dommages environnementaux. L’altération de l’environnement a des conséquences en terme d’exposition des populations à certains dangers. A chaque étape du processus des mesures peuvent être prises pour éviter, réduire ou réparer les dommages.
Le modèle retenu par l’OMS met en place un certain nombre de critères impactants qui seront la base d’une politique de gestion du risque environnemental réussie : la qualité de l’air, l’habitat et les établissement humains, le bruit, les déchets et les sols pollués, l’exposition aux rayonnements, la qualité de l’eau, la sécurité des aliments, l’exposition aux produits chimiques. La mise en place d’un tel système de surveillance démontre la détermination des autorités publiques de mettre au cœur de leurs politiques la question environnementale et dégage une réelle prise de conscience au niveau international du problème écologique et de son impact sur la santé humaine.
2°)Une prise de conscience internationale
La montée en puissance de la problématique santé-environnement est perceptible au plan international depuis les deux dernières décennies. La troisième conférence ministérielle sur l’environnement organisée à Londres en 1999 a rassemblé les 51 pays de la région Europe de l’Organisation mondiale de la santé. Lors de cette conférence la majorité d’entre eux, à l’exception notable de la France, se sont engagés dans l’élaboration d’un plan d’action national santé-environnement destiné à fournir un cadre global pour l’identification et la mise en œuvre d’actions prioritaires dans ce domaine.
La commission européenne, qui participe activement à ce processus, a rédigé de son coté une communication conjointe aux directions générales environnement risques de pollution et impact sur la santé qui a été présenté au conseil début 2003. Par ailleurs, un des quatre principaux chapitres du 6ème programme d’action communautaire pour l’environnement « environnement 2010 : notre avenir, notre choix » est consacré à la problématique du risque environnemental.
De plus le sommet sur la terre qui s’est tenu à Kyoto se fait l’écho des revendications portées jusqu’alors en matière d’environnement et prévoit, pour les pays signataires du protocole, une obligation de parvenir à une réduction globale de 5,2 % des émissions de dioxyde de carbone d’ici 2012 par rapport aux émissions de 1990. En effet tous les pays membres de la convention climat ont pour objectif de stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Ils se sont collectivement engagés à prendre des mesures de précaution pour prévoir, prévenir ou atténuer les causes des changements climatiques et en limiter les effets néfastes. Concrètement, tous les pays ont l’obligation de publier des inventaires de leurs émissions de gaz à effet de serre, d’établir, de mettre en œuvre et de publier des programmes nationaux contenant des mesures visant à atténuer les changements climatiques ;
Enfin à l’instigation du G8 de l’environnement qui s’est tenu à Banff au Canada en Avril 2002 le projet de plan de mise en œuvre des préoccupations qui feront l’objet du sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg préconise le lancement d’initiatives internationales destinées à renforcer les connaissances et les capacités de réponses aux menaces qui pèsent sur l’environnement.
La multiplication de ces initiatives témoigne sans doute moins d’une aggravation de la situation que d’une prise en compte réelle de la difficulté de se prémunir contre les risques potentiels à long terme et de la nécessité d’une approche intégrée pour apporter des réponses pertinentes aux problèmes soulevés. Cela se traduit par une prise en compte d’interrogations nouvelles autour de la question environnementale et de son impact sur la santé.