Parmi les groupes de travail mis en place dans le cadre du Grenelle de
l’environnement, le groupe n°1, Lutter contre les changements climatiques et maîtriser
la demande d’énergie, et plus particulièrement l’atelier n°2 constitué en son sein, ont
évoqué la problématique du bâtiment et de l’urbanisme.
A en croire ses travaux, le bâti consomme 42,5 % de l’énergie finale française et
constitue le gisement principal d’économie d’énergie exploitable immédiatement.
Engager un plan thermique de grande ampleur revient donc à réduire durablement les
dépenses énergétiques et à répondre à l’enjeu majeur de réduction des gaz à effet de
serre. De manière générale, il est envisagé de passer d’une logique de « bâtimentconsommateur
» à celle de « bâtiment-producteur » d’énergies. Pour cela, le groupe de
travail préconise de travailler dans deux directions.
D’une part, engager dès à présent un chantier très ambitieux de rénovation
énergétique des bâtiments existants18, pour réduire les consommations d’énergie
d’environ 20 % dans les bâtiments tertiaires et 12 % dans les bâtiments résidentiels en 5
ans, et de plus d’un tiers à l’horizon 2020. A court et moyen terme, le gisement
d’économies d’énergie se situe dans les bâtiments anciens.
Pour être atteints, ces seuils impliquent l’adoption de mesures concrètes et ciblées19. Par
exemple, la réussite des règlementations existantes et à venir doit être assurée par la
mise en place d’un réel contrôle de leur application et par leur prise en compte de
l’apport significatif des systèmes de mesure, de régulation et de contrôle. L’introduction
des énergies renouvelables et le choix d’équipements performants doivent également
être combinés à une très bonne rénovation de l’enveloppe des bâtiments, pour que les
besoins de chaleur ou de rafraîchissement restent les plus faibles possibles.
D’autre part, les travaux du Grenelle de l’environnement préconisent de lancer
un programme de rupture technologique sur le bâtiment neuf, visant à généraliser les
bâtiments à énergie positive20 en 2020 et à avoir, dans les cinq ans, au moins un tiers
des bâtiments neufs à basse consommation ou à énergie positive.
18 Ouvrages qui existent déjà et sur lesquels sont réalisés des travaux de rénovation, de réhabilitation, de
restauration, d’extension et de réparation (PARTENAIRES, n° 25, Juillet 2008, Bulletin d’information de
L’Auxiliaire).
L’application d’un tel programme exige l’adoption d’une loi d’orientation sur le
« bâtiment efficace » fixant les étapes de l’évolution vers les bâtiments à très basse
consommation et à énergie positive ; le lancement, dès que possible, de programmes
ambitieux de constructions à basse consommation ; l’organisation d’opérations de
démonstration de bâtiments à énergie positive pour informer le public ; l’accélération de
l’amélioration des performances énergétiques par un durcissement de la Règlementation
Thermique21 ; l’obligation de recourir, dans les constructions neuves, aux énergies
renouvelables et aux matériaux qui stockent le carbone dans une certaine proportion.
Pour accompagner le développement de ces deux grandes orientations, le groupe
de travail préconise l’adoption de certaines mesures.
La rénovation énergétique des bâtiments existants et la construction de bâtiments
à énergie positive doivent pouvoir être financées par des produits adaptés. Il faut mettre
en place un dispositif d’ampleur, en partenariat avec les banques, de prêts à moyen ou
long terme, à taux réduit sur des critères environnementaux, pour les projets de
construction ou de rénovation bénéficiant d’un label agréé et pour l’installation
d’équipements d’énergies renouvelables. De nombreuses études et retours d’expériences
montrent que ces prêts améliorent la solvabilité des ménages, par les économies de
charges réalisées. En parallèle, la création d’un fonds de garantie des financements
écologiques pourrait permettre de couvrir les risques liés aux surcharges de prêts. Son
rôle est essentiel au démarrage du financement d’un secteur mal connu, où les obstacles
sont encore nombreux, tant psychologiques, techniques que financiers et constituent
autant de freins au lancement des projets. De plus, l’extension de ce fonds de garantie
au risque de détérioration de la performance énergétique pallierait le manque de produit
d’assurance dans les énergies renouvelables et favoriserait l’émergence de contrats de
garantie de performance énergétique des travaux de rénovation.
Une mobilisation de la profession du bâtiment semble également nécessaire par
la formation et le recrutement de professionnels avertis. Le groupe de travail préconise
de créer une disposition particulière afin de pourvoir les centaines de milliers de postes
nécessaires pour répondre à la demande dans le bâtiment. En effet, le défi technologique
auquel est confronté le secteur français du bâtiment aujourd’hui, ne pourra être relevé
que par un surcroît de main d’oeuvre. Ces recrutements doivent s’accompagner d’un
vaste plan de formation des entreprises du bâtiment concernant l’approche globale des
travaux et la démarche de qualité, l’intégration des nouveaux matériaux de haute qualité
environnementale et des équipements d’énergies renouvelables.
Par ailleurs, un solide « processus qualité » concernant l’ensemble de la chaîne
de construction ou rénovation est indispensable pour soutenir la phase
d’expérimentation de l’innovation énergétique, atteindre les objectifs règlementaires et
apporter effectivement les économies d’énergie et la réduction des émissions de gaz
carbonique. Le processus serait mis au point par un groupe d’experts des différentes
organisations du bâtiment pour assurer l’exhaustivité et la cohérence d’ensemble des
procédures à définir aux différents niveaux. Il déboucherait sur la mise en place d’une
organisation en charge de la qualité, centralisée pour certaines missions (développement
des méthodes et des normes) et décentralisée au niveau des régions (certification,
évaluation et contrôle des sites).
Pour réduire les coûts entravant l’atteinte des objectifs du Grenelle de
l’environnement, il faut mettre en place une politique de Recherche et Développement
efficace. Pour être choisies, les mesures concernant les bâtiments neufs ou objets de
réhabilitation doivent être financièrement attractives. Il est donc indispensable
d’engager un effort d’innovation dans toutes les disciplines pour tendre vers ce but :
architecture, matériaux, insertion des matériaux renouvelables, méthodes de
construction, industrialisation, etc. L’atteinte d’un tel résultat signerait à l’évidence la
généralisation immédiate des bâtiments écologiques dans le neuf et la réhabilitation du
parc existant.
On le constate, le Grenelle de l’environnement devra être suivi de nombreuses
mesures pour concrétiser le souffle nouveau qu’il incarne. En guise de départ, six titres
et quarante sept articles composent le « projet de loi relatif à la mise en oeuvre du
Grenelle de l’environnement » que Jean-Louis BORLOO, ministre de l’Ecologie, a
présenté fin avril 2008. Un projet de loi qui traduit en langage juridique les conclusions
du Grenelle, tout en respectant – comme l’a rappelé le président de la République le 24
avril 2008 – sa « lettre » et son « esprit »22.
22 Environnement et développement durable, Supplément au Journal LE TOUT LYON n°4792 du 14 juin
2008.
Le bâtiment demeure spécifiquement concerné par ce projet. Résultat, tous les bâtiments
publics et tertiaires devront être conçus suivant la norme « basse consommation » à
compter de fin 2010 et, à fin 2012, pour toutes les constructions neuves. De même, ces
dernières devront toutes être soumises, au plus tard en 2020, à la norme « énergie
positive ». Concernant l’existant, l’objectif demeure la réduction de la consommation
énergétique de 38 % d’ici 2020. Tous les bâtiments de l’Etat et ses établissements
publics seront également soumis à un audit énergétique d’ici 2010, en attendant une
rénovation engagée au plus tard en 2012. En matière de rénovation, là aussi l’Etat se
veut exemplaire. Il prévoit ainsi la rénovation énergétique de l’ensemble de ses
logements sociaux.
L’atteinte de tels objectifs impliquera le développement d’applications
technologiques nouvelles dont le panneau solaire photovoltaïque et la géothermie
constituent déjà des exemples intéressants.
19 Grenelle de l’environnement, Proposition du MEDEF, 3 Septembre 2007.
20 Bâtiments qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment.
21 C’est un ensemble de règles à appliquer dans le domaine de la construction afin d’augmenter le confort
des occupants tout en réduisant la consommation énergétique des bâtiments. La réglementation thermique
en vigueur actuellement est la RT2005 (www.climamaison.com).
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