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B : Les tempéraments jurisprudentiels.

ADIAL

88. Sans chercher à justifier sa solution , la jurisprudence avait fortement contribué à rétablir le principe de l’assimilation de la faute lourde au dol. Cependant, elle n’a pas toujours été fidèle à ce principe que ce soit en matière de transport où elle a néanmoins manifesté quelques hésitations (1) ou en matière de prescription où cette fois-ci, elle a été directe et ferme (2).

1 : En matière de transport.

89. La réaction jurisprudentielle contre la généralisation de l’assimilation de la faute lourde au dol s’est d’abord manifestée à propos de l’application des limitations de responsabilité incluses dans les tarifs des compagnies de transport ferroviaire. En effet, par un arrêt de la Chambre civile du 3 août 1932 , la Cour de cassation décida que le tarif devait être appliqué même en présence d’une faute lourde du transporteur dès lors que cette faute n’était pas intentionnelle. Cette solution fut réaffirmée à plusieurs reprises par la suite au profit de la SNCF .

90. De même, la Cour de cassation admis, dans un arrêt de la Chambre mixte du 20 mars 1973 , que la limitation de responsabilité édictée par l’article L 10 du Code des Postes et Télécommunications au profit de l’administration des PTT devait être appliquée, même en cas de faute lourde, en cas de perte d’un pli chargé. Cette solution fut là encore confirmée par la suite . Cependant, cette exception au principe d’assimilation des effets de la faute lourde à ceux du dol se trouve aujourd’hui remise en cause par un arrêt d’Assemblée Plénière du 30 juin 1998 confirmé récemment par un arrêt de la Première Chambre civile du 19 septembre 2007 , qui ont appliqué le principe d’assimilation de la faute lourde au dol alors qu’était en cause l’article L. 13 du Code des Postes et Télécommunications qui exonère La Poste de toute responsabilité en cas de retard dans la distribution.

91. Il en va de même en matière de transport routier. En effet, étant donné la solution dérogatoire au droit commun inaugurée par l’arrêt précité du 3 août 1932 qui est généralement expliquée par le caractère réglementaire et non purement contractuel des limitations tarifaires , la solution aurait dû être étendue à ce type de transport qui est soumis à une tarification tout à fait semblable à celle dont profite la SNCF. Toutefois, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, par deux arrêts du 7 mai 1980 , affirma que « la faute lourde commise au cours de l’exécution d’un transport soumis aux conditions d’application des tarifs pour les transports routiers de marchandises doit, comme en droit commun, être assimilée au dol, de sorte que la limitation d’indemnisation prévue par le tarif applicable ne peut produire effet ». Cela incite à s’interroger sur le fait de savoir si l’exception apportée en 1932 va demeurer. Il semble que la volonté de la Cour de cassation soit de revenir au droit commun, c’est à dire à l’assimilation de la faute lourde au dol .Cependant, il ne semble pas qu’il faille en tirer la conséquence que l’assimilation sera toujours appliquée par les tribunaux. En effet, la jurisprudence a, en d’autres occasions, refusé de tirer les conséquences de l’adage romain .

2 : En matière de prescription.

92. La jurisprudence a encore manifesté son opposition à l’application de l’adage Culpa lata dolo aequiparatur dans le domaine de la prescription. Contrairement au domaine des transports, la Cour de cassation n’a à ce sujet fait preuve d’aucune hésitation. En effet, dans un arrêt de la Chambre commerciale du 12 juillet 2004 , la Cour de cassation est venue poser le principe selon lequel « la disposition contractuelle abrégeant le délai de prescription reçoit application même en cas de faute lourde ». Ainsi, cette dernière, qui fait traditionnellement échec aux clauses limitatives de responsabilité, n’a pas vocation à paralyser l’invocation des clauses abréviatives de prescription. Il est pourtant vrai que celles-ci, lorsqu’elles ne sont pas interdites , ont pour conséquence de placer le débiteur plus rapidement que ne l’avait décidé la loi à l’abri des poursuites de son créancier et donc, d’une certaine façon, de limiter son degré d’exposition aux sanctions contractuelles. Mais là s’arrête l’assimilation car une chose est la prescription, autre chose est l’exécution. On ne peut analyser de la même manière , d’une part, la limitation du délai d’action du créancier qui peut toujours, s’il agit dans les temps, rechercher l’entière responsabilité du débiteur, et d’autre part, la limitation de responsabilité de ce dernier.

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