La certification des intervenants va de pair avec un contrôle renforcé de la
solidité des ouvrages pour assurer une qualité optimale dans le bâtiment. L’amélioration
de la prévention des sinistres doit passer, à ce titre, par une meilleure adéquation des
fondations à la nature des sols et un contrôle poussé de la mise en oeuvre des règles de
construction72.
Les sinistres causés par une mauvaise adéquation des fondations à la nature du
sol ne sont pas les plus fréquents73, mais sont d’un montant unitaire élevé. Il s’agit donc
d’une sinistralité d’intensité et non de fréquence, qui pourrait être combattue en rendant
obligatoire une étude de sols avant toute construction, ou même avant toute vente de
terrain à bâtir, voire même en renforçant les normes de fondation sur l’ensemble du
territoire.
Préalablement, l’instauration de telles obligations impose de calculer le coût
économique de ces mesures préventives. Celui-ci ne doit en effet pas être trop supérieur
au montant des sinistres qu’il permet d’éviter ! Si tant est que des diagnostics du sol
soient judicieux sur le plan économique, il subsiste un certain nombre de questions.
Quels acteurs du processus de construction devraient les mettre en oeuvre ? Quelle serait
leur étendue et qui en supporterait le coût ? Dans quelles proportions la sinistralité
causée par l’inadéquation des fondations au sol serait réduite par ces mesures ?
En tout état de cause, le suivi des pathologies réalisé par l’Agence Qualité
Construction souligne, depuis longtemps, l’importance des sinistres liés aux fondations
insuffisantes dans le domaine de la maison individuelle. Les soubresauts climatiques et
la question des eaux pluviales plaident pour la systématisation des études de sols, audelà
même de la prise en compte de ces difficultés dans les techniques de construction.
Une cartographie des sols est indispensable à titre préventif et chaque terrain devrait
être accompagné de la composition de son sol.
Dans le cadre du contrat très réglementé de construction de maison individuelle74, le
client signe généralement le contrat en vue de la construction de sa maison avant même
d’avoir terminé les formalités d’acquisition du terrain. Aucune des deux parties,
constructeur et acheteur, n’est donc susceptible de se rendre sur les lieux pour y faire
une étude de sols, sans avoir préalablement obtenu l’accord du vendeur. De fait, une
étude de sols devrait être remise à l’acheteur d’un terrain avant la signature du contrat
de vente, comme c’est le cas en matière de vente d’habitation désormais accompagnée
de certains diagnostics (amiante, plomb, gaz).
Si aucune étude de sols n’est fournie par le client, le Constructeur de Maison
Individuelle (CMI) doit pouvoir se réserver la possibilité d’en faire réaliser une et d’en
répercuter le prix au maître de l’ouvrage, ainsi que le coût des travaux induits par ladite
étude.
Il est donc nécessaire que le vendeur d’un terrain à bâtir remette, lors de la vente,
une cartographie des sols75 – pour les zones contenues dans le Plan de Prévention des
Risques (PPR)76. De plus, quand le terrain est classé à risque moyen ou élevé au titre de
cette cartographie, le vendeur du terrain devrait faire réaliser et transmettre à
l’acquéreur, une étude de sols permettant de concevoir et dimensionner les fondations
d’une maison individuelle. A défaut, les constructeurs pourraient être exonérés de leur
responsabilité décennale en cas de réclamation consécutive à un défaut imputable à la
qualité du sol ou à l’inadéquation des fondations au sol, sur la base des seules
informations fournies par le maître d’ouvrage.
L’ensemble des acteurs du bâtiment doit donc être mobilisé dans le but
d’améliorer la qualité générale des ouvrages. Le contrôle de la mise en oeuvre des règles
de construction doit également aider à atteindre cet objectif.
Le contrôle de l’application des règles de construction est réalisé de multiples
manières selon les pays77. La mise en oeuvre de ces contrôles, réglementaires ou
facultatifs, résulte, selon les cas, de l’intervention de représentants des pouvoirs publics
ou de sociétés privées agréées.
En France, les pouvoirs publics imposent des règles de construction. Leur application
est généralement contrôlée a posteriori, par des agents de l’Etat, sur un échantillon
d’environ 350 opérations par an. Dans d’autres pays, Royaume-Uni, Pays-Bas ou
Allemagne, ce contrôle est beaucoup plus poussé et peut se manifester, notamment, par
des visites sur place en cours de construction. L’instauration de tels contrôles en France
serait de nature à accroître la vigilance des pouvoirs publics et à sensibiliser les acteurs
du bâtiment aux exigences de qualité.
D’autres dispositifs de contrôle réglementés sont confiés par les pouvoirs publics à des
organismes agréés. En France, des dispositifs comme ceux du CONSUEL78 pour les
réseaux d’électricité ou de QUALIGAZ79 pour les réseaux de gaz, visent à aider les
maîtres d’ouvrage à respecter les dispositions réglementaires de sécurité.
Ensuite, les contrôles laissés à l’initiative des maître d’ouvrage reposent sur la liberté,
pour tout maître d’ouvrage, public ou privé, de passer un contrat avec une personne
compétente, par exemple un contrôleur technique ou un maître d’oeuvre, aux fins de
contrôler tel ou tel aspect de la construction.
Pour finir, dans certains pays comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, un assureur
inspecte la réalisation des travaux en cours de chantier, au bénéfice du maître d’ouvrage
et à son propre bénéfice. En France, de telles inspections sont exceptionnelles ! Il
semble que les assureurs français estiment que le coût de telles inspections, réalisées
a priori, excéderait la sinistralité susceptible d’en résulter. Pourtant, ce n’est pas ce que
suggère l’expérience du NHBC, organisme de contrôle des chantiers au Royaume-Uni.
Le « rapport MERCADAL » suggère donc avec insistance que les assureurs
français étudient de façon plus détaillée la réduction potentielle du coût de l’assurance
construction que pourrait engendrer la mise en place d’un dispositif systématique
d’inspection des entreprises et des chantiers en cours, adapté au système juridique
français et qui ne devrait pas interférer avec l’exercice des missions et des
responsabilités des constructeurs.
Il est donc indéniable que l’amélioration de la qualité ne peut passer que par un
diagnostic régulier des constructions. L’expertise technique apparaît alors indispensable
dans l’assurance de l’innovation et l’instauration du Pass’Innovation, un outil
supplémentaire en ce sens.
72 Cf. « rapport DUMAS ».
73 Les sinistres les plus fréquents sont ceux provenant d’un défaut d’étanchéité.
74 Le contrat de construction de maison individuelle confie à une entreprise ensemblière la construction
d’immeubles d’habitation ou à usage d’habitation et professionnel (ce qui comprend les immeubles à usage
libéral mais non à usage exclusivement professionnel, commercial ou artisanal) des lors qu’il n’y a pas
plus de deux logements destinés au même maître d’ouvrage. Ce contrat est soumis à des règles légales et à
un formalisme très contraignant visant, dans l’esprit du législateur, à protéger le maître de l’ouvrage
(www.lawperationnel.com).
75 Fédération Française du Bâtiment, Assurance construction, Propositions, Janvier 2006.
76 Le PPR est un document réalisé par l’Etat qui réglemente l’utilisation des sols à l’échelle communale,
en fonction des risques auxquels ils sont soumis. Cette réglementation va de l’interdiction de construire à
la possibilité de construire sous certaines conditions (www.wikipedia.fr).
77 Cf. « rapport DUMAS ».
78 Le CONSUEL ou COmité National pour la Sécurité des Usagers de l’Electricité, est un organisme
chargé du contrôle des installations électriques des habitations neuves ou entièrement rénovées
(www.wikipedia.fr).
79 QUALIGAZ est un organisme de contrôle, continûment agréé par arrêtés ministériels depuis le
1er décembre 1992, dans le cadre du contrôle des installations de gaz dans l’habitat, défini à l’article 26 de
l’arrêté du 2 août 1977 modifié. Depuis 1996, QUALIGAZ intervient également en diagnostic des
installations de gaz en service (www.qualigaz.com).
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