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B : Une désapprobation sur la forme.

ADIAL

228. La sanction semble être désapprouvée car le juge outrepasse ses droits en interprétant de manière excessive les textes (1) ce qui, consécutivement, place les aménagements contractuels sous la tutelle du juge (2).

1 : Le dépassement des textes par le juge.

229. En se fondant sur l’article 1131 du Code civil pour réputer les clauses limitatives de responsabilité non écrites lorsqu’elles portent atteinte à l’obligation essentielle du contrat, la Cour de cassation semble aller au delà du texte . Certes, c’est donner tous ses effets à la cause que de l’utiliser comme un instrument de sauvetage et de correction du contrat. La sanction du réputé non écrit serait au service de l’effectivité de cette cause. Néanmoins, le texte de l’article 1131 du Code civil ne prévoit en aucun cas un tel contrôle. En effet, le Code civil ne sanctionne que, d’une part, l’absence de contrepartie ou la contrepartie dérisoire et, d’autre part, l’illicéité ou l’immoralité du motif qui a déterminé à contracter, et ce, dans un cas comme dans l’autre, par la nullité du contrat .

230. Certes, on pourrait se demander si ces deux types de contrôle ne sont pas devenus trop réducteurs et ne cantonneraient pas la cause dans un rôle désormais trop étroit. Cependant, si la jurisprudence participe à l’élaboration du droit par le biais de ses décisions, notamment en cas de lacunes dans les textes et cela en raison de l’interdiction qui lui faite du déni de justice , elle reste une source du droit subordonnée à la loi. En effet, on se rappelle la célèbre formule du philosophe Montesquieu selon laquelle « les juges ne sont que la bouche de la loi ». Ainsi, les juges ne doivent pas se permettre d’aller au delà de ce que le législateur a voulu préconiser. Or, dans le cas qui nous intéresse, quand bien même l’élargissement de la notion de cause relevait d’une bonne intention, il semblerait qu’il y ait de la part des juges un dépassement des textes.

2 : L’aménagement conventionnel désormais placé sous la tutelle du juge.

231. En allant délibérément au delà de la lettre de l’article 1131 du Code civil, la Cour de cassation entend établir une certaine police du contrat considérée pourtant comme nous venons de le voir, comme l’apanage du législateur. Ce faisant, elle applique une sanction que celui-ci a effectivement prévue, mais seulement et uniquement pour les clauses abusives régies par l’article L. 132-1 du Code de la consommation. Elle procède ainsi, selon Monsieur le professeur Daniel Cohen , à un mélange des genres : elle emprunte au régime de la clause abusive tout en refusant sa qualification. Il faut tout de même préciser que si le pourvoi avait invoqué cette qualification, chose qu’il n’a pas faite, il aurait fallu démontrer l’existence d’un « déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties » . Par ailleurs, il aurait fallu que le contrat ait été conclu entre un consommateur et un professionnel. Or, dans le cas présent, il s’agissait de deux professionnels.

232. Ainsi, cette solution laisse planer quelques inquiétudes, les juges s’arrogeant le droit d’écarter les clauses librement consenties par les parties et de bouleverser l’équilibre économique voulues par celles-ci sans avoir été investis de ce pouvoir par la loi . Si cela pourrait être, en principe, justifié pour les clauses exonératoires de responsabilité, cela ne l’est pas concernant les clauses limitatives de responsabilité qui sont souvent une pièce essentielle de l’économie du contrat, tel qu’on a pu le voir dans notre introduction. Malgré ce que l’on vu précédemment au sujet de la préservation de l’autonomie de la volonté, on peut tout de même se demander s’il ne s’agit pas là d’une atteinte importante à la liberté des parties dans la définition du contenu obligatoire du contrat .

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