Face au développement de ce type de programme, le couplage entre web documentaire et diffusion télévisuelle est souvent considéré comme l’avenir. Pour Mathieu Mondolini, journaliste aux DNA et auteur de web documentaires, cela ne fait aucun doute : « le seul modèle économique d’après moi, c’est de l’adosser à un reportage classique(53) ». C’est aussi l’envie d’Emmanuel Leclère qui, après avoir autofinancé « Good Bye Lénine… la rouille en plus », aimerait désormais « vendre un docu télé couplé à un web doc(54) ». Le lien entre ces programmes et un évènement d’antenne permet évidemment d’élargir la cible du public et de pouvoir communiquer plus facilement, et évidemment aussi de bénéficier d’une aisance financière incomparable. Difficile d’investir plusieurs dizaines de milliers d’euros sur un contenu qui risque de se perdre dans les limbes de d’internet. Le partenariat avec des réseaux sociaux ou des sites de partage assure un peu de visibilité et un partage théorique à 50/50 des recettes publicitaires qui pourraient être perçues, ce qui correspond à une goutte d’eau dans un budget.
Mais la diffusion télé doit être issue d’une vraie réflexion et d’un choix déterminé dès l’écriture du projet. L’adossement à une émission télé ou une diffusion télé d’une partie linéaire du web documentaire permet indéniablement de lever des fonds qui ne pourraient l’être autrement. Mais ce n’est pas le passage obligé pour le web documentaire aujourd’hui. Il existe, nous l’avons vu, des types de web documentaires très différents et des formes d’écriture tout aussi diverses. C’est le choix que vient de faire Jean-François Fernandez : « Un producteur télé est intéressé par mes projets, mais lui souhaite les décliner en version télé, ce qui ne m’intéresse plus (même si j’aime la vidéo) car c’est le travail photo qui m’intéresse…(55) ».
Créer pour le web et seulement pour le web et ses possibilités particulières, est une approche tout aussi légitime et nombre de web documentaires basés notamment sur le travail photographique, visent ce moyen unique de diffusion. Car la photographie a le mérite de stimuler l’imagination du spectateur.
Si la presse écrite cherche son modèle économique, certains comme Le Monde ont décidé de se positionner dans un premier temps comme diffuseur et créateur de web documentaire créés en interne ou comme simple diffuseur de contenus financés par d’autres. Car, bénéficier de contenus divers et porteurs, c’est aussi créer une audience qui, le moment venu, pourra être monétisée. D’ores et déjà, le journal réfléchit à des opérations de sponsoring pour financer en partie des web documentaires. Il y aura bien, dans ce cadre, une création de contenus qui pourront être exigeants sans inévitablement passer par un couplage avec une diffusion télé. Et les chaînes de télévision ne sont pas en reste, non pas pour alimenter leurs cases antenne mais pour diversifier les contenus qu’elles proposent à leurs téléspectateurs via leur site internet. Si Arte et France 5 sont à la pointe, France 24 a, elle aussi, développé une offre en terme de web documentaire élaboré en interne par la chaîne.
Il reste que les web documentaires aujourd’hui, à part quelques exceptions, ne peuvent se monter sans un apport indispensable qui est d’ailleurs l’apport financier historique du documentaire télévisuel : celui du CNC.
53 http://aidj.owni.fr/2009/10/08/le-socle-du-webdocumentaire-cest-la-photo/
54 Emmanuel Leclère, Op. Cit.
55 Jean-François Fernandez, Op. Cit.