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CHAPITRE III: APPROCHE METHODOLOGIQUE

Introduction

L’objet de ce chapitre est de présenter l’approche méthodologique qui a conduit au choix des modèles. Il est structuré en quatre sections. Dans la section une, il est développé un modèle var non structurel. La section deux décrit les modèles analytiques. La troisième section porte sur le choix et la mesure des variables. Enfin, la quatrième section traite de la source des données.

III.1 VAR non structurel : Analyse impulsionnelle

Dans cette partie, on utilise le modèle de vecteurs autorégressifs (VAR) car c’est une méthode qui permet de contourner les limites des approches structurelles dans la modélisation des variables macroéconomiques (Sims, 1980). L’approche Var utilisée étant non structurelle, elle n’impose pas de restrictions issues de théories économiques sur la dynamique des variables.

Ainsi la seule exigence est d’identifier un ensemble de variables macroéconomiques qui interagissent entre elles et de déterminer le nombre de retards qui capture l’interdépendance et éliminent l’autocorrélation dans les termes d’erreur (Pindyck et Rubinfeld, 1998). L’objectif recherché dans cette section est de voir comment réagit le taux de croissance économique des pays de la CEDEAO suite à un choc sur le taux de change réel.

III.2 Modèles analytiques

Les études menées ces dernières années sur la relation entre le régime de change et la croissance économique se sont inspirées du modèle de Rizzo (1999). L’auteur, à partir d’un modèle à équations simultanées, étudie dans quelle mesure au sein d’une région donnée, en l’occurrence la Méditerranée, la nature du régime de change pourrait importer en termes de croissance. Des études plus récentes sur le domaine ont été effectuées par des auteurs comme Aloui et Sassi (2005), Rodrik (2008) et Yougbaré (2009) qui ont utilisé des modèles à données de panel. Avant la spécification du modèle de base, il y a la détermination du mésalignement du taux de change effectif réel qui se définit comme l’écart entre le taux de change effectif réel et sa valeur d’équilibre de long terme. Cela est fait à partir du modèle de Rodrik (2008).

III.2.1 Modèle de détermination du mésalignement du taux de change effectif réel

Le taux de change effectif réel est défini comme le rapport entre le taux de change nominal et la parité du pouvoir d’achat. Le modèle de taux de change effectif réel est le suivant :

PPA : la parité du pouvoir d’achat vient de « la loi du prix unique » qui stipule qu’un bien ne peut être durablement vendu à un prix différent dans deux pays car le niveau relatif des prix et le taux de change vont s’ajuster de manière à ce que les prix soient identiques dans tous les pays.

Ces variables sont disponibles sur Penn World Table et ont été utilisées par Heston et al (2006) pour calculer le taux de change éffectif réel. Lorsque le TCER est supérieur à 1, cela indique que la valeur de la monnaie est faible (plus dépréciée) par rapport à la parité des pouvoirs d’achat.

Dans la suite, on détermine l’effet Balassa-Samuelson(7) qui stipule que les pays ayant une productivité plus élevée verront leur taux de change réel s’apprécier. L’effet est déterminé en régressant le taux de change effectif réel sur le produit intérieur brut par habitant(PIBH). Le modèle permettant d’obtenir l’effet est le suivant :

L’effet Balassa-Samuelson est capté par le coefficient β. Ensuite, on détermine le taux de change réel d’équilibre par la méthode d’Edwards (1989). Cette méthode a été utilisée par Yougbaré (2009). Elle stipule qu’il existe à long terme une relation d’état stationnaire entre le taux de change et ses déterminants fondamentaux réels(8). La valeur de long terme (1985-2009) du Produit Intérieur Brut par habitant est calculée par le filtre de Hodrick-Prescott. Soient a et b les valeurs estimées respectives des coefficients α et β. Le modèle de détermination du taux de change réel d’équilibre devient ainsi :

Où HP indique le filtre de Hodrick-Prescott et TCRE le taux de change réel d’équilibre. Quant au taux de change réel d’équilibre, Edwards (1989) le définit comme « le prix relatif des biens échangeables par rapport aux biens non échangeables qui conduit à la réalisation simultanée de l’équilibre interne et externe ». L’équilibre interne traduit le plein-emploi des facteurs de production dans les périodes courante et futures. L’équilibre externe signifie que la valeur actualisée des soldes courants actuels et futurs est nulle.

Le mésalignement du taux de change réel, défini par Frenkel et Goldstein (1989)(9) comme une déviation significative du taux de change réel par rapport à son niveau d’équilibre s’obtient à partir du modèle suivant :

Avec

Mesal : mésalignement du taux de change réel,

Il faut noter que le mésalignement est déterminé pour les régimes de change fixe et flexibles. On peut citer dans ce contexte Coudert et Coharde (2008) qui procèdent à des tests de comparaison des moyennes du mésalignement entre régimes de change de facto dans un échantillon de pays émergents et en développement de 1974 a 2004. Les tests révèlent que le taux de change réel est relativement plus surévalué dans les systèmes de change fixes. A l’inverse, une forte sous-évaluation apparait dans les régimes de change flexibles.

III.2.2 Modèle de base

Quatre spécifications sont couramment rencontrées dans les études des déterminants de la croissance économique : la fonction de production agrégée, l’équation d’équilibre, l’équation de convergence et l’équation ad hoc de convergence. Pour spécifier le modèle de base, on part de la première spécification qui est la fonction de production agrégée. Elle dérive directement de la fonction de production néoclassique augmentée du capital humain.

Dans la littérature récente sur la croissance économique (Barro et Sala-i-Martin, 2003), il émerge un consensus selon lequel les variables explicatives de la croissance économique d’un pays donné sont la combinaison des moyennes temporelles des variables de flux et des variables de stocks de début de période. Ainsi, le modèle de croissance peut être représenté comme suit :

Avec :

growth: Le taux de croissance économique de la période t
PQ : Les variables de flux de la période t
PR : Les variables de stock de la période t

Cette spécification générale est conforme aux prédictions tant de la théorie néoclassique que de celle de la croissance endogène. En effet, selon la théorie néoclassique, les variables de stocks rendent compte de la position initiale de l’économie, alors que les variables de flux captent les différences des niveaux stationnaires du taux de croissance à travers les pays.

Selon la théorie de la croissance endogène, une économie est supposée être toujours dans son état stationnaire et les variables explicatives captent alors les divergences entre les niveaux stationnaires de croissance des différents pays.

La fonction de production néoclassique est complétée par la prise en compte des variables de stock et de flux.

La spécification économétrique du modèle se présente comme suit :

La présente recherche choisit des périodes de cinq ans, fréquemment retenues dans les études empiriques sur la croissance car une telle période est suffisamment longue pour éliminer les effets des cycles économiques. La variable muette de temps (X ) est censée prendre en compte les répercutions des chocs mondiaux (crise de l’endettement des années 80, crise de change des années 90 ou crise financière des années 2000) sur la croissance.

Le modèle de croissance peut se formuler ainsi :

III.3 Choix et mesure des variables

Dans le modèle de base la variable dépendante qui est la croissance est mesurée par le logarithme du PIB par habitant ( !f$gℎ). Ont été retenues quatre variables indépendantes comme déterminants de la croissance économique. Ces variables sont l’investissement (I), le capital humain (KH), le développement financier (DF) et l’ouverture commerciale (Douv).

Ces variables sont retenues pour plusieurs raisons. En effet, Levine et Renelt (1992) et Sala-i-Martin (1997) montrent que la relation entre l’investissement en capital physique et en capital humain et la croissance est robuste à des modifications de l’ensemble des variables de contrôle. De même, Levine et Zervos (1993) ont mis en évidence la robustesse de la relation entre le développement financier et la croissance. Ces variables présentent donc un intérêt du fait même de la robustesse de leur lien avec la croissance (Yougbaré, 2009). Par ailleurs, Ramey et Ramey (1994) trouvent que l’investissement n’est pas le principal canal, d’où la nécessité d’élargir l’analyse à d’autres mécanismes tels que le développement financier, l’ouverture commerciale.

Les principales variables de l’étude et leurs mesures sont les suivantes :

o L’investissement (i) : C’est le taux d’investissement. Il est mesuré par le ratio des dépenses d’investissement réel au PIB. C’est une variable de flux et on attend un signe positif de cette variable sur la croissance.

o Développement du secteur financier (Df) : il est mesuré par le ratio du crédit au secteur privé sur le PIB.

o Ouverture commerciale (Douv) : elle est mesurée par la somme des exportations et des importations rapportée au PIB. Une ouverture commerciale accrue peut être un facteur de stabilité de la croissance car elle renforce la capacité d’ajustement de l’économie et elle améliore l’efficacité dans l’allocation des ressources productives.

Elle expose aussi l’économie à plus de chocs extérieurs. Le signe de l’impact de l’ouverture commerciale est donc indéterminé au plan théorique.

– Régime de change : il est représenté par deux variables, Fix et flex. Ces variables sont obtenues en prenant en compte les classifications de jure et facto des régimes de change. Premièrement, on considère des variables muettes Rgfix et Rgflex qui prennent la valeur un (1) lorsque le régime est fixe ou flexible (intermédiaire) et zéro sinon. Ensuite, on considère les taux de change effectifs réels (TCER) de chaque pays. Enfin pour obtenir les variables Fix et Flex, on a fait le produit des variables muettes et des TCER. Un signe positif pour la variable de régime de change fixe est attendu.
– Mésalignement (Mesal) : représente le mésalignement du taux de change effectif réel. Il est défini comme l’écart entre le TCER et sa valeur d’équilibre de long terme. Le mésalignement du taux de change, souvent lié à une surévaluation défavorable aux activités des biens échangeables, est ainsi largement évoqué dans les études de performances économiques et y est considéré comme néfaste (Edwards, 1989). Ainsi on attend un signe négatif du mésalignement sur la croissance.
– Produit intérieur brut par habitant (Pibℎ) : C’est la variable dépendante. Elle est considérée comme une variable de stock de début de période.
– Le Capital humain (Kℎ) : est mesuré par l’indicateur HAI (Human Asset Index) de la FERDI (Fondation pour les Etudes et Recherches sur le Développement International). Cet indicateur intègre les aspects de la santé et de l’éducation et semble plus adéquat pour mesurer le capital humain. Un signe positif de cet indicateur sur la croissance est attendu.

Tableau n°9 : Synthèse et signe attendu des variables sur la croissance économique

Source : Construction de l’auteur

III.4 Source des données
Pour l’approche empirique de l’étude, on utilise des données de panel couvrant la période allant de 1985 à 2009 pour les pays de la CEDEAO. Le choix des périodes de 5 ans, fréquemment retenues dans les études sur la croissance s’explique par le fait qu’une telle période est suffisamment longue pour éliminer les effets des cycles économiques. Ce choix tient compte du manque de données, mais aussi pour prendre en compte les effets de la crise de l’endettement des années 80, crise de change des années 90 et la crise financière des années 2000. Les donnés proviennent principalement de la base de données de la Banque Mondiale et de la base de données de Penn World Table (2009) qui a été utilisée par Rodrik (2008).
Conclusion
Ce chapitre a permis de passer en revue le modèle jugé adéquat pour analyser l’effet des régimes de change sur la croissance économique. En outre il est utilisé le modèle de Edwards (1989) pour la détermination du mésalignement du taux de change réel. Le modèle de base se compose de onze variables dont deux muettes. Le nombre de variable n’a pas été complet, compte tenu du problème de disponibilité des données.

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