Les différents témoignages recueillis au cours de la recherche confirment qu’il existe un besoin d’offre touristique sur mesure, que les voyageurs souhaitent autant que possible coconcevoir leur voyage avec les professionnels du secteur afin de satisfaire au mieux une motivation profonde qui dépasse le seul déplacement, quand bien même celui-ci se réaliserait au meilleur rapport qualité-prix.
Ces touristes, de retour de voyage, évaluent en effet leur séjour en mettant autant l’accent sur l’échange et l’interaction culturelle avec les populations locales que sur le prix et la qualité des prestations logistiques et techniques qui ont pu accompagner leur déplacement.
Même si ces avis déposés en ligne n’apportent pas la même qualité d’information que celle qui aurait émané d’entretiens qualitatifs in vivo, ils traduisent néanmoins des tendances fortes associées aux pratiques de consommation aujourd’hui: recherche d’authenticité, transaction équitable, respect des cultures et des écosystèmes locaux, reconnaissance de l’autre dans sa différence. En ce sens, on peut émettre l’hypothèse que la consommation touristique compense une perte de repères ou un manque cognitif caractéristique du monde contemporain. La rationalisation par les prix et par la logistique voyagiste ne peut dès lors répondre de façon suffisante aux attentes des touristes. En ce sens, si l’hospitalité échappe à la recherche d’efficacité et à la rationalité économique stricto sensu, elle ne participe pas moins à la compétitivité d’une offre et à sa réussite sur le marché.
Le parti a été pris de cerner les motivations accompagnant le développement de ces nouvelles formes touristiques, en privilégiant le concept d’hospitalité. Véritable passerelle entre les attentes du voyageur et les prestations offertes par ses divers hôtes et acteurs professionnels intermédiaires à son service, l’hospitalité est au cœur de cette quête de sens. Après avoir cerné les fondements de ce besoin d’hospitalité, le propos s’est porté sur les formes que celle-ci pouvait prendre dans une proposition de voyage sur mesure.
De la recherche académique, il ressort que l’hospitalité est un concept très vaste sur lequel beaucoup a déjà été écrit. Deux dimensions ont tout particulièrement accompagné la réflexion : l’approche sociologique, où l’hospitalité est basée sur le don (donner, recevoir et rendre) de Mauss, et celle de Lashley et Morrison, qui tente de donner un cadre d’analyse plus opératoire de l’hospitalité dans le tourisme.
Deux questions importantes se posent encore au terme de la recherche : comment faire vivre l’hospitalité, au sens le plus noble du terme, dans le marché du tourisme sur mesure alors que la chaîne de prestations qu’il met en œuvre repose sur une base contractuelle marchande ? S’agissant du champ d’application, le Brésil, comment valoriser sa qualité d’hospitalité, jugée intrinsèque, et qui repose pour l’essentiel sur des bases informelles ?
La principale découverte, à l’occasion de l’interrogation des professionnels du tourisme, a été de constater que la notion d’hospitalité était la plupart du temps appréhendée sous l’angle réducteur du service d’accueil. En confrontant les points de vue, il est apparu que l’articulation entre les tours opérateurs et les agences réceptives était en tout point stratégique pour faire ressortir et valoriser l’hospitalité dans la prestation qu’ils construisent ensemble. Pour faire vivre l’hospitalité dans un contexte touristique, il convient de créer une synergie entre les acteurs professionnels, les populations locales et les voyageurs ; communiquer cette vision et innover pour concrétiser les initiatives prometteuses qui émanent de certaines agences réceptives et de leurs réseaux. L’opération s’avère difficile puisqu’il s’agit aussi de conserver une certaine compétitivité en termes de coûts et qu’il importe de ne pas tomber dans les pièges d’une prestation touristique ostensiblement mise en scène (MacCannell, 1973). L’hospitalité est à cultiver (et non à décréter) à tous les échelons du voyage sur mesure.
Quant à l’informalité brésilienne, les exemples montrent qu’elle peut cohabiter avec une certaine formalisation des pratiques. C’est l’association des différents acteurs et leur implication volontaire dans la satisfaction de la demande d’hospitalité, le tout dans une relation de proximité, qui feront la différence. Enfin, pour s’inscrire dans la durée, l’implication de la communauté locale est aussi un atout considérable qui doit être intégré dans la conception des voyages.
Ce mémoire a cité quelques exemples comme l’hébergement chez l’habitant, les ateliers de découverte de la culture locale comme par exemple des cours de cuisine ou la participation à des évènements culturels ou sportifs locaux. En réalité tout ce qui permettrait aux touristes et aux hôtes de donner le meilleur de leur savoir et de leur personne, organisé dans une offre commerciale transparente et juste.
On peut conclure en affirmant avec conviction que l’hospitalité est fondamentalement une opportunité pour ré-enchanter le voyage, tant pour le visiteur que pour le visité.
Les obstacles restent nombreux pour son déploiement harmonieux à tous les échelons des prestations accompagnant chaque voyage et le séjour qui lui est attaché. L’immersion dans le monde des tours opérateurs et des agences réceptives indique que l’enjeu de la satisfaction de la demande d’hospitalité commence à être clairement envisagé par tous ces acteurs comme facteur stratégique de positionnement et de différenciation.