Cette étude a eu pour objectif principal d’apprécier l’impact des investissements directs étrangers sur la croissance économique des pays de l’UEMOA sur la période 1980-2008. L’atteinte de cet objectif s’est traduite d’abord par une analyse des flux d’IDE en direction da l’Union et ensuite par une évaluation économétrique des interactions entre IDE et croissance économique en zone UEMOA sur la dite période. Les données de l’étude proviennent essentiellement de la base Word Development Indicator (2008) de la Banque Mondiale et des rapports du CNUCED, à l’exception des données sur l’éducation qui sont issues de la base de données de l’UNESCO.
Les tests de stationnarité, d’identification et de spécification ont permis d’estimer par la méthode des doubles moindres carrés, le modèle structurel à équations simultanées sur des données de panel afin de dégager les déterminants des IDE ainsi que l’impact de ceux-ci sur la croissance, ayant contrôlé les autres facteurs usuels de la croissance économique. En effet, l’analyse des flux d’IDE en direction de l’UEMOA indique que les pays de l’Union reçoivent moins d’IDE comparativement à leur poids économiques et à d’autres zone comme la CEMAC.
Les estimations de l’équation de capital humain montrent que les déterminants significatifs du capital humain sont les investissements directs étrangers, le produit intérieur brut par habitant et le degré d’urbanisation.
L’investissement domestique est quant à lui expliqué par les investissements directs étrangers, le crédit accordé au secteur privé, l’épargne intérieure et la croissance économique.
Les déterminants significatifs des investissements directs étrangers en direction de l’UEMOA sont la croissance économique, le capital humain, l’indice de développement financier et le taux de change.
Les résultats de l’équation de croissance indiquent que les flux entrants d’IDE contribuent positivement mais de façon non significative à la croissance économique. En outre, le niveau de l’activité économique permet de prédire les valeurs futures des investissements directs étrangers en direction de l’UEMOA. Par contre le niveau de d’IDE expliquent faiblement la croissance. Donc, contrairement à l’hypothèse d’absence de liens entre IDE et croissance économique en zone UEMOA, les résultats montrent plutôt une présence d’effets réciproques. La faible performance des IDE sur la croissance économique de l’UEMOA peut être due à la forte concentration des IDE dans les secteurs miniers, bancaires et des télécommunications, qui sont peu porteurs d’effets de report technologique, organisationnel et informationnel, à la vulnérabilité des taux de croissance aux facteurs externes dans la plupart des pays de l’Union et par le faible volume des IDE entrants au regard de leur niveau de développement. En somme, les IDE en direction de l’UEMOA ont un impact un peu moindre sur la croissance économique. Ce qui traduit une présomption d’existence d’effets de seuil (minimum de capital humain, la qualité des infrastructures, le niveau de développement économique atteint, etc.).
Ces résultats sont identiques à ceux de Ajayi (2006). En effet, il montre qu’il existe une relation positive entre IDE et croissance économique, mais ces liens sont faibles en Afrique. Dans la même logique, Bouklia et Zatla (2001) soulignent également le faible impact des IDE sur la croissance économique dans les PSEM.
Par ailleurs, les IDE qui constituent une composante principale de la mondialisation et de la globalisation économique, sont devenus depuis la fin des années 1980, un vecteur de croissance et de développement économique surtout dans les pays en développement en raison des effets de reports inhérents aux implantations des FMNs. Cependant, ces effets ne se manifestent pas de façon automatique notamment sur la croissance économique dont l’impact est beaucoup plus complexe, d’autant plus que les effets sur la croissance sont à la fois directs et indirects. L’impact dépend du mode d’implantation des FMNs, des interactions entre celles-ci et les firmes locales, et du niveau de développement économique des pays hôtes. Ceci revient à identifier les mécanismes de complémentarité avec les autres facteurs de croissance par lesquels les IDE deviennent plus efficaces en termes de croissance.
Quant à l’attractivité, les territoires d’accueil doivent répondre favorablement et intégralement aux avantages de localisation requis par les investisseurs étrangers. Dans ce cas, plus les offres des territoires et les demandes firmes multinationales seront en adéquation, moins les IDE seront volatiles et plus les effets de report sur la croissance économique sont importants. Ce qui nécessite la mise en oeuvre de politiques d’attractivité sectorielle et intégrées au niveau global de l’UEMOA.
Au regard de ces résultats, les recommandations suivantes peuvent être formulées à l’endroit des décideurs et praticiens du développement dans l’espace UEMOA.
– Renforcer les efforts de financement du secteur éducatif et mettre en oeuvre des mesures visant la formation d’une main d’oeuvre disposant des qualifications techniques et professionnelles requises pour répondre aux besoins des investisseurs nationaux et internationaux ; car le capital humain constitue un canal central par lequel les IDE influencent la croissance économique ;
– Mettre en place des politiques économiques axées sur une meilleure croissance qui permettront d’attirer davantage d’investissements directs étrangers bien qu’une telle recommandation soit assez générale et soit l’objectif d’un grand nombre de politiques économiques. En effet, une forte croissance stimulerait l’afflux des IDE ;
– Accroître les investissements publics notamment dans les infrastructures socioéconomiques, car les investissements domestiques dans les pays de l’UEMOA sont globalement inférieurs au seuil minimum de 20% préconisé par la Banque Mondiale pour amorcer une croissance forte à même de réduire significativement la pauvreté, Dje (2007)
– Renforcer le développement du système financer et bancaire. En effet, l’approfondissement financier permettrait, de réduire le risque de liquidité (l’incertitude concernant la conversion d’un actif financier en moyen de paiement), une diversification du portefeuille de l’investisseur, et favoriser ainsi le développement de la sphère réelle ;
– Améliorer l’attractivité de l’Union en créant les conditions nécessaires pour attirer davantage d’IDE en référence aux perspectives nationales et régionales de développement, et pour une plus grande efficacité des effets de report technologiques, informationnels et organisationnels sur les entreprises locales. Il s’agit de mettre en oeuvre des mesures incitatives sectorielles orientées vers les secteurs générateurs d’effets d’entrainement au profit des autres secteurs économiques.
Toutefois, les politiques d’attractivité ne sauraient se substituer aux stratégies nationales et régionales de développement de long terme, du fait qu’une croissance durable ne pourrait être soutenue uniquement par les investissements directs étrangers. Cela s’illustre par les effets néfastes de la crise financière internationale de 2007 sur les entrées de capitaux privés dans les pays en développement et plus particulièrement en Afrique.
Afin d’évaluer l’impact de l’IDE, des études spécifiques à chaque pays et à chaque secteur sont nécessaires. Les IDE peuvent réussir à stimuler une dynamique de croissance, mais ils dépendent des politiques existantes. Il faut donc envisager l’IDE au sein d’un cadre macroéconomique global. Les thèmes de la capacité d’absorption axée sur le développement du capital humain, des marchés financiers et autres marchés sont importants pour établir le lien entre l’IDE et la croissance économique en zone UEMOA. De plus les études ultérieures pourraient prendre en compte les avancées économétriques et les contributions des théories de la croissance endogène, notamment les dépassements des modèles linéaires de la croissance en envisageant la prise en compte des effets de seuil et l’introduction de variables interactives. De même, la présente étude est passible d’un certain nombre d’insuffisances, au nombre desquelles, la linéarité des différentes équations du modèle et la non prise en compte de certaines variables comme la corruption et le niveau de risque politique des pays de l’Union.