Etude de la morbi-mortalité maternelle et néonatale aux Cliniques Universitaires de Lubumbashi
I. MATERIEL ET METHODE
Il s’agit d’une étude rétrospective descriptive et analytique portant sur 31 accouchements par voie basse (VB), dont le fœtus vivant en présentation du siège, des grossesses monofœtales d’âge gestationnel supérieur à 35 semaines aménorrhées (groupe I), réalisés au cours de la période allant du 1er janvier 2010 au 30 juin 2011 à la maternité des Cliniques Universitaires de Lubumbashi en République Démocratique du Congo.
Les paramètres sociodémographiques, l’environnement obstétrical et l’issue maternelle et néonatale ont été analysés en comparaison avec ceux des 99 couples Mère-Enfant issus des accouchées eutociques (groupe II) au cours de la même période.
Paramètres étudiés
1. Age des gestantes : âge déclaré
Est adolescente, toute femme de moins de 18 ans.
L’âge a été regroupé en trois tranches selon la classification proposée par PAPIERNICK [13] :
– Moins de 18 ans (maternité précoce) ;
– 18–35 ans (maternité normale) ;
– Plus de 35 ans (maternité tardive).
2. Parité : nombre de grossesses ayant atteint au moins 28 semaines à l’accouchement.
En regroupant les parités, on a la classification suivante [13]:
– nullipare = Po
– primipare = P1
– paucipare = P2
– multipare = P3-4
– grande multipare = P ≥ 5
3.Age gestationnel : calculé à partir de la date des dernières menstruations.
On considère comme prématuré, un accouchement survenant à moins de 38 SA et supposée prolongée toute grossesse de plus de 42 SA [14,15]. L’âge gestationnel est classé en :
– < 38 SA
– 38–42 SA
– > 42 SA
4. Antécédents obstétricaux :
o Dystocie : l’eutocie étant définie comme l’accouchement spontané en présentation de sommet, tout autre mode que celui-ci constitue une dystocie [1, 4, 5]
o Utérus cicatriciel
o Présentation transverse
o Présentation de siège
o Rupture utérine
5. Bassin obstétrical (conjugué vrai = CV) :
Apprécié grâce à l’évaluation du diamètre promonto-retropubien à partir du diamètre promonto-sous pubien (conjugué diagonal) par le toucher vaginal mensurateur chez les nullipares ou les mères n’ayant jamais accouché par VB. Le toucher mensurateur a permis de distinguer le bon bassin (CV ≥ 10,5 cm) du bassin limite (CV 9,5 – < 10,5 cm) et le bassin chirurgical ou rétréci (CV< 9,5 cm) [5, 16].
6. Type de gestation (contenu utérin) :
– unique (singleton)
– multiple (gémellaire, triple)
7. Etat fœtal (vitalité fœtale) à l’admission apprécié par la présence ou non des bruits du cœur fœtal (BCF)
8. Poids de naissance (en grammes)
– Faible poids de naissance : < 2500 grammes
– Poids normal: 2500 à 3999 grammes
– Macrosomie : ≥ 4000 grammes [13]
9. Morbi-mortalité maternelle
– Mortalité : décès au décours de l’accouchement avant la sortie de l’hôpital
– Morbidité :
o Complications hémorragiques ;
o Complications infectieuses ;
o Complications traumatiques (lésions de parties molles).
10. Séjour hospitalier maternel
Il était considéré comme anormal lorsqu’il excédait trois jours pour des raisons médicales évidentes.
11. Morbidité néonatale
La dépression néonatale appréciée par le score d’APGAR a été évaluée à la fin de la 1ère minute, à la fin de la 5ème minute et à la fin de la 10ème minute après l’extraction du fœtus. Il est réparti ainsi [14]:
– ≤ 3 : dépression sévère
-4 –6 : dépression modérée
– ≥ 7 : bon score
Globalement, le nouveau-né était considéré déprimé au score < 7 et en état de mort apparente au score d’APGAR ≤ 3 [14].
Complications néonatales :
o Anoxie (diagnostiquée par un score d’APGAR bas à la naissance) [4,5] ;
o Infection néonatale ;
o Complications traumatiques.
12. Mortalité périnatale : concerne les décès des nouveau-nés après la naissance et avant la sortie de l’hôpital.
13. Séjour hospitalier néonatal (en jours)
Pour les nouveau-nés, le séjour hospitalier était considéré comme pathologique lorsqu’il se prolongeait au-delà de trois jours pour des raisons médicales évidentes.
Etudes statistiques
Les différentes données ont été codifiées, puis saisies à l’ordinateur dans son langage Access et les analyses statistiques réalisées sur les logiciels Epi Info 2008 (version 3.5.1) et Microsoft Excel 2010.
Les moyennes sont présentées avec les écarts-types (ET=DS) et les Odds ratio (OR) avec un intervalle de confiance à 95% (IC à 95% : méthode de Cornfield). Les comparaisons statistiques entre les groupes d’accouchées ont été effectuées par rapport au groupe d’accouchées par VB avec fœtus en présentation de sommet.
Le test de Student a été utilisé pour la comparaison des moyennes et celle des fréquences (exprimées en pourcentage) par le test de X2 corrigé de Yates ou le test exact de Fisher lorsque recommandés.
Le seuil de signification a été fixé à p < 0,05. Les ajustements ont été réalisés par la méthode de régression logistique.
II. RESULTATS
1. Fréquence des parturitions en présentation du siège au cours de la période
Le tableau III nous donne la répartition des effectifs en rapport avec la présentation fœtale.
Tableau III : Fréquence de la présentation du siège
Sur un total de 2113 parturientes consécutives enregistrées au cours de la période d’étude, nous avons répertorié 53 présentations du siège soit 2,5%.
2. Variété de la présentation du siège
Figure 5 : Variété du siège
La variété du siège a pu être précisée dans près de 65% des cas et le siège décomplété a été la variété la plus observée (12 cas soit 38,7%) comme nous le montre la figure 5.
3. Caractéristiques générales des populations étudiées
3.1. Caractéristiques sociodémographiques
3.1.1. Age maternel
L’âge maternel a été précisé chez toutes les parturientes.
Il s’étend de 16 à 45 ans autour d’une moyenne de 29,03 ans (DS=5,8) dans le groupe I contre 17 à 46 ans avec une moyenne de 30,25 ans (DS=6,15) dans le groupe II.
La comparaison de ces moyennes ne donne pas de différence statistiquement significative (T=0,9763 ; p=0,3308).
Dans l’ensemble, un peu plus de quatre parturientes sur 5 ont un âge compris entre 18 et 35 ans dans les groupes respectifs.
Figure 6 : Age maternel
3.1.2. Parité
Elle a été rapportée chez toutes les parturientes et s’étend de 0 à 10 dans les deux groupes. La parité moyenne est de 2,61 (DS=2,61) dans le groupe I tandis qu’elle est de 2,41 (DS=2,34) dans le groupe II. Ces deux moyennes ne sont pas statistiquement différentes (T=0,4002 ; p=0,6897).
Les détails sont présentés sur la figure 7.
Figure 7 : Parité
3.2. Environnement obstétrical
3.2.1. Age gestationnel
Il a été enregistré chez toutes les parturientes et s’étend de 36 à 42,5 SA dans les deux groupes. L’âge gestationnel moyen est de 39,08 SA (DS=1,49) dans le groupe I contre 39,31 SA (DS=1,41) dans le groupe II. La comparaison de ces deux moyennes ne donne pas de différence statistiquement significative (T=0,7712 ; p=0,4420).
De même, la comparaison des fréquences des grossesses à terme (âge gestationnel ≥38 SA) et celles des grossesses non à terme (âge gestationnel
Figure 8 : Age gestationnel
3.2.2. Poids de naissance
Le tableau IV nous donne la distribution de poids de naissance des nouveau-nés.
Tableau IV : Poids de naissance
Le poids de naissance a été précisé chez 30 nouveau-nés (96,8%) dans le groupe I et chez tous les nouveau-nés dans le groupe II.
Le poids de naissance a varié entre 2000 et 4200 grammes dans le groupe I et entre 2200 et 4300 grammes dans le groupe II.
Les poids moyens de naissance sont respectivement de l’ordre de 3073 grammes (DS=552,22) et 3262 grammes (DS=419,53) (T=0,2228 ; p=0,8240).
Par ailleurs, les nouveau-nés ayant pesé moins de 2500 grammes représentent 13% dans le groupe I contre 5,1% dans le groupe II (p=0,2113) et les nouveau-nés ayant pesé au moins 4000 grammes représentent 10% dans le groupe I contre 4% dans le groupe II (p=0,3523).
4. Morbidité maternelle
4.1. Complications maternelles
Tableau V : Complications maternelles
Aucun décès maternel n’a été déploré parmi les 130 accouchées.
Concernant la morbidité post-partale, l’on a enregistré 6 cas de lésions des parties molles (19,3%) parmi les accouchées du groupe I, il s’agit de 5 cas de déchirures périnéales et un cas de déchirure vaginale ; 6 cas de déchirures des parties molles (6,1%) parmi les accouchées du groupe II, il s’agit de trois déchirures cervicales, 2 cas de déchirures périnéales et un cas de déchirure vaginale. L’analyse statistique ne montre pas de différence significative quant au taux global de complications entre les deux groupes (p=0,1197).
4.2. Séjour hospitalier maternel
Tableau VI : Séjour hospitalier
La durée d’hospitalisation maternelle était uniformément de 3 jours chez les accouchées du groupe I contre 3 à 6 jours pour les accouchées du groupe II autour d’une moyenne de 3,1 (DS=0,51), la différence n’est pas statistiquement significative (T=0,9767 ; p=0,3306).
5. Morbidité périnatale
5.1. Score d’APGAR (Dépression néonatale)
5.1.1. Score d’APGAR à la fin de la 1ère minute
Le tableau VII nous présente la distribution du score d’APGAR à la fin de la première minute de naissance dans les deux groupes des populations des nouveau-nés.
Tableau VII : Score d’APGAR à la fin de la première minute
Le score d’APGAR a varié entre 2 et 9 chez les nouveau-nés du groupe I autour d’une moyenne de 6,96 (DS=1,70) contre 5 et 10 dans le groupe II avec une moyenne calculée à 8,43 (DS=0,91). La comparaison de ces moyennes donne une différence statistique très significative (T=6,1962 ; p=0,0000) en défaveur des nouveau-nés du groupe I.
Aucun nouveau-né dans le groupe II n’est né dans un état de mort apparente contre 3,2% des nouveau-nés dans le groupe I mais la différence n’est pas statistiquement significative (p=0,2384).
De manière générale, le taux de dépression néonatale est de 38,7% dans le groupe I contre 5,1% dans le groupe II signifiant un risque de dépression néonatale multiplié par près de 12 pour les nouveau-nés du groupe I comparativement à ceux du groupe II (OR=11,87 [3,35-44,51], p=0,0000).
5.1.2. Score d’APGAR à la fin de la 5ème minute
Le score a varié entre 4 et 10 dans le groupe I autour d’une moyenne de 8,35 (DS=1,51) contre une variation de 7 à 10 avec une moyenne de 9,31 (DS=0,77) dans le groupe II.
La comparaison de ces deux moyennes montre une différence statistique très significative (T=4,6491 ; p=0,0000) par contre il n’y a pas plus de risque de dépression néonatale chez les nouveau-nés du groupe I comparativement à ceux du groupe II (OR : ind, p=0,0554).
Les détails sont présentés dans le tableau VIII.
Tableau VIII : Score d’APGAR à la fin de la 5ème minute
5.1.3. Score d’APGAR à la fin de la 10ème minute
Le tableau IX donne la répartition des nouveau-nés en fonction du score d’APGAR à la fin de la dixième minute dans les deux groupes.
Tableau IX : Score d’APGAR à la fin de la 10ème minute
Le score d’APGAR à la fin de la 10ème minute a varié entre 4 et 10 avec une moyenne de 8,93 (DS=1,43) dans le groupe I contre 7 et 10 avec une moyenne de 9,89 (DS=0,41) dans le groupe II.
La comparaison de ces deux moyennes montre une différence statistique très significative (T=5,9642 ; p=0,0000). Aucun nouveau-né dans le groupe II n’est né déprimé contre 6,4% des nouveau-nés dans le groupe I mais il n’y a pas de risque de dépression néonatale chez les nouveau-nés du groupe I comparativement à ceux du groupe II (OR: ind, p=0,0554).
5.2. Complications néonatales
Tableau X : Complication néonatale
L’anoxie est la seule complication néonatale rencontrée dans les 2 groupes avec des taux respectifs de 38,7% et 5,1% et la différence est statistiquement très significative (p=0,0000) signifiant un risque d’anoxie néonatale 12 fois plus élevé pour les nouveau-nés du groupe I (OR=11,87 [3,35-44,51]).
L’infection néonatale et les traumatismes n’ont pas été retrouvés.
6. Evolution néonatale (mortalité néonatale)
Le tableau XI présente l’issue néonatale en relation avec les deux groupes des populations.
Aucun décès néonatal n’a été enregistré dans le groupe II, le taux de déperdition néonatale est de 6,5% chez les nouveau-nés du groupe I. L’analyse statistique ne relève pas de différence statistiquement significative (p=0,0554) quant à la mortalité néonatale entre les deux groupes.
Tableau XI : Issue néonatale
7. Séjour hospitalier néonatal
Tableau XII : Séjour hospitalier néonatal
Le séjour hospitalier néonatal a été uniformément de 3 jours dans le groupe I contre 3 à 5 jours dans le groupe II autour d’une moyenne de 3,02 jours (DS=0,04).
La comparaison des 2 moyennes ne montre pas de différence significative (T= 0,5397 ; p=0,5903) et le risque d’un séjour hospitalier allongé (>3 jours) n’est pas statistiquement plus élevé concernant les nouveau-nés du groupe I comparé au groupe II (OR=0,0 [0,00-60,89]).
III. DISCUSSION
La discussion de ces résultats portera essentiellement sur la fréquence de la parturition en présentation du siège, les caractéristiques sociodémographiques et obstétricaux des accouchées ainsi que sur la morbi-mortalité maternelle et néonatale y afférentes.
1. Fréquence des parturitions en présentation du siège
La présente étude relève une fréquence de 2,5% des parturitions en présentation du siège.
La fréquence de la présentation du siège varie essentiellement en fonction du terme de la grossesse. Elle s’établit autour de 3 à 4% à terme [1-7, 17, 18].
Dans la littérature, la fréquence globale de la présentation du siège varie très peu d’un auteur à l’autre. Notre étude relève une fréquence qui se rapproche de celles trouvées par PICAUD [19] en 1989 à Libreville au Gabon, qui a trouvé 2,2% et par DELOTTE [7] entre 1996 et 2005 au CHU de Nice en France qui a rapporté 2,3%.
Une fréquence de 4,43% a été notifiée par BADALO [20], en 1992 à Ouagadougou au Burkina, 5% par ROSENAU [21] en 1990 en France alors que BAETA [22] au Togo en 2002 rapporte 4%. BUAMBO-BAMANGA [23] en 2006 à Brazzaville a trouvé 4,7% ; en 2004 à Antananarivo (Madagascar), RAJAONARY [24] a constaté 3,78% et en 2000, VENDITTELLI [25] en France et NAYAMA [26] en 2000 à Niamey au Niger ont trouvé respectivement 3,7% et 3,2%.
Seuls RIETBERG [27], entre 1995 et 1999 en Hollande et SY [28] en 2006 en Guinée Conakry ont rapporté les fréquences les plus élevées dans la littérature qui sont respectivement de 8,2% et de 9,6%. Les fréquences les plus basses ont été de 1,24% pour BOOG [29] en 2004 à Nantes en France et de 1,72% pour DOLO [30] en 1990 à Bamako au Mali.
La comparaison entre les différents auteurs nous parait difficile dans la mesure où tous n’ont pas utilisé les mêmes critères de recrutement.
En effet, certains auteurs avaient recensé l’accouchement du siège dans les grossesses monofœtales à terme [21, 27], après exclusion des morts fœtales in utero.
D’autres auteurs [30], avaient inclus les grossesses multiples et les morts fœtales in utero quelque soit l’âge gestationnel.
2. Variété du siège
Au cours de notre étude, la répartition des variétés de présentation à l’admission était la suivante : 60% étaient des sièges décomplétés et 40% étaient des sièges complets.
Cette prédominance du siège décomplété est aussi rapportée par plusieurs auteurs qui ont trouvé des résultats comparables aux nôtres : en France, BROCHE [31] dans sa série entre 1988 et 2003 au CHU de Besançon a trouvé 64,2% de siège décomplété, 72,6% pour DESCARGUES [32] entre 1993 et 1999 au CHU de Rouen et 70% pour RAUDRANT [33] en 1999 au CHU de Lyon. Une étude menée par FARON [18] entre 1996 et 2007 à Bruxelles en Belgique révèle 67,5% des sièges décomplétés ; 65,1% pour BUAMBO-BAMANGA [23] et 61,53% pour GAMBA [34] en 1999 à Brazzaville.
Vers le 7ème mois de la grossesse, il y a mutation spontanée du fœtus en siège selon la loi d’adaptation de Pajot (adaptation du contenu au contenant) et à la suite de la modification de forme de l’utérus liée à la formation du segment inférieur [3,5]. Au cours de cette mutation, les membres inférieurs entrent en jeu les premiers puis suivent les fesses ; et suite à la pesanteur et à certains facteurs (hypotonicité utérine chez la multipare, hypoplasie utérine chez la nullipare, etc.), il en résulte un échec de la culbute physiologique expliquant ainsi la prédominance du siège décomplété (mode des fesses) retrouvée aussi bien dans la littérature que dans notre étude [5].
3. Caractéristiques sociodémographiques et obstétricales
a) Age maternel
L’âge moyen de nos parturientes dans le groupe des accouchées avec présentation du siège est de 29,03 ans (DS=5,8) avec des extrêmes de 16 et 45 ans.
Nos résultats sont comparables à ceux trouvés dans les travaux de certains auteurs : 29 ans pour RAUDRANT [33] et 29,4 ans avec des extrêmes de 14 et 43 ans pour BUAMBO-BAMANGA [23].
Par contre, d’autres ont trouvé un âge maternel moyen légèrement inférieur au nôtre : NAYAMA [26] 24,5 ans (extrêmes de 15 et 50 ans), RAJAONARY [24] 25,7 ans (extrêmes de 17 et 41 ans), DESCARGUES [24] 26,7 ans (extrêmes de 17 et 47 ans) et BROCHE [31] 28,6ans.
La présentation du siège n’est pas corrélée à l’âge maternel. D’ailleurs, la moyenne d’âge dans le groupe des sièges n’est pas différente de celle des accouchées en présentation de sommet de même que les différentes tranches d’âge.
b) Parité
Notre étude relève une parité moyenne de 2,61 (DS=2,61) avec des extrêmes allant de 0 à 10 dans le groupe des accouchées en présentation du siège. La moyenne de parité ainsi que les différentes classes de parité dans le groupe des accouchées en présentation du siège ne sont pas différentes de celle des accouchées en présentation de sommet. Notre moyenne parait supérieure à celle trouvée par RAJAONARY [24] qui est de 1,61 (DS=1,66) avec des extrêmes de 0 et 5. Ces divergences pourraient s’expliquer par le fait que notre société est plus pronataliste que les autres. Le taux de nullipares est de 22,6%, ce qui est proche de 20,8% constaté par BROCHE [31] dans son étude.
c) Age gestationnel
Dans notre série, l’âge gestationnel moyen dans le groupe de présentation du siège est de 39,08 SA (DS=1,49) et a varié entre 36 et 42,5 SA.
Nos résultats concordent avec ceux de BROCHE [35,36] qui a trouvé un âge gestationnel moyen de 39,5 SA. RAJAONARY [24] lui rapporte une moyenne de 38,13 (DS=1,43) allant de 36 à 41 SA.
Ces similitudes s’expliqueraient tout simplement par les critères d’inclusion de notre étude comme chez les autres, ayant écarté les grossesses d’âge gestationnel inférieur à 36 SA.
d) Poids de naissance
Dans le groupe de présentation du siège, le poids moyen de naissance est de 3073 grammes (DS=552,22) et a varié entre de 2000 et 4200 grammes. 76,6% des nouveau-nés ont un poids compris entre 2500 et 3999 grammes. La moyenne pondérale ainsi que la distribution pondérale dans les différentes tranches ne sont pas différentes dans les groupes d’étude.
Nos résultats sont comparables à ceux de BROCHE [35] qui a trouvé un poids moyen de 3081 grammes et 3164 grammes pour RAUDRANT [33].
Dans l’étude de RAJAONARY [24], le poids moyen est de 2844 grammes (DS=380) avec les extrêmes de 2330 et 3700 grammes ; ce qui est légèrement inférieur à celui que nous avons trouvé. BUAMBO-BAMANGA [23], dans sa série, révèle que 63,5% des nouveau-nés ont un poids compris entre 2500 et 3999 grammes.
Ces concordances s’expliqueraient par nos critères d’inclusion qui ne considèrent que les grossesses âgées d’au moins 36 SA et à cet âge, le poids de naissance est d’au moins 2000 grammes. Par ailleurs, que le poids de naissance moyen soit cliniquement plus élevé chez les nouveau-nés en présentation de sommet est tout à fait compréhensible car la macrosomie ne fait appel à la VH qu’après échec de l’épreuve du travail dans nos habitudes alors qu’elle est directement sanctionnée par la césarienne en cas de présentation du siège.
Ni l’âge maternel, ni la parité, ni l’âge gestationnel, ni même le poids de naissance n’ont influé sur la présentation.
4. Morbi-mortalités maternelle et périnatale
4.1. Morbi-mortalité maternelle
L’étude rapporte 19,3% de lésions des parties molles parmi les accouchées du groupe I, lésions représentées par cinq cas de déchirures périnéales et un cas de déchirure vaginale ; contre 6,1% de lésions des parties molles chez les accouchées du groupe II dont trois cas de déchirures cervicales, deux cas de déchirures périnéales et un cas de déchirure vaginale (p=0,1197).
SY [28] trouve 26,5% des lésions périnéales dans le groupe des accouchées en présentation du siège contre 10,7% dans le groupe des accouchées en présentation de sommet (p=0,0000). BUAMBO-BAMANGA [23] rapporte 0,3% (un cas) d’endométrite. Ces déchirures font généralement suite à des accouchements malconduits avec des extractions brutales du fœtus.
Quant au séjour hospitalier maternel, aucune différence statistique significative n’a été notée entre les deux groupes dans notre série (p=0,3306).
En ce qui concerne la mortalité, aucun décès maternel n’a été enregistré durant notre étude. Il en est de même pour NAYAMA [26] ; par contre, BUAMBO-BAMANGA [23] enregistre un taux de mortalité maternelle de 0,3% chez les accouchées avec fœtus en présentation du siège.
4.2. Morbi-mortalité périnatale
L’intérêt de cette étude est d’évaluer l’issue néonatale en rapport avec la présentation du siège dans l’accouchement par VB d’accouchement pour les gestantes reçues avec fœtus vivants (BCF présents). La morbidité néonatale a été appréciée au travers le score d’APGAR, les complications observées à la période néonatale et la mortalité néonatale évaluée avant la sortie de la maternité.
4.2.1. Dépression néonatale
Le score d’APGAR moyen à la fin de la première minute a été de 6,96 pour les nouveau-nés en présentation du siège contre 8,43 pour les nouveau-nés en présentation de sommet (p=0,0000).
Aucun nouveau-né dans le groupe II n’est né dans un état de mort apparente contre 3,2% des nouveau-nés dans le groupe I mais la différence n’est pas statistiquement significative (p=0,2384). De manière générale, le taux de dépression néonatale (score
A la fin de la 5ème minute le score d’APGAR moyen est de 8,35 dans le groupe I contre 9,31 dans les groupes II (p=0,0000). Cependant lorsque l’on considère les taux des nouveau-nés déprimés (score
Dans l’étude de BROCHE [31], le taux de dépression néonatale chez les nouveau-nés en présentation du siège est de 2,8% alors qu’il est de 0,7% dans l’étude de ALARAB [10] menée sur 641 sièges en 2004 en Ecosse.
Enfin, l’évaluation à la fin de la 10ème minute rapporte un score d’APGAR moyen de 8,93 pour les nouveau-nés en présentation du siège et 9,89 pour les nouveau-nés en présentation de sommet et leur comparaison est statistiquement significative (p=0,0000). La proportion des déprimés est évaluée à 6,4% dans le groupe I alors que dans les groupes II nous n’avons pas noté des nouveau-nés déprimés (p=0,0554).
Comparés à ceux du groupe II, les nouveau-nés du groupe I ont présenté un taux significativement plus élevé de dépression néonatale à la première minute de naissance mais l’état de bien-être n’a pas montré de différence entre les deux groupes à la fin de la 5ème et de la 10ème minutes. Un constat identique a été fait par BERGER [37] dans une série de 174 sièges de plus de 36 semaines nés par VB. Il en est de même pour DESCARGUES [32] qui signale qu’aucun score d’APGAR
4.2.2. Complications néonatales
L’anoxie néonatale a été la seule complication observée et à des taux différents dans les deux groupes : 12 des 31 nouveau-nés (38,7%) dans le groupe I contre 5 des 99 nouveau-nés (5,1%) dans le groupe II et l’analyse statistique donne une différence très significative concernant le taux d’anoxie néonatale par rapport au type de présentation (p=0,0000).
L’anoxie périnatale peut être la conséquence de l’inhalation de liquide amniotique lors de la rétention de la tête dernière.
Les complications traumatiques et infectieuses n’ont pas été notées au cours de notre étude. NAYAMA [26], dans sa série trouve 2,8% de morbidité traumatique et pour BADALO [20], ce taux est de 3,39%.
Les complications périnatales sont souvent dues au manque d’expérience de l’accoucheur, à une expulsion trainante et à une meilleure collaboration de la patiente permettant d’exécuter avec aisance les manœuvres obstétricales. D’où, l’accouchement du siège devrait être réservé à des personnes expérimentées qui ont une meilleure connaissance des différentes manœuvres et susceptibles de les faire au moment opportun.
Le risque d’un séjour hospitalier néonatal allongé (>3 jours) n’est pas statistiquement différent entre les deux groupes (OR=0,0 [0,00-60,89]) signifiant que l’accouchement du siège n’est pas plus morbide que celui du sommet si la sélection de candidates est bien faite.
Un accouchement en présentation du siège, bien surveillé et bien conduit, peut rester un accouchement eutocique; il n’est cependant pas aussi favorable que l’accouchement en présentation du sommet.
D’où, le maintien de l’apprentissage des manœuvres d’extraction du siège par VB et l’application de protocoles déterminés en fonction des conditions techniques et humaines disponibles dans la maternité s’avèrent très important et très capital dans le management de l’accouchement en présentation du siège pour aboutir à des bons résultats néonataux.
4.2.3. Issue néonatale
L’étude révèle que la parturition sur présentation du siège est greffée d’un taux élevé de décès néonatals précoces (6,5%) comparativement à celle sur présentation de sommet (0%). Cette mortalité néonatale est nulle dans le groupe II alors qu’elle représente 2 cas sur 31 chez les nouveau-nés du groupe I (p=0,0554).
Ce taux est proche à celui rapporté par BUAMBO-BAMANGA [23] qui a trouvé 7,8% mais inférieur à celui rapporté par RAJAONARY [24] qui a trouvé 9,86%. En Europe, beaucoup d’auteurs ont rapporté des taux inférieurs à 1% : BROCHE [31] rapporte 0,9% ; en 1997, LINDQVIST [39] analyse 6542 accouchements par le siège du registre Suédois des naissances et trouve une mortalité de 0,09% pour les accouchements du siège par VB, et au cours de cette même année, l’équipe norvégienne d’ALBRECHSTEN [40], dans une série prospective de 1212 sièges, ne rapporte aucun décès néonatal.
En ce qui concerne les deux décès enregistrés dans notre série chez les nouveau-nés du groupe I, il faut signaler qu’ils ne sont pas directement liés à la présentation : le premier était dû à un syndrome polymalformatif et le second à un syndrome de détresse néonatal dont la cause exacte n’avait pas été décelée (tous deux décédés au 3ème jour post-natal). Le risque de mal présentation est plus élevé chez les fœtus malformés, ceci pouvant alourdir le pronostic périnatal [1,4].