La loi du 20 juillet 1973 répondait (…) au souci de voir le conseil législatif national “ terminer l’élaboration de la loi en fixant les modalités du régime foncier et minier ” et a été élaboré aussi conformément aux options fixées (par le bureau politique du MPR) et dont l’impact est tel qu’il a paru opportun de mettre d’ores et déjà les dispositions du Code Civil livre II en harmonie avec les options définies par les instances supérieures du Parti. Par ailleurs, le droit de propriété dans son acception générale a été maintenu. Bien qu’il y ait lieu de considérer que son champ d’application ait été réduit(56).
Selon les prescrits de l’article 6 de la loi du 20 juillet 1973, “ le sol et le sous-sol sont immeubles par nature ”, lesquels font partie soit du domaine public ou soit du domaine privé de l’Etat. Par voie de conséquence, les immeubles par nature, notamment le sol, appartiennent soit au domaine public, soit au domaine privé de l’Etat. Le droit de propriété de l’Etat congolais sur son sol du domaine public lui donne droit à tout ce qu’il produit et s’étend à tout ce qui s’y unit et s’y incorpore soit naturellement, soit artificiellement (sans préjudice aux droits résultant des autorisations de voiries et des permis de stationnement).
De même, le droit de propriété de l’Etat congolais sur le sol du domaine privé lui donne aussi droit à tout ce qu’il produit et s’étend à tout ce qui s’y unit et s’y incorpore soit naturellement, soit artificiellement qu’il n’est pas régulièrement concédé.
En matière foncière, l’appropriation privative du sol a été abolie, le sol étant devenu propriété inaliénable de l’Etat. (Dérogation à l’article 34 de la const.) Et le droit de propriété tel qu’ il est défini ne peut plus porter que sur les immeubles par nature. Les autres droits réels ne peuvent plus s’analyser comme des démembrements de la propriété mais des droits ayant leur existence propre sans référence au droit de propriété dont ils étaient des simples accessoires.
Cette option ci-haut évoquée a exigée la suppression de l’article 16 du décret de 1912 qui posait en présomption légale le rapport du principal à l’accessoire entre le sol et les biens incorporés. Cette présomption qui n’était plus que relative après le décret du 28 mars 1949 qui admettait la propriété des immeubles envisagée séparément du sol, doit disparaître dans les nouveaux textes.
Néanmoins, le principe de l’accession relative reste maintenu dans l’article 21, étant entendu que le terme “ immobilier ” ne concerne que les immeubles par destination à l’exclusion des immeubles par nature ; tant il est vrai que dans la deuxième partie de la loi, il est fait une distinction entre les droits immobiliers qui sont ceux qui portent sur des immeubles autres que les immeubles par nature. Si les règles posées dans le régime immobilier sont sommaires et concernent uniquement les droits immobiliers de l’Etat, c’est pour assurer à la gestion de ces droits, la souplesse nécessaire qu’exige la mutation rapide de la valeur de ces droits essentiellement économique.
Toutefois, les droits immobiliers des particuliers sont entre autre régis par les règles posées dans le régime général des biens. Comme la propriété du sol emporte celle du dessous et du dessus, dans toute la profondeur et la hauteur utiles à son exercice, l’Etat peut aussi s’opposer à ce que sa propriété soit surplombée et a le droit de se faire justice lui-même en démolissant ou en coupant tout ce qui empiète sur son domaine. Il peut aussi faire des fouilles et les fruits lui reviennent.
Mais, le sous-sol (mines auxquels sont assimilés les gisements de pétrole) font l’objet d’un régime spécial distinct de celui du droit foncier et immobilier.
La construction du dogme selon lequel, l’Etat est à même de bien gérer en bon père de famille les espaces et les ressources pour l’intérêt de tous(57) se traduit par l’article 53 de la loi du 20 juillet 1973 qui s’apparente ainsi étroitement au principe de la souveraineté permanente.
Plutôt que de libéraliser ou de privatiser le sol pour que les producteurs puissent investir, l’essentiel est qu’ils disposent des droits reconnus et stables. Cette sécurisation pouvant passer par des multiples formes notamment les concessions foncières qui sont les seuls droits fonciers reconnus aux particuliers dans notre pays. Une politique de privatisation, à la manière de l’article 34, n’a de chance de réussir que dans les contextes spécifiques où l’individualisation des droits a déjà atteint un degré important. D’où la nécessité d’une intervention (volontariste) de l’Etat qui doit construire un cadre juridique et administratif qui lui convient.
56 Préambule de la loi du 20 juillet 1973.
57 Gaston KALAMBAY, op. cit., pp. 40 et 58.