Institut numerique

I/ L’utilisation de barèmes de capitalisation

Devant respecter le principe indemnitaire (I), le calcul du capital réparant le préjudice
économique futur est effectué sur la base d’un barème de capitalisation dont le choix est
important pour la victime (II).

A) L’application du principe indemnitaire

Le principe indemnitaire implique une indemnisation intégrale de la victime mais sans
enrichissement. Cela signifie qu’au terme de la vie de la victime, le capital et ses intérêts
doivent avoir compensé la perte de revenus.

Trois conditions devraient être réunies pour respecter le principe de la réparation intégrale : le
coût constant de l’annuité, la permanence du taux d’intérêt et la durée de vie correspondant
aux données statistiques(136). Toutefois, la Cour de cassation refuse tout abattement par le juge
au montant du capital alloué sous prétexte que la victime pourrait placer cette somme à un
taux d’intérêt supérieur au taux utilisé(137).

B) Le choix du barème de capitalisation

Le recours à un barème de capitalisation est nécessaire pour convertir en capital le
montant annuel du préjudice. Les tables de capitalisation sont établies à partir d’une table de
mortalité, qui récapitule les chances de survie de la population à un instant donné, et du taux
d’intérêt des placements. Elles permettent de donner la valeur de « l’euro de rente » défini
comme la somme nécessaire à un organisme de capitalisation pour obtenir une rente annuelle
de 1 euro(138).

Le choix du barème de capitalisation est essentiel pour la victime. En effet, comme le
souligne le rapport Lambert-Faivre, plus le taux d’intérêt retenu est élevé, plus le capital sera
faible, et plus l’espérance de vie est élevée, plus le capital sera élevé(139).

Aucun barème de capitalisation n’ayant été rendu obligatoire, la Cour de cassation laisse aux
juges du fond le libre choix. L’usage a voulu que le barème utilisé en droit commun par les
juges et les assureurs régleurs pendant plus de vingt ans soit le barème retenu en matière
d’accidents de la circulation et annexé au Décret du 8 août 1986 pris en application de la Loi
Badinter du 5 juillet 1985(140). Celui-ci est rapidement devenu obsolète et très défavorable aux
victimes puisqu’il repose sur une table de mortalité de 1960-1964 et un taux d’intérêt de
6,5%, deux paramètres qui sont structurellement évolutifs. Ainsi, d’après les comparaisons
effectuées par le rapport Lambert-Faivre, le taux d’intérêt légal était de 6,50% en 1986 et de
3,29% en 2003, l’espérance de vie des hommes était de 67,0 années en 1986 et de 75,6 en
2002, l’espérance de vie des femmes était de 73,6 en 1986 et 82,9 en 2002.

En 2004, la Gazette du Palais a pris l’initiative de publier un barème de capitalisation
actualisé fondé sur les tables de mortalité de 2001 et un taux d’intérêt de 3,20%(141). Largement
utilisé par les juridictions et plus favorable aux victimes, ce barème est ainsi annexé aux
recommandations de bonnes pratiques de la Cour d’appel de Lyon(142) et au référentiel indicatif
régional(143).

Toutefois, les paramètres du barème de 2004 sont déjà obsolètes, laissant subsister un déficit
dans la réparation des préjudices de la victime. Dans l’attente de l’établissement d’un barème
de capitalisation officiel et régulièrement actualisé, la Gazette du Palais a publié en mai 2011
un nouveau barème(144). Celui-ci repose sur les tables d’espérance de vie de 2008 et un taux
d’intérêt de 2,35 % correspondant à la moyenne de l’intérêt légal sur les cinq dernières
années.

136 Lamy Assurances 2011, n°2763.
137 Civ.2e, 20 décembre 1966.
138 Y. Lambert-Faivre, S. Porchy-Simon, Droit du dommage corporel, Systèmes d’indemnisation, op. cit., p. 213.
139 Rapport Lambert-Faivre, op. cit., p.34.
140 Décret n°86-973 du 8 août 1986 fixant les modalités de conversion en capital d’une rente consécutive à un
accident, JORF du 22 août 1986.
141 Préjudice : le barème de capitalisation actualisé, Gaz. Pal., 9 novembre 2004.
142 Recommandations de bonnes pratiques en matière de réparation des dommages corporels, op. cit., p.42.
143 Référentiel indicatif régional de l’indemnisation du dommage corporel, op. cit., p.34.
144 Barème de capitalisation 2011, Gaz. Pal., 5 mai 2011.

Retour au menu : L’INDEMNISATION DU PREJUDICE PROFESSIONNEL EN DROIT COMMUN DE LA RESPONSABILITE CIVILE