Si les textes prévoient des sanctions pénales en cas de non-conformité à la RT 2012 en ce qui concerne les obligations de résultats, rien n’est prévu en matière de responsabilité civile du constructeur lato sensu. En l’absence de régime de responsabilité spécifique au défaut de performance énergétique il faut chercher à qualifier ce dernier parmi les régimes de responsabilité déjà existants.
A) La recherche d’un régime de responsabilité adapté au défaut de performance énergétique
1) Les régimes de responsabilité déjà existant en droit de la construction
a) La garantie de bon fonctionnement
Cette garantie prévue à l’article 1792-3 du Code civil s’applique au défaut affectant un élément d’équipement qui est dissociable de l’ouvrage. Dans notre cas il faut donc envisager l’hypothèse d’un élément d’équipement dissociable de l’ouvrage qui entraine le défaut de performance énergétique. On peut prendre l’exemple d’un système de ventilation défectueux qui par son mauvais fonctionnement entraînerait le défaut de performance énergétique.
Dans cette hypothèse le maître d’ouvrage dispose d’une action biennale pour actionner le constructeur. Celui-ci devra alors réparer l’élément défectueux.
On peut envisager que le maître d’ouvrage s’estimant victime d’un défaut de performance énergétique puisse trouver une solution à travers la garantie de bon fonctionnement.
En pratique cette solution ne sera que très partielle et ceci pour deux raisons : la première est l’approche globale de la RT 2012, la performance doit être appréciée globalement, elle ne dépend pas seulement d’un élément d’équipement mais d’un tout, de l’ensemble des éléments composant l’ouvrage qu’ils soient dissociables ou non. Il sera donc difficile d’imputer le défaut de cette performance à un seul élément dissociable.
La seconde raison est le caractère subsidiaire de la garantie de bon fonctionnement. Celle-ci est écartée en cas d’application possible de la responsabilité décennale du constructeur, dans un souci de protection de l’acquéreur. Tout dépendra donc de la qualification que feront les juges du défaut de performance, si celui-ci relève de la responsabilité décennale, la garantie de bon fonctionnement se révèlera inutile.
b) La garantie de parfait achèvement
La garantie de parfait achèvement est définie par l’article 1792-6 du Code civil. Cette garantie prévoit que l’acquéreur dispose d’un délai d’un an à compter de la réception de l’ouvrage pour demander au constructeur la réparation de tout type de désordres.
Cette garantie a un champ d’application large en ce qui concerne la nature des désordres, elle s’applique en effet quelle que soit l’importance des désordres, leur nature juridique (portant sur un élément dissociable ou non) ainsi que le moment de leur survenance (elle peut ainsi aussi bien concerner des désordres ayant fait l’objet de réserves à la réception que ceux survenus dans l’année suivant cette dernière).
Elle peut donc d’un point de vue juridique s’appliquer au défaut de performance énergétique. En pratique toutefois une attestation de performance énergétique est désormais rendue obligatoire par la RT 2012 et ce avant la réception. Dès lors l’ouvrage ne répondant pas à la RT 2012 ne fera vraisemblablement pas l’objet d’une réception par l’acquéreur ou bien d’une réception accompagnée de réserves. Toutefois comme cela a été relevé précédemment la fiabilité de cette attestation est contestable et ne devrait pas faire échec à une garantie de parfait achèvement.
Dès lors, si au moment de la réception des réserves portent sur la performance énergétique des bâtiments, la mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement pour la levée des réserves est tout à fait envisageable, elle constitue même la procédure normale.
Cette garantie peut donc être utile pour les désordres entraînant un défaut de performance énergétique dans l’année suivant la réception. Cette utilité étant à relativiser car le défaut de performance énergétique se révèlera bien souvent à l’usage, dans la durée, et rarement au cours de la première année d’utilisation du bien.
2) Le régime de responsabilité contractuelle de droit commun
a) Rappel de la distinction entre obligation de résultat et obligation de moyen
Il existe en droit commun de la responsabilité contractuelle deux régimes de responsabilités selon que l’obligation visée est une obligation de résultat ou de moyen.
Comme il a été vu précédemment la RT 2012 énonce ces deux types d’obligations, certaines obligations étant de moyen et d’autres de résultat.
Cependant certains juristes dont Madame Durand-Pasquier ou encore le Professeur Pascal Dessuet remettent en cause le choix de ces termes par le législateur. La critique porte sur le fait que ces deux termes seraient utilisés au sens général, celui de la langue courante et non au sens juridique. La conséquence de cette critique est que, si ces deux termes ne font pas références à leurs respectives notions juridiques, les obligations énoncées par la RT 2012 ne seraient que de simples obligations de moyens ce qui compliquerait la tâche du maître d’ouvrage en matière de preuve.
Avant de rentrer plus en détail dans le débat rappelons simplement qu’une obligation de résultat implique par celui qui doit s’en acquitter l’atteinte d’un résultat prédéterminé dans l’esprit des deux parties. La non-atteinte de ce résultat entraîne la responsabilité de plein droit du débiteur de l’obligation, la preuve du créancier de l’obligation est donc limitée à la réalité de la non-atteinte du résultat. En revanche une obligation de moyen implique de la part du créancier de l’obligation que son débiteur a commis une faute qui lui a causé un préjudice. Le régime de la preuve est donc beaucoup plus exigent dans cette seconde hypothèse.
b) De l’importance des mots en droit
Le premier terme à poser problème est celui de ‘consommation conventionnelle’ utilisée par la RT 2012. Ce terme laisse penser pour les juristes que les seuils de consommation seraient fixés conventionnellement par les parties. En réalité comme le rappelle le professeur Pascal Dessuet(2) le terme ‘conventionnelle’ doit s’entendre comme un simple référentiel aux normes édictées par la RT 2012. Il ne révèle donc pas l’engagement, pris conventionnellement par le constructeur, d’un seuil de consommation qui serait réelle, c’est-à-dire tenant compte de l’utilisation du bien par l’utilisateur.
Les deux autres termes qui posent problèmes sont ceux que nous venons d’évoquer précédemment à savoir ceux ‘d’obligations de résultat’ et ‘d’obligation de moyen’. Madame Durand Pasquier(3) met en garde contre une appréciation de facto juridique de ces deux termes et préfère y substituer une approche technique qui expliquerait ces terminologies choisies par le législateur.
Philosophe le Professeur Périnet-Marquet rappelle : « Moïse n’est pas derrière chaque texte et celui-ci n’est pas gravé dans le marbre. L’exégète, le praticien, sait bien qu’à côté de la lettre, l’esprit tient une bonne place. »(4)
Il faut donc voir plus loin que les termes employés et s’interroger sur le sens véritable qu’a voulu leur donner le législateur. Ce travail sera in fine celui du juge.
B) Une possible mise en jeu de la responsabilité décennale (art. 1792 et suivants)
1) Rappel des conditions de mise en jeu de la responsabilité décennale
a) La notion de constructeur
Selon l’article 1792-1 est réputé constructeur de l’ouvrage tout architecte, entrepreneur, technicien, ou autre personne liée au maître d’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage.
Toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire.
Toute personne qui agit en qualité de mandataire du maître d’ouvrage.
Sont également des constructeurs : le fabricant d’EPERS au sens de l’article 1792-4 du code civil, le vendeur d’immeuble à construire (art. 1646-1 du Code civil), le promoteur au sens du contrat de promotion immobilière de l’article 1831-1 du Code civil, le constructeur de maisons individuelles (loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990, le contrôleur technique dans les limites de sa mission (L. 111-24, al. 1°).
Ne sont pas des constructeurs au sens de 1792-1 du code civil les sous-traitants, les techniciens SPS, et les fabricants (sauf EPERS).
Cette notion est donc large et susceptible d’englober les principaux intervenants au chantier de l’ouvrage.
b) La notion d’ouvrage
Depuis la loi Spinetta de 1978 mettant en place le régime de responsabilité décennale du constructeur la notion d’ouvrage a évolué aussi bien sous l’impulsion du législateur que sous l’impulsion de la jurisprudence (nous nous pencherons en détail sur l’évolution de la jurisprudence dans le 3)).
Aujourd’hui l’ordonnance du 08 Juin 2005 qui fait suite au rapport dit Perinet-Marquet a remplacé la notion de bâtiment par celle d’ouvrage et cette dernière a été un peu clarifiée.
Premièrement la notion ancienne de bâtiment n’était pas définie légalement dans la loi Spinetta de 1978. Elle ne l’est toujours pas en réalité mais en se basant sur les décisions de la jurisprudence et sur l’ordonnance de 2005 on peut désormais déterminer ce qui constitue ou non un ouvrage.
On pourrait dans un premier temps définir un ouvrage comme toute construction immobilière. Le député Spinetta entendait ainsi par le terme d’ouvrage quatre murs et un toit. Mais le législateur a étendu cette notion, ainsi l’ouvrage peut également être un élément d’équipement qui est indissociable de l’ouvrage et nécessaire à son fonctionnement.
De plus en ce qui concerne la nature de l’ouvrage, rappelons que désormais l’article L 243-1-1 alinéa 1 exclut certains types d’ouvrages de l’obligation d’assurance : sont ainsi visés les ouvrages maritimes, lacustres, fluviaux portuaires, les infrastructures routières, aéroportuaires, ou encore les ouvrages de traitement de résidus des déchets, etc.
Toutefois le même article dans son alinéa 2 énonce une autre liste d’ouvrages qui peuvent faire l’objet d’une garantie de responsabilité décennale s’ils sont l’accessoire d’un ouvrage soumis à l’obligation d’assurance. Cela concerne notamment : les voiries, les ouvrages piétonniers, les parcs de stationnement, les voiries et réseaux divers, les ouvrages sportifs non couverts, les ouvrages de transport, etc.
La jurisprudence a également donné plusieurs critères permettant de déterminer ce qui relève ou non de l’ouvrage.
Ainsi on peut relever trois critères principaux utilisés par la jurisprudence.
1- Un ouvrage est la construction d’un ensemble comprenant une structure un clos et un couvert.
2- Il doit également y avoir une immobilisation des travaux réalisés.
3- Une certaine importance des travaux réalisés.
Toutefois la jurisprudence étend également la notion d’ouvrage aux travaux constitutifs de fractions d’ouvrages comme des travaux de viabilité et d’ossature. Elle admet également que des travaux sur existant puissent constituer un ouvrage si ces travaux sont d’une certaine importance et entraîne une modification des éléments constitutifs de l’ouvrage existant. Elle a ainsi admis dans un arrêt du 13 avril 2010 (3ème chambre civile) que la construction de planchers et de cloisons intérieures à un ouvrage existant constituait un ouvrage au sens de la loi de 1978.
Nous laissons ici de côté volontairement la notion d’EPERS et son éventuelle qualification d’ouvrage pour nous concentrer sur le bâtiment, plus directement concerné par la RT 2012.
Maintenant qu’ont été déterminées les notions de constructeur et d’ouvrage dans le cadre de la responsabilité décennale il reste à déterminé celle de dommage avant d’envisager les cas d’application de la responsabilité décennale au défaut de performance énergétique.
c) La notion de dommage
La notion de dommage est, elle, définie par l’article 1792 du Code civil. Celui-ci énonce : « Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement le rendant impropre à sa destination ».
Il existe donc trois types de dommages susceptibles d’emporter la responsabilité décennale du constructeur.
Tout d’abord les dommages entraînant une atteinte à la solidité de l’ouvrage, ensuite les dommages rendant l’ouvrage impropre à sa destination, enfin les dommages aux biens d’équipement rendant l’ouvrage impropre à sa destination.
A cette définition légale, la jurisprudence a donné des précisions et créé ainsi de nouveaux critères. Concernant la solidité de l’ouvrage elle a par exemple précisé que l’atteinte à la solidité n’impliquait pas nécessairement que l’ensemble de l’ouvrage soit atteint. (CA Aix en Provence 25 janvier 2006 à propos d’un revêtement de terrasse déficient).
En ce qui concerne l’impropriété à destination en l’absence de définition légale de la notion les juges du fonds disposent d’un pouvoir d’appréciation souverain. Ce qui fait que la notion a beaucoup évoluée comme nous le verrons plus précisément dans le 3).
Pour finir en ce qui concerne la notion d’indissociabilité, la seule exigence est que l’élément d’équipement soit effectivement indissociable de l’ouvrage, c’est-à-dire véritable incorporé à l’ouvrage. A titre d’exemple on peut citer la décision de la Cour d’Appel de Paris du 7 novembre 2007 dans laquelle des châssis posés dans des pré-cadres insérés dans le bâti ne pouvant être retirés sans prélèvement de matière de l’ouvrage ont été logiquement qualifiés d’éléments indissociables à l’ouvrage.
Après avoir vu les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité décennale et de la garantie obligatoire qui lui est attachée on peut chercher à déterminer dans quels cas celle-ci pourrait s’appliquer au défaut de performance énergétique.
2) Les cas envisageables d’application de la responsabilité décennale au défaut de performance énergétique
a) Le rôle ambigu de l’attestation
Si les notions de constructeur et d’ouvrage ne varient pas en matière de défaut de performance énergétique il n’en est évidemment pas de même pour celle de dommage. Toute la difficulté réside en effet dans la qualification du défaut de performance énergétique en tant que dommage à l’ouvrage.
Premièrement l’attestation après travaux pourrait jouer un rôle dans la qualification du régime de responsabilité.
En effet si ce contrôle révèle que l’ouvrage n’est pas aux normes alors le maître de l’ouvrage devrait logiquement en refuser la réception. Le refus de la réception obligera le constructeur à réparer et améliorer la construction.
La garantie décennale ne pourrait donc être mise en oeuvre que si le défaut de performance énergétique n’a pas été révélé au moment de l’attestation après travaux et que l’ouvrage a fait l’objet d’une réception par le maître d’ouvrage.
Le défaut de performance énergétique serait donc découvert plus tard par le maître d’ouvrage pendant l’utilisation du bien. Cela implique que l’ouvrage se soit dégradé avec le temps et qu’il ne réponde désormais plus aux normes de la RT 2012. L’attestation pourrait donc jouer ce rôle de filtre : la responsabilité décennale du constructeur ne serait cantonnée qu’aux bâtiments ayant répondu aux normes mais n’y répondant plus du fait d’une dégradation.
Toutefois comme nous l’avons vu précédemment l’attestation après travaux mise en place par le législateur semble peu fiable. On peut donc douter de l’exactitude de cette attestation et de son rôle de filtre dans ces circonstances. Si l’attestation se révèle peu fiable cela signifie que le bâtiment pourrait ne pas répondre aux normes dès le début alors même que l’attestation le donne conforme et que la réception en a été faite.
En réalité l’attestation après travaux pourrait même favoriser la qualification en responsabilité décennale comme l’a suggéré Pascal Dessuet dans sa « Cartographie des risques juridiques liés au BBC et de leur couverture assurance »(5).
En effet, comme nous le verrons par la suite, la jurisprudence affirme que : « les désordres d’isolation phonique peuvent relever de la garantie décennale même lorsque les exigences minimales légales ou réglementaire ont été respectées ; »(6).
En l’espèce les attestations étaient conformes ce qui n’a pas empêché le juge de considérer qu’il y avait potentiellement atteinte à la destination de l’ouvrage. Renvoyant la décision finale aux juges du fond.
Pour Pascal Dessuet ce comportement de la jurisprudence risque d’être favorisé en matière de normes énergétiques par la faible fiabilité de l’attestation après travaux. Le juge aura tôt fait de considérer que l’attestation après travaux réalisé par le même maître d’oeuvre n’offre pas une garantie suffisante de la conformité du bâtiment et sera donc tenté d’estimer qu’elle ne constitue pas une barrière suffisante à la qualification de responsabilité décennale.
b) Le défaut de performance énergétique, quel type de dommage ?
Dès lors il faut s’interroger sur la forme du dommage que peut revêtir un défaut de performance énergétique.
Le défaut de performance énergétique peut prendre plusieurs formes.
Stricto sensu il indique seulement que le bâtiment consomme plus que ce qu’il devrait. Cela a donc une conséquence économique pour l’utilisateur du bien, celui-ci a souvent payé plus cher son bien pour ensuite espérer une consommation d’énergie plus faible et ainsi réaliser des économies sur du long terme. Une consommation supérieure aux attentes constitue donc pour lui un désagréable surcoût qui prend la forme d’un dommage immatériel.
Lato sensu le défaut de performance énergétique peut consister en un bâtiment dont les températures, trop froides ou trop chaudes, ne permettent pas une utilisation normale du bien par ses habitants. Il y a donc juridiquement une atteinte à la jouissance du bien par l’utilisateur ce qui constitue un dommage immatériel. Toutefois ce dommage, aussi immatériel soit-il, résulte d’un dommage qui, lui, est bien matériel : isolant défectueux, pompe à chaleur inefficace. Cette distinction est essentielle pour la suite car si le dommage matériel est obligatoirement garanti par l’assurance responsabilité décennale il n’en va pas de même pour le dommage immatériel qui lui fait l’objet de garanties facultatives.
Dès lors le défaut de performance énergétique peut-il constituer une atteinte à la solidité de l’ouvrage ? Non, le défaut de performance énergétique est un dommage de nature immatérielle non susceptible d’entraîner, à lui seul, une atteinte à la solidité de l’ouvrage. Toutefois une atteinte à la solidité de l’ouvrage peut bien sûr avoir pour conséquence un défaut de performance énergétique mais ce dernier ne sera alors que secondaire.
Qu’en est-il de l’impropriété à destination ? Cette notion a beaucoup évolué et ceci pour deux raisons.
Tout d’abord elle n’est pas définie légalement et la Cour de Cassation laisse son appréciation aux juges du fond qui sont donc souverains pour déterminer son contenu. Ensuite cette notion est large par essence, en effet quelle est la destination d’un ouvrage. Pour répondre à cette question, il faut prendre en compte la volonté des parties au contrat de louage d’ouvrage. Il faut donc rechercher ce que le maître d’ouvrage ou l’acquéreur de l’ouvrage est légitimement en droit d’attendre du bâtiment.
La jurisprudence a donc élargi la notion progressivement en tenant compte de ce que tout habitant, et donc la société en son ensemble, attend de sa future construction.
Il faut donc regarder cette évolution jurisprudentielle et essayer d’y trouver les prémices d’une réponse à la question de la qualification du défaut de performance énergétique comme dommage entraînant une impropriété à destination.
3) Le regard de la jurisprudence
a) Retour sur la double cause de l’impropriété à destination
La jurisprudence a joué un rôle très important dans l’évolution de la responsabilité décennale du constructeur et en particulier concernant la notion d’impropriété à destination. Comme cela a été souligné précédemment cette notion reflète les attentes d’une époque, d’une société envers ses bâtiments.
La notion d’impropriété à destination a une base double si on se penche sur la jurisprudence.
Elle peut en effet être l’attente légitime du maître d’ouvrage pour le bien commandé, elle relève alors d’un non-respect des normes communément admises.
Elle peut également découler de spécifications particulières passées entre le maître d’ouvrage et le constructeur. Cela concerne les bâtiments qui doivent avoir des caractéristiques spéciales compte tenu de l’utilisation qui va par la suite en être faite.
Le défaut de performance énergétique d’un bâtiment disposant du label BBC (Bâtiment Basse Consommation) peut être considéré comme relevant de la seconde origine de la notion d’impropriété à destination. En effet, le label BBC va être utilisé comme un argument de vente et sera un élément spécifique, une attente spécifique et contractualisée pour le maître d’ouvrage.
En revanche avec la RT 2012, la consommation du bâtiment va désormais devenir une norme légale et risque de devenir progressivement une attente commune à tous les maîtres d’ouvrages concernés.
Le défaut de performance s’inscrirait alors dans le cadre d’une impropriété à destination relevant de la première catégorie.
Bien que ces deux fondements n’entrainent pas de différence de régime, leur présentation est nécessaire pour comprendre les enjeux du passage de la consommation énergétique comme élément contractuel à une norme légale.
Elle permet aussi de mieux comprendre l’approche de cette notion par la jurisprudence.
b) L’appréciation de la notion par la jurisprudence
1- L’attente du consommateur
Cette hypothèse qui concerne le second fondement de l’impropriété à destination, défini plus haut, est plus à même de s’appliquer aux cas où le constructeur avait promis une consommation réelle fixée par le contrat de louage d‘ouvrage ou les cas où il avait promis une consommation « conventionnelle » inférieure aux normes exigées par la RT 2012.
Toutefois elle est susceptible de s’appliquer également au bâtiment ne respectant pas la RT 2012 dans la mesure où le maître d’ouvrage reste dans l’attente d’une performance particulière en construisant ce bâtiment.
Ainsi la responsabilité des constructeurs a été retenue dans une hypothèse où la consommation énergétique d’un équipement de production d’eau chaude sanitaire était supérieure à la consommation attendue (Cass.Civ.3ème, 27 septembre 2000 : n°98-11.986)
Dans cette espèce, la déficience de l’équipement litigieux, équipé de capteurs solaires a conduit à l’installation d’un second système de chauffage indépendant au gaz. Finalement, le degré d’eau chaude voulu était atteint, mais grâce au système de chauffage au gaz.
L’assureur du promoteur soutenait que l’immeuble n’était pas rendu impropre à sa destination puisque le second système fonctionnait : le seul préjudice était en conséquence l’absence d’économie d’énergie.
La Cour de cassation a retenu que « l’immeuble était rendu impropre à sa destination par le non fonctionnement de l’élément d’équipement constitué par les capteurs solaires, compte tenu des risques de surchauffe de l’eau chaude sanitaire collective, et parce que les objectifs d’économies d’énergie, consécutifs à la fourniture d’énergie mixte, promis aux utilisateurs par le promoteur, qui s’était prévalu de la qualification « Solaire trois étoiles », n’étaient pas atteints, même si la fourniture d’eau chaude à température désirée pouvait être assurée par l’installation individuelle de chauffage au gaz ».
Ici on le voit bien, le promoteur avait promis un résultat précis en termes de consommation d’énergie à l’utilisateur. La Cour de cassation sanctionne donc le non-respect de cette promesse contractuelle en engageant la responsabilité décennale du promoteur. On aurait pu penser que, cette obligation de résultat étant contractuelle, c’est la responsabilité contractuelle du promoteur qui aurait été engagée. En prenant cette position la Cour de cassation se montre intraitable avec le promoteur en engageant sa responsabilité décennale dont il est pour lui beaucoup plus difficile de s’exonérer.
2- Le caractère légal de l’obligation
Si la Cour de Cassation, comme nous l’avons vu précédemment, ne s’interdit pas une éventuelle mise en jeu de la responsabilité décennale pour impropriété à destination malgré le respect d’une norme légale (arrêts sur les normes phoniques : Assemblée plénière 27 octobre 2006 et 3ème civ. 21 septembre 2011), celle-ci garde toutefois une importance et sa violation risque de favoriser une qualification pour impropriété à destination.
En effet si le respect des normes phoniques n’interdit pas une impropriété à destination, en revanche le non-respect des normes phoniques n’a jamais été jugé compatible avec le respect de la destination.
Dans une décision du 7 Juin 2001 à propos de normes thermiques, la troisième Chambre Civile a en effet estimé que constitue une impropriété à destination l’atteinte à la destination objective normale, légale de l’ouvrage.
Comme le souligne le Professeur Hugues Périnet-Marquet : « les normes légales imposant des exigences précises en matières de performance énergétique entrent dans la notion de destination sans toutefois l’absorber totalement.(7) »
On peut également citer dans le même sens une décision de la Cour d’appel de Paris (26 septembre 2007, n°05/22490) confirmant un jugement du tribunal de grande instance de Paris, retenant que les désordres affectant l’isolation thermique d’une copropriété relevaient de la garantie décennale. L’assureur du constructeur contestait la qualification de désordres rendant impropre l’immeuble à sa destination arguant que le seul préjudice était une surconsommation d’électricité, un dommage immatériel qu’il n’avait pas à couvrir. Toutefois, l’expert avait constaté des défauts matériels. La cour d’appel, constatant que 67 des 86 appartements présentaient des défauts d’isolation thermique et n’étaient pas conformes à la législation applicable à la matière.
Toutefois, aucune décision en l’état ne retient la responsabilité du constructeur en cas de non-conformité d’une construction à la règlementation thermique en l’absence de désordres matériels.
3- Une première tendance de séparation concernant le défaut de performance opérée par la jurisprudence
Deux arrêts récents, un de la Cour de cassation et un autre du Conseil d’Etat permettent de déceler une première distinction opérée par les juges de ces deux Cours régulatrices concernant le défaut de performance énergétique.
En ce qui concerne l’arrêt du Conseil d’Etat, le premier chronologiquement, il s’agit d’une décision rendue le 9 décembre 2011.
En l’espèce un bâtiment scolaire avait été construit mais il ne répondait pas aux prévisions faites par le maître d’ouvrage en matière de consommation énergétique réelle, de plus, de grands écarts de température avaient été constatés entre les classes, ce qui rendait l’utilisation de certaines salles impossible.
Le maître d’ouvrage cherchait donc à engager la responsabilité décennale du constructeur sur la base de deux fondements, le premier pour la surconsommation d’énergie constatée, le second pour l’impossibilité de jouir correctement du bien, certaines salles étant inutilisables.
Le Conseil d’Etat répond donc par deux considérants : « Considérant, en premier lieu, qu’en jugeant que la surconsommation énergétique ou le léger inconfort thermique résultant du nombre insuffisant de réseaux de chauffage étaient sans effet sur le respect de la température réglementaire, fixée à 19 degrés, et n’étaient en conséquence pas de nature à rendre l’immeuble, dans son ensemble, impropre à sa destination, la cour administrative d’appel de Marseille, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, a porté sur les faits de l’espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;
Considérant toutefois, en second lieu, que pour juger que la surchauffe constatée dans les salles de classe de l’étage du bâtiment n’était pas de nature à rendre l’immeuble impropre à sa destination, la cour s’est fondée sur les circonstances que cette élévation anormale de température était limitée à certaines de ces salles et ne se produisait que l’été, lorsque les températures extérieures étaient très élevées ; qu’en subordonnant ainsi l’engagement de la responsabilité décennale des constructeurs au caractère général et permanent des désordres constatés, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé, en tant qu’il a rejeté les conclusions de la commune tendant à la mise en cause de la responsabilité décennale de M. A du fait de la surchauffe des salles de classe de l’étage ; »
Quelle interprétation faire de ces deux considérants ?
Tout d’abord dans le premier, le Conseil d’Etat refuse implicitement de reconnaitre qu’une surconsommation d’énergie puisse entraîner la mise en jeu de la responsabilité décennale du constructeur. En effet la surconsommation énergétique n’est pas qualifiée d’impropriété à destination.
Toutefois une limite semble être posée par l’évocation de la température réglementaire (19 degrés). Encore une fois les juges semblent prendre en considération le respect ou non du caractère règlementaire. A contrario on peut donc imaginer que l’absence de conformité à la norme règlementaire aurait entraîné la qualification d’impropriété à destination.
Néanmoins, le caractère réglementaire ne vise pas tant la surconsommation énergétique que l’inconfort thermique qui aurait résulté de la violation de la norme. Il semble donc bien y avoir une exclusion de la surconsommation énergétique comme cause possible de l’impropriété à destination.
En ce qui concerne le second considérant, le Conseil d’Etat casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel en estimant que le caractère épisodique et partielle de la surchauffe n’est pas un obstacle à la qualification d’impropriété à destination.
Tout d’abord, sur le fond le Conseil d’Etat reconnaît ici que la surchauffe rendant l’utilisation de certaines classes impossible pendant l’été est susceptible d’être qualifiée d’impropriété à destination et ainsi d’engager la responsabilité décennale du constructeur. Pour résumer, si la surconsommation d’énergie n’est pas en soi constitutive d’impropriété à destination, en revanche, l’impossibilité de jouir du bâtiment comme il se devrait l’est.
Un second point est un apport important dans ce considérant, l’inconfort découlant du défaut de performance énergétique n’a pas à être général et permanent.
Il en résulte donc que si un immeuble respecte les critères imposés par la RT 2012, cela n’exclut pas qu’un appartement de cet immeuble ne puisse pas être victime d’un défaut de performance énergétique susceptible d’être qualifié d’impropriété à destination. Voilà qui va à l’encontre de la philosophie de l’approche globale de la RT 2012 et qui risque de soulever bien des problèmes.
Si le Conseil d‘Etat est la plus haute juridiction dans le domaine administratif, la plupart des conflits en construction relèvent du droit privé et ainsi de la Cour de cassation, juridiction régulatrice dans ce domaine.
La troisième chambre civile de la Cour de cassation a également rendu un arrêt très intéressant en date du 10 janvier 2012. Le litige en l’espèce concernait une pompe à chaleur sous dimensionnée, indissociable de l’ouvrage, qui entraîné une surconsommation d’énergie et un confort thermique insuffisant de l’habitation.
La Cour de cassation souligne que la notion d’impropriété à destination ne peut s’appliquer pour le seul inconfort thermique ne touchant que certaines parties de l’habitation. Elle exclut également les défauts de performance attendus en termes d’économies d’énergie. Ces défauts ne relevant pas de la responsabilité décennale, c’est donc la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur qui est engagée.
Première différence avec le Conseil d’Etat, la Cour de cassation semble apprécier le confort thermique pour l’ensemble de l’ouvrage et non pour certaines parties seulement.
Elle ne dit rien pour autant de l’inconfort thermique qui toucherait l’ensemble du bâtiment, de même qu’elle n’évoque pas les conséquences d’une violation des normes.
Toutefois on peut relever qu’ici encore la surconsommation énergétique qui résulte du défaut de performance est exclue de l’impropriété à destination. Les juges civils semblent donc réticents à une prise en compte de la consommation réelle du bien comme pouvant être une source d’impropriété à destination en cas de surconsommation.
Quel bilan tirer de ces deux décisions ?
Tout d’abord les deux arrêts opèrent une distinction entre l’inconfort thermique, pouvant aller jusqu’à une altération de la jouissance du bien, et la surconsommation énergétique c’est-à-dire l’absence d’économies d’énergie.
Si le traitement de l’inconfort thermique semble pouvoir varier entre les deux juridictions, la surconsommation énergétique est, elle, exclue de la responsabilité décennale dans les deux cas.
La crainte de voir la consommation réelle devenir une source de responsabilité décennale n’est donc pas fondée d’autant qu’en ce qui concerne la RT 2012, la consommation effective de l’utilisateur n’est pas évaluée et ne constitue pas un critère à atteindre.
En revanche en ce qui concerne les contrats prévoyant spécifiquement cette garantie la jurisprudence est fluctuante et peut se baser sur le premier fondement de l’impropriété à destination comme nous l’avons vu précédemment.
C) Les conséquences d’une éventuelle application de la RC décennale au constructeur
1) Une responsabilité de plein droit
La responsabilité décennale est une responsabilité de plein droit, cela signifie donc que le maître d’ouvrage ou l’utilisateur n’aura qu’à prouver l’impropriété à destination du bien sans avoir à prouver la faute du constructeur ou un éventuel préjudice. Cette responsabilité de plein droit est justifiée par le fait que souvent le maître de l’ouvrage est un profane dans l’acte de construire et ne pourrait démontrer la faute du constructeur.
Cette responsabilité de plein droit fait toute l’efficacité de la responsabilité décennale mais également toute sa dangerosité pour le constructeur en matière de performance énergétique.
De plus, l’article 1792-5 du Code Civil précise que toute clause insérée dans le contrat de louage d’ouvrage et ayant pour but de limiter la responsabilité du constructeur envers le maître d’ouvrage est réputée non écrite. Le constructeur ne peut donc limiter le champ de sa responsabilité contractuellement.
Toutefois, la première difficulté sera de déterminer qui parmi les intervenants au chantier est responsable in fine.
2) La difficulté d’établir la responsabilité d’un intervenant
On l’a vu précédemment, la RT 2012 diffère des précédentes en ce qu’elle se traduit par une approche globale de la consommation énergétique et également de l’acte de construire.
Les artisans doivent plus que jamais travailler de concert sur le chantier et se constituer en lot. La difficulté de cette approche globale peut justement être de déterminer la source précise du défaut de performance énergétique.
Cette question sera essentielle étant donné que la détermination de la source du défaut entraînera celle de l’identité de l’artisan responsable du défaut.
On peut s’attendre donc à un joli jeu de renvoi de balle pour savoir qui sera in fine responsable du défaut de performance.
3) Des possibilités d’exonération réduites
L’article 1792 fondant le principe de responsabilité décennale du constructeur prévoit dans son second alinéa que : « une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère. »
Le terme de « cause étrangère » renferme 3 cas d’exonération : le cas de force majeure, l’intervention du maître d’ouvrage compétent, la mauvaise utilisation de l’ouvrage.
En ce qui concerne le premier cas qui est commun à l’ensemble du droit privé il est défini par l’article 1148 qui précise qu’il s’agit d’un événement imprévisible, irrésistible et extérieur à l’activité présumée responsable. On peut citer à titre d‘exemple un arrêt de la Cour d’Appel de Nancy retenant un cas de force majeure pour une tornade ayant dévasté l’ouvrage.
Le second cas concerne l’intervention du maître de l’ouvrage dans l’acte de construire. Plusieurs conditions sont nécessaires au constructeur pour s’exonérer. Tout d’abord le maître d’ouvrage doit être compétent, il doit donc disposer de compétences suffisantes pour que son intervention soit justifiée et ses décisions suivies par les constructeurs.
Il faut que l’immixtion soit caractérisée au niveau de la réalisation ou de la conception de l’ouvrage. La notion d’immixtion caractérisée implique donc que le maître d’ouvrage réalise matériellement par lui-même une partie de l’ouvrage ou, lorsqu’il s’agit de la conception, qu’il ait pris des décisions malgré des avis divergents par exemple.
Le dernier cas est celui de la mauvaise utilisation du bien. Si les deux premiers cas sont classiques et ne revêtent pas un intérêt particulier en matière de performance énergétique, ce dernier cas pourrait a priorise révéler utile.
La condition est que l’utilisateur de l’ouvrage n’ait pas respecté une règle d’utilisation du bien, ce qui a entrainé le dommage.
On imagine déjà que les constructeurs essaieront de s’exonérer du défaut de performance énergétique en avançant la mauvaise utilisation du bien par l’utilisateur.
En réalité cela ne sera pas nécessaire. En effet comme cela a été signalé précédemment, le respect des normes en termes de consommation énergétique est contrôlé en dehors de toute exploitation du bien et n’inclut donc pas l’utilisation des habitants de l’immeuble. Si le défaut de performance énergétique est révélé dans ces conditions, alors il sera inutile pour le constructeur d’avancer la mauvaise utilisation du bien par l’utilisateur comme cause d’exonération puisque cette utilisation n’est à l’origine pas prise en compte.
Toutefois si, à l’avenir, la jurisprudence ou le législateur venait à prendre en compte la consommation réelle du bien en incluant l’utilisation par l’utilisateur, alors ce dernier cas d’exonération deviendrait utile. Encore faudra-t-il que le constructeur ait précisé au moment de la livraison de l’ouvrage les conditions d’utilisation de celui-ci.
En effet pour arguer de cette cause d’exonération le constructeur doit avoir d’abord précisé les conditions d’utilisation de l’ouvrage avant de se prévaloir d’une quelconque mauvaise utilisation du bien par l’utilisateur.
4) Une couverture de ce risque par l’assurance
Le risque important que court le constructeur de voir sa responsabilité décennale engagée est heureusement transféré par le biais d’une assurance obligatoire. Une obligation d’assurance pèse donc sur la responsabilité décennale du constructeur.
Il y a en effet une obligation de s’assurer pour le constructeur pouvant engager sa responsabilité décennale et une obligation d’assurer de la part de l’assureur. Cette obligation d’assurer est contrôlée par le Bureau Central de Tarification (BCT). Ce dernier peut être saisi par un constructeur qui voulant s’assurer se retrouve face à un refus, de la part des assureurs, de le couvrir.
Le BCT peut alors, en tenant compte des circonstances et de la sinistralité du constructeur, fixer un montant de primes auquel les deux parties devront se soumettre. En cas de refus de l’assureur le BCT peut retirer à celui-ci son agrément dans la branche concernée. Cette énorme sanction permet qu’en pratique aucun assureur ne refuse le prix fixé par le BCT.
Le problème avec le défaut de performance énergétique est que les assureurs n’ont aucune visibilité sur la sinistralité future que celui-ci pourrait entraîner. Ils craignent, sans doute à raison, que si le défaut de performance énergétique se retrouve qualifié d’impropriété à destination, engageant ainsi la responsabilité décennale du constructeur, le nombre de sinistres explose.
De plus, comme on l’a vu précédemment, le constructeur ne peut réduire conventionnellement sa responsabilité décennale, et la couverture de la garantie responsabilité décennale épouse bien sûr tous les contours de cette responsabilité. Si les juges décident donc que le défaut de performance énergétique est un dommage qui engage la responsabilité décennale du constructeur, les assureurs ne pourront se réfugier derrière une exclusion de ce défaut dans la garantie de responsabilité décennale et seront dans l’obligation d’indemniser la victime.
Ceux-ci cherchent, pour le moment, à créer des garanties, complémentaires à la responsabilité décennale et couvrant le défaut de performance énergétique de façon plus ou moins étendue, en attendant de voir l’évolution de la jurisprudence.
Dans cette incertitude les assureurs restent donc prudents, les mauvaises langues diraient frileux, face à un défaut de performance énergétique dont la qualification incertaine rend la couverture difficile.
2 « Une cartographie des risques juridiques liés au BBC et de leur couverture assurance »
3 « La performance énergétique des bâtiments » SJNI n°8, 26 Février 2010, 1113
4 « Le poids des mots » Construction-Urbanisme n°1 Repère 1, Janvier 2011
5 Performance énergétique et Garantie Octobre 2011
6 Assemblée plénière 27 octobre 2006
7 Droit et Patrimoine n°193 Juin 2010