L’une des conditions essentielles à une efficacité optimale de la privatisation est son inscription au sein d’un ensemble de réformes aussi bien économiques qu’institutionnelles.
Sur le plan économique, la privatisation peut être sans effets significatifs si elle ne s’accompagne pas de mesures de libéralisation et de mise en place de marchés concurrentiels (Savas, 2002). Cette allégation trouve son fondement dans la théorie des marchés contestables (TMC), formulée pour la première fois par Baumol, Panzar et Willig (1986) dans un ouvrage intitulé : Contestable Markets and the Theory of Industrial Structure apparu aux Etats-Unis dans un contexte de renforcement du libéralisme économique et du déclin de l’Etat providence, théorie qui postule que, la concurrence, lorsqu’elle n’est pas confrontée à des contraintes de barrières à l’entrée et à la sortie, garantit une rentabilité optimale des entreprises présentes sur le marché, même si ces dernières sont peu nombreuses, offre le même produit ou sont en situation de monopole. Les auteurs définissent un marché contestable comme étant un marché dans lequel toute entreprise nouvelle peut à tout moment venir s’installer. Selon la TMC, afin de rendre les performances des entreprises privatisées plus optimales, il serait judicieux que l’Etat favorise la concurrence (10).
Cette concurrence ferait en sorte que les entreprises privatisées qui sont en place puissent être contestées par des concurrents potentiels disposés à les supplanter (meilleur produit ou service au coût le moins élevé possible, innovation etc.) évitant ainsi une substitution du monopole public par le monopole privé avec le risque d’une persistance des mêmes tares que la privatisation vise à éradiquer.
En effet, cette théorie postule que lorsque les concurrents potentiels d’une entreprise s’aperçoivent que les coûts de production de cette dernière sont supérieurs au coût minimal du marché, ceux-ci entreront spontanément sur le marché et élimineront l’entreprise en question en produisant de façon plus efficiente. Ainsi, la TMC (pour qui l’Etat doit faire place aux entreprises privées justifiant ainsi la privatisation des entreprises publiques et parapubliques) s’intéresse de façon spécifique à la situation du secteur public et insiste sur le rôle de l’Etat dans l’assainissement de l’environnement économique.
Il ne s’agit donc plus pour l’Etat d’imposer des contraintes coercitives d’ordre réglementaire au secteur privé mais de créer plutôt des conditions idoines au développement de ce secteur et à sa capacité à pouvoir concurrencer le secteur public dans l’offre et la production des biens et services aux citoyens. La TMC critique ainsi les pratiques du secteur public qu’elle considère moins efficientes pour les firmes de ce secteur que celles des firmes du secteur privé, soumises à la menace des concurrents. Par ailleurs, il convient de noter que dans les situations de monopoles publics, l’ouverture des marchés n’étant pas toujours garantie à cause des coûts fixes qui sont très élevés, la privatisation devrait s’accompagner de règlementation de ces entreprises en situation de monopole (Carlton et Perloff, 1998) pour éviter justement que le bien-être des populations ne soit trop entamé.
Sur le plan institutionnel, l’on augmente sensiblement les chances de succès de la privatisation dès lors que des améliorations sont initiées sur les pratiques judiciaire et juridique d’un pays, sur le degré de corruption du système et le niveau de risque encouru par les investisseurs dans le pays (Guislain, 1995). Ce risque en particulier est d’autant plus réduit qu’entre autres, le gouvernement accroît sa crédibilité et que les pratiques comptables sont en phase avec les standards internationaux.
S’il est vrai et tel que nous l’avons souligné dans la sous-section précédente que l’harmonisation des réformes économiques et l’action sur l’environnement institutionnel constituaient une condition essentielle à l’optimalité de l’efficacité des politiques de privatisation, force est de noter également qu’une efficacité du contrôle des relations entre actionnaires et dirigeants est non moins indispensable pour optimiser l’efficacité des privatisations sur la rentabilité des firmes. La sous-section suivante mettra donc en lumière les conditions requises pour une efficacité du contrôle des relations entre actionnaires et dirigeants.
10 Donc, pas de barrière à l’entrée ni à la sortie comme des barrières juridiques ou encore l’attribution des droits exclusifs à certaines entreprises, accès par les entreprises aux mêmes informations, à la même technologie et aux mêmes services.
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