La feuille des aloès est divisée en deux fractions principales (figure 3) ; l’écorce vert externe (Rind) et le parenchyme sans couleur à l’intérieur. L’écorce est riche en dérivés de dihydroxyanthraquinones et leurs glycosides, tandis que le tissu de parenchyme ou la pulpe est riche en hydrates de carbone complexes, entre ces deux fraction se trouve un liquide de couleur jaune appelé : latex, suc ou la sève (Pillizoni et al., 2012).
– Le suc ou la sève : s’écoule spontanément d’une blessure des fibres péricycliques de la feuille et se transforme par dessiccation en une masse brune, il est riche en dérivés hydroxyanthracéniques (15 à 40%) et en particulièrement en aloïne (Botineau, 2010).
– Le gel ou la pulpe : constitué uniquement par le mucilage des grandes cellules centrales dans l’épaisseur de la feuille, ce gel contient surtout des polysaccharides (Botineau, 2010). Du fait de sa rapide dégradation à l’air libre par oxydation ; le gel frais ne pouvait être utilisé qu’immédiatement après avoir été extrait de la feuille (Donadieu, 2006).
Figure 03 : Structure de la feuille d’un aloès sous un microscope optique (Anonyme 1)
II.2.1. Composition chimique
La composition chimique des aloès est très compliquée, des études ont montré que les aloès contiennent plus de 160 composés chimiques, parmi lesquels 72 sont fonctionnels, comme les anthraquinones, les polysaccharides, les enzymes, les acides aminés, et l’eau qui constitue 96% du poids entier de la feuille (Li, 2009).
Les constituants chimiques des feuilles d’Aloe arborescens ont été étudiés par plusieurs chercheurs et ses constituants phénoliques sont considérés de grande importance (Kulkarni et al., 2013). Cette espèce est très riche en principes actifs, elle est considérée comme la plus riche en ces composés par rapport aux autres aloès ; elle contient environ cent principes actifs.
Aussi elle est riche en : acides aminés essentiels, beaucoup de vitamines, d’acide salicylique, de choline et de diverses formes de lipides, minéraux (zinc, manganèse, fer, germanium, chrome, magnésium, bore, et sélénium) (Nacci, 2008).
La composition chimique du gel est très complexe, il est composé principalement de polysaccharides, sucres solubles et de protéines (dont la plupart sont des enzymes), des acides aminés, des vitamines et des anthraquinones (Liu et al., 2007).
Le tableau suivant donne le pourcentage de quelques constituants des feuilles d’Aloe arborescens.
Tableau 04 : Quelques constituants des feuilles d’Aloe arborescens (dans 100g de feuilles sèches) (Floridi, 2005)
Bassetti et Sala (2005), ont divisé les différents composés des aloès en trois grands groupes :
• Les glucides ;
• Les anthraquinones ;
• Les constituants nutritifs.
a. Les glucides
Les glucides constituent 70% du poids sec de la feuille d’Aloe arborescens, ils se répartissent généralement dans le gel (Li, 2009).
Il y a plusieurs données concernant la structure et la teneur en glucides hydrosolubles de cette espèce, généralement ils sont divisés en : monosacharides et polysaccharides (Wozniewski et al., 1990).
– Monosaccharides : sont des glucides simples, notamment le glucose et le mannose avec des teneurs variant de 10 à 25% du poids sec (Bassetti et Sala, 2005 ; Floridi, 2005 ; Olennikov et al., 2009).
Chang et ses collaborateurs (2011), ont montré la présence d’autres monosaccharides libres dans le gel d’Aloe arborescens qui sont : le galactose, le xylose et le fructose.
– Polysaccharides : les polysaccarides ont la capacité de retenir l’eau contenue dans le gel.
Il s’agit de : cellulose, la pectine, la gomme arabe, l’acemannane et les aloemannanes ; qui sont des complexes hétérogènes contenant des composants de poids moléculaire de 15 à 90 kDa. L’hydrolyse de ces polysaccharides donne : le glucose, le fructose, le mannose, le galactose, le xylose, l’arabinose, le rhamnose, des acides et autres composants glucuroniques (Bastian et al., 2013 ; Li, 2009 ; Olennikov et al., 2009).
Selon Fakim et Schmelzer (2008), le gel d’Aloe arborecsens est riche en mannanes et glucomannanes, il contient de l’arborane A et de l’arborane B, connus par leurs effets hypoglycémiques. Ils ont supposé que les activités biologiques de ce gel sont dues au moins en partie, à ces polysaccharides.
Des substances pectiniques ont été isolées avec un rendement de 3,82% (Olennikov et al., 2009).L’épiderme de la feuille contient des lectines (aloctine A et aloctine B) (Bastian et al., 2013 ; Fakim et Schmelzeir, 2008).
b. Les anthraquinones
Les anthraquinones sont un grand groupe de substances phénoliques très répandus chez les plantes. Le goût amer typique de l’aloès est dû à ces composés (Bassetti et Sala ,2005). En outre, ces composés ont montré une large variété d’activités biologiques telles que : les activités antiinflammatoires, guérison de blessure, analgésiques, antipyrétiques, antimicrobiennes et antitumorales (Daiane et al., 2004 ; Liu et al., 2011).
Les feuilles les plus jeunes ont le contenu le plus élevé en ces composés ; le tiers terminal de chaque feuille a le contenu le plus élevé et le troisième tiers (basique) a le contenu le plus bas, et le contenu était plus élevé le long de la marge de la feuille, que celui des régions centrales (Shen et al., 2002 ).
Les anthraquinones peuvent être présents dans les racines des aloès (Daiane et al., 2004). Selon Floridi (2005), la feuille d’Aloe arborescens contient 12 anthraquinones (tableau 05) y compris :
1. L’aloïne
L’aloïne ou barbaloïne est un principe actif exclusif aux aloès, composé de glycosides d’anthraquinone ; qui est un mélange de deux stéréoisomères, l’aloïne A et l’aloïne B qui sont sensiblement situés dans l’écorce externe de la feuille (Pellizoni et al., 2012).
Ses effets thérapeutiques se résument en tant que purgatif, antibiotique, cathartique et émétique, il est responsable de l’activité antihistaminique (Bassetti et Sala, 2005 ; Fakim et Schmelzer, 2008 ; Schweizer 2006).
Liao et ses collaborateurs (2006), ont étudié la cytochimie de l’aloïne dans des feuilles d’Aloe arborescens, leurs résultats montrent que, l’aloïne est produit dans les plastes du tissu d’assimilation et stocké dans les vacuoles des cellules d’aloïne.
L’aloïne est couramment employé pour fabriquer plusieurs types des boissons, des produits alimentaires, des produits de beauté et pharmaceutiques (Daiane et al., 2004).
2. Isobarbaloïne
C’est également une partie des glycosides anthracéniques, il possède un effet analgésique marqué et agit en tant qu’antibiotique (Schweizer, 2006).
3. L’acide aloétique
C’est un hydroxy-méthyl-anthraquinone, ses propriétés spécifiques ne sont pas encore entièrement connues, mais il semble agir en tant qu’antibiotique naturel, particulièrement si synergiquement combiné avec le barbaloïne, l’isobarbaloïne et l’aloe-emodine (Bassetti et Sala, 2005 ; Schweizer, 2006).
4. L’aloe-emodine
Est un méthoxyanthraquinone dérivé de l’hydrolyse de l’aloïne pour former un sucre simple appelé l’arabinose et un composé appelé anthracène, il se trouve sous forme de traces dans la doublure au-dessous de la cuticule de la feuille. Il possède des propriétés laxatives, bactéricides et des effets anti tumoraux (Bassetti et Sala, 2005 ; Bastian et al., 2013).
Daiane et ces collaborateurs (2004), ont démontré que, l’aloe-emodine a un effet antiviral surtout contre le virus polio (Picornaviridae).
5. L’acide cinnamique
C’est un acide organique de formule (C6H5–CH=CHCOOH), il se trouve sous la forme d’une résine (Bassetti et Sala, 2005).
C’est un détergent, germicide et fongicide, il est principalement utilisé dans l’industrie du parfum, où ses esters de méthyle, d’éthyle et de benzyle sont odorants et recherchés. Il sert aussi pour la composition d’exhausteurs de goût (Schweizer, 2006).
6. L’acide salicylique
C’est le composant principal de l’aspirine et ses sels, les salicylates, sont employés comme analgésiques et anti-rheumatiques dans l’industrie pharmaceutique (Bassetti et Sala, 2005 ; Floridi, 2005).
7. L’acide chrysophanique
Son nom exact est 1,8 dihydroxy-3 méthylantraquinone, c’est un bon agent laxatif (Bassetti et Sala, 2005).
Tableau 05 : Structure chimique de quelques anthraquinones
– Autres composants anthracéniques et phénoliques de la feuille
Les pyrones (aloenïne, aloe arabinoside) semblent être des composés exclusifs d’Aloe arborescens et de peu d’autres espèces. Il a été montré qu’un échantillon d’exsudat d’Aloe arborescens séché par l’air chaud contient de l’aloenine (Bastian et al., 2013 ; Fakim et Schmelzer, 2008 ; Reynolds, 2004).
Aloe arborescens contient d’autres composants anthracéniques libres comme les 2-acétonyl-7-hydroxy-5-méthylchromones glycosylées (par exemple : l’aloésone, le furoaloésone) (Fakim et Schmelzeir, 2008).
D’autres composés phénoliques ont été isolés à partir des feuilles d’Aloe arborescens, les flavonoïdes sont très largement distribuées au niveau de la peau des feuilles, on peut trouver aussi l’isovitexine de flavones, l’apigénine, les naphtalènes, les noyaux tétraline, et le narigenine de flavanone, les tanins et les anthocyanines (Reynolds, 2004).
c. Les constituants nutritifs
– Les minéraux
Aloe arborescens est riche en sels minéraux (sodium, potassium, calcium, magnésium) et oligoéléments (manganèse, fer, cuivre, zinc, chrome, cobalt) (Bassetti et Sala, 2005 ; Floridi, 2005 ; Nacci, 2008).
Selon Reynolds (2004), le magnésium, le calcium et le manganèse ne constituent que 2%, 1% et 9% respectivement de toute la fraction minérale du gel, et donc il les a considéré comme des oligo-éléments, alors que le potassium et le sodium constituent 57% et 32% de la fraction minérale du gel d’Aloe arborescens respectivement.
Le tableau suivant résume la teneur du gel des feuilles d’Aloe arborescens en quelques minéraux en fonction de leurs états de maturité.
Tableau 06 : Teneur des feuilles d’Aloe arborescens en quelques minéraux en fonction de leurs état de maturité (mg/L) (O’Brien, 2005)
– Vitamines
Les aloès sont connus pour contenir de nombreuses vitamines, qui sont essentielles pour l’entretien de la cellule, croissance et intégrité cellulaire. Aloe arborescens s’est avérée riche en vitamines A, vitamine C et E, qui sont des antioxydants, et interviennent dans la réduction de l’inflammation dans les blessures. Aussi elle est riche en d’autres vitamines de groupe B telle que : B1, B2, B3, B6, B9, B12 (Bassetti et Sala, 2005 ; Reynolds, 2004 ; Schweizer, 2006).
– Les acides aminés
Aloe arborescens contient 20 acides aminés et possède 7 des 8 acides aminés essentiels qui doivent être apportés par l’alimentation (Isoleucine – leucine – lysine – méthionine – Phénylalanine – Thréonine – valine) (Floridi, 2005 ; Nacci, 2008 ; Reynolds, 2004).
– Protéines
Les protéines constituent 7% du poids sec de la feuille d’Aloe arborescens et contiennent les enzymes suivants : amylase, catalase, cellulase, lipase, l’oxydase, phosphatase et bradykinase (Bassetti et Sala, 2005 ; Floridi, 2005 ; Schweizer ,2006).
– Lipides
Les lipides constituent 2 % du poids sec de la feuille d’Aloe arborescens. Ils contribuent à prévenir la perte des cheveux. Leur teneur varie selon les saisons de 0,13 g/100g de la feuille en hiver à 0,42g/100g en été (Bassetti et Sala, 2005. Beppu et al., 2003 ; Li, 2009 ; Merghem, 2009 ; Nacci, 2008).
Aloe arborescens contient d’autres composants sous forme de traces comme les phytostérols (β-sitosterol), triterpenes saponine, lignine et le furfuranne (Floridi, 2005 ; Reynolds, 2004).
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