Doit-on parler d’intégration ou d’inclusion de nos jours ? Ces deux concepts sont bien souvent confondus ou ramenés à la même définition par notre société, qui semble toujours aussi ignorante face au sujet. Les questions du handicap, de l’inclusion scolaire, contrairement à ce que l’on pourrait penser, sont encore loin d’être acquises par tous. Selon Henri Jacques STIKER, « les sociétés n’ont jamais réussi à intégrer la différence en tant que telle. Ou bien le groupe social l’intègre pour la faire disparaître, ou bien il l’intègre partiellement en excluant davantage certaines formes, ou bien il l’exclut assez radicalement tout en se donnant une certaine représentation de l’intégration. » [1]
Quand nous parlons d’intégration, nous attendons que la personne s’intègre d’elle-même, qu’elle s’adapte à nos normes. Nous cherchons à savoir ce qu’elle ne peut pas faire avant de réfléchir à ce qu’elle pourrait savoir faire. Pour Henri Jacques STIKER, il s’agit en réalité d’une mise à l’écart engendrée par l’intégration : « l’intégration prévue par les lois, les administrations et les institutions me parait une intégration de l’oubli, de la disparition, de la conformité, de la normalisation. (…) Les infirmes, et de toutes sortes désormais, sont établis en tant que catégories à réintégrer, donc à réadapter.
Paradoxalement, ils sont désignés pour disparaître, ils sont dits pour être tus. » [2] Au contraire, d’après Siri WORMNAES et Marie-Françoise CROUZIER, l’inclusion « décrit une réforme de l’école ordinaire. (…) Elle constitue une force qui s’appuie sur les capacités existantes. Elle implique une évaluation de ce que l’enfant peut faire plutôt que de ce qu’il ne peut pas faire. Elle requiert aussi une évaluation de ce que l’école est capable de mettre en oeuvre. (…) Dans cette perspective, une personne en situation de handicap est considérée non pas comme faible et indigente, mais comme forte et compétente pour traiter ses propres affaires. » [3]
On ne doit donc plus confondre intégration et inclusion, qui sont deux concepts très différents, voire opposés : ce n’est plus à la personne déficiente de s’adapter à son environnement, mais bien l’environnement dans son ensemble (matériel, humain) qui doit faire le nécessaire pour l’accueillir au mieux.
[1] STIKER, Henri-Jacques. 2005. Corps infirmes et sociétés. Paris, Dunod, p.227
[2] STIKER, Henri-Jacques. 2005. Corps infirmes et sociétés, op.cit, p.143
[3] Ibid, p.77