Pourquoi souscrire une assurance ? Nous recourons à l’assurance parce que la loi pose
une obligation d’assurance en matière de responsabilité civile à l’égard de tiers, mais parce que,
dans les domaines où elle ne l’est pas, elle est à même de répondre à un besoins réels de
garantie. Cette opération d’assurance s’implante dans la vie courante de la population des
pays développés comme celui de la France. Chaque personne fait appel à l’assurance quand
elle achète le véhicule ou acquiert la nouvelle maison, etc. Toutefois, ce n’est pas le cas au
Cambodge, qui est un pays en voie de développement dont la plupart des citoyens sont pauvres
et où l’existence de la solidarité familiale et collective demeure très forte. La sécurité
assurantielle n’est pas la chose indispensable pour les Cambodgiens. Ces derniers pensent
essentiellement aux besoins de la vie quotidienne. Cependant, le monde actuel change, la
solidarité familiale et collective disparaît petit à petit laissant place à l’individualisme. Ce qui
ouvre les portes pour le développement de l’assurance au Cambodge. Il convient tout d’abord
de connaître l’évolution de l’assurance en général (I) avant de passer à l’état de l’assurance
automobile au Cambodge (II).
I. Evolution du marché d’assurance au Cambodge
A vrai dire, la notion d’assurance existe au Cambodge depuis 1964 par le biais de la
création de la société nationale d’assurance (SNC)(1). Mais, celle-ci a été effacée par le régime
des Khmers rouges. Jusqu’aux années 1990, l’assurance a été oubliée. Il fallait attendre la
création de la compagnie d’assurance CAMINCO en 1992(2). C’est à partir de ce moment, nous
pouvons alors reparler de l’assurance au Cambodge. La création de cette compagnie était en
hors du cadre juridique, c’est-à-dire qu’à cette époque, il n’y avait pas encore de texte juridique
régissant ce domaine. Malgré cette absence de législation, l’assurance a commencé à se
développer dans la pratique. Ensuite, Par souci de la protection de souscripteurs, d’assurés et
d’assureur, une loi sur les assurances a été adoptée le 20 juin 2000, suivie par son sous-décret
d’application du 22 octobre 2001.
L’adoption de ces deux instruments constitue un facteur important pour le
développement du marché d’assurance au Cambodge. Autrement dit, ils ont supprimé le
monopole de la compagnie d’assurance CAMINCO au profit des autres investisseurs nationaux
et étrangers. C’est à partir de cette période que la concurrence dans le domaine de l’assurance
a commencé à revoir le jour au Cambodge. A titre d’illustration, 5 compagnies d’assurances et 1
compagnie de réassurance sont nées consécutivement à savoir :
– Forte insurance(3) : cette compagnie a été créée en 1996. Elle propose les produits
d’assurance comme l’assurance de responsabilité civile, l’assurance groupe pour
hospitalisation et intervention chirurgicale, l’assurance de responsabilité professionnelle,
l’assurance incendie, l’assurance contre cambriolage, l’assurance de véhicule terrestre à
moteur et l’assurance multirisque habitation, etc. ;
– Asia insurance (CAMBODIA) PLC(4) : elle a été créée en 1996 et a obtenu l’agrément en
2003. L’assurance incendie, de perte d’exploitation, l’assurance maritime, l’assurance
d’érection, l’assurance multirisque industrielle et informatique, l’assurance construction sont
proposées par cette compagnie ;
– Infinity insurance : elle a été créée en 2007 ;
– CAMPUBANK LONPAC INSURANCE a été établie le 15 août 2007 sur le territoire
cambodgien ;
-CAMBODIAN-VIETNAM INSURANCE COMPANY a été installée et a lancé ses produits
d’assurance le 14 novembre 2009 ; et
– La dernière compagnie, c’est CAMBODIA RE qui est l’unique compagnie de
réassurance au Cambodge qui est née en 2002 afin d’aider les compagnies d’assurances locales
et d’empêcher certaines primes de sortir du pays. Pour cette raison, tous les assureurs sont
obligées de céder à la Cambodia RE leurs portefeuilles au moins 20 %.
II. Marché d’assurance automobile au Cambodge
La loi sur les assurances impose une obligation d’assurance mais elle est réduite à
certaines catégories de véhicules qui sont bien précisés par cette loi. Cette obligation est donc
plus restreinte que celle posée par le droit français, selon lequel tout véhicule qui a vocation à
circuler sur le sol français doit être assuré par une assurance de responsabilité civile. Cette
disposition est une volonté du gouvernement cambodgien qui a pris l’initiative de préparer un
projet de loi en 2010 en ce sens. Cette volonté a été marquée par le souci d’indemnisation de la
victime d’accidents de la circulation qui se multiplient d’année en année. Pour illustrer ce
propos, le nombre d’accidents routiers connaissent une augmentation de 217% et le nombre de
la mortalité routière est presque doublé au cours des cinq dernières années(5), ce qui est
différent de la situation en France qui connaît une baisse de 6,6 % de la mortalité routière en
2010 par rapport à l’année 2009(6).
A partir de la mise en place de l’assurance automobile obligatoire, la prime ne cesse
d’augmenter. Elle était de 4, 251,992 de dollars américains en 2008 contre 892,214 en 2000(7).
En France, les encaissements de la branche automobile se sont élevés à 17,87 milliards d’euros
en 2005, en croissance de 1,4 % par rapport à 2002(8).
Au Cambodge, l’assurance automobile occupe la deuxième place après l’assurance
incendie. Elle représente 20,64% des chiffres d’affaires de l’assurance de dommage(9), alors
qu’elle s’élève à 43% en France(10).
A vrai dire, la souscription de l’assurance automobile au Cambodge n’est pas parce
qu’elle est une obligation imposée par la loi mais parce que le souscripteur a besoin d’une
garantie pour son patrimoine personnel. Autrement dit, cette obligation demeure très
théorique et aucune sanction ne s’avère effective en cas de non respect des dispositions de la
loi. Par conséquent, la majorité des véhicules ne sont pas assurés. Parallèlement, les victimes
qui ne sont pas indemnisées ou sont indemnisées partiellement augmentent de manière
préoccupante par rapport à la multiplication de nombre d’accidents au Cambodge. Ces
problèmes constituent donc des sujets au coeur de ce travail qui propose de mettre en place
une obligation d’assurance généralisée effective et efficace afin de mieux traiter les victimes
d’accidents de la circulation.
Le développement de l’assurance automobile au Cambodge ne se heurte pas seulement
au problème de l’application de texte juridique mais également à celui du manque de
spécialistes compétents, de pauvreté, de l’ignorance et de l’indifférence de la population vis-àvis
de l’assurance.
Face à ces problèmes, il est donc difficile d’imaginer qu’une assurance automobile
généralisée pourrait être mise en place sans difficulté. Mais, en tout état de cause, nous
restons optimistes.
Le titre premier de ce travail sera consacré à la mise en place de l’assurance automobile
obligatoire partielle, suivie des critiques et améliorations pour que l’assurance automobile
généralisée puisse être mise en place de manière effective et efficace (Titre I). Dans un
deuxième temps, il est nécessaire d’envisager le but de l’assurance automobile et le moyen de
renforcer le droit à réparation de la victime (Titre II). Il faut noter que cette étude sera faite à
la lumière du droit français.
1 Chhun KEAT, discours pendant la cérémonie de présentation de l’agrément à la société nationale d’assurance
cambodgienne, CAMINCO, le 8 janvier 2003, in revue Economique et Financière du Ministère de l’Economie et des
finances du Cambodge, n°. 29, 1er semestre 2003.
2 Bulletin de l’assurance de l’association générale d’assurance du Cambodge, n°.01 janvier 2010, p39.
3 Www.forteinsurance.com
4 Www.asiainsurance.com.kh
5 Www.roadsafetycambodia.info
6 Www.preventionroutiere.asso.fr/Nos-publications/Statistiques-d-accidents
7 Bulletin de l’assurance du Cambodge, n°01, janvier, 2010, p.58
8 Lamy assurances, édition 2011, N 2619, p.1100
9 Bulletin de l’assurance du Cambodge, n°01, janvier, 2010, p.59
10 Lamy assurances, édition 2011, n°. 2619, p.1100