Les accidents liés aux piqûres de scorpion (PS) constituent un véritable problème dans de nombreux pays d’Amérique, d’Afrique et du proche orient où la mortalité due à ces arthropodes dépasse celle engendrée par d’autres animaux venimeux (Pera 1989).
Répartis dans la bande qui sépare les 45ème parallèles, il existe environ 1500 espèces de scorpions sur la terre (Predini 2005) dont seules 50 espèces seraient responsables d’envenimations sévères chez l’homme (Mullen 2002, Ozkan 2003) et de 40000 décès par an dans le monde (Toureilles 2002).
En Afrique, on compte près de 30000 envenimations et 5000 décès par an (Polis 1990), concentrés essentiellement dans les pays du Nord (Goyffon 2001).
En Afrique du Nord, l’incidence annuelle est comprise entre 50 et 420 piqûres pour 100000 habitants. La mortalité annuelle est comprise entre 0,27 et 2,8 pour 100 000 habitants (Chippaux 2008).
Quand au scorpionisme d’Afrique subsaharienne ; c’est une réalité mal connue mais qui est cependant considéré comme un problème de santé publique dans cette vaste région dont le Niger (Goyffon 2002) et le Soudan (Goyffon 2007).
Au Maroc, les piqûres de scorpion (PS) occupent la première place (30 %) de la totalité des intoxications déclarées au Centre Antipoison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM).
Les régions les plus touchées sont les provinces du Sud et du Centre- Sud du royaume. L’incidence moyenne est de 0.53 ‰ et le taux de létalité global est de 8.2‰, pouvant atteindre 53‰ dans certaines zones. Dans 90% des cas, les décès concernent les enfants de moins de 10 ans (Soulaymani Bencheikh R. 2002).
Les conséquences économiques et sociales sont importantes puisque cette pathologie occupe 5% de l’activité des urgences, 6.3% de l’activité des services de réanimation et en général des millions de dirhams sont dépensés chaque année pour l’achat de médicaments. En plus, des dépenses de la population rurale vers les hôpitaux et a des conséquences sur le développement de la structure familiale en cas de mort brutale d’enfants jeunes en bonne santé (Soulaymani Bencheikh R. 1999).
Conscient de l’importance et de la gravité des piqûres et des envenimations scorpioniques au Maroc, et afin d’accomplir au mieux ses missions, le centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc (CAPM) s’est engagé depuis 1990 à surveiller plus particulièrement cette pathologie. Le résultat en a été l’élaboration d’une stratégie nationale de lutte contre les piqûres et les envenimations scorpioniques (Annexe 1), objet d’une circulaire ministérielle (DELM/ INH/ CAPM du 17 mars 1999) adressée à toutes les régions du Maroc avec des recommandations pour sa mise en place.
L’objectif général de cette stratégie est de diminuer la morbidité et la mortalité causées par l’envenimation scorpionique.
L’une des composantes principales de la stratégie de lutte contre les piqûres et les envenimations scorpioniques est l’installation d’un système d’information.
Quatre supports d’information permettant de standardiser l’information sur les piqûres et les envenimations scorpioniques ont été élaborés: le registre, les fiches de référence, les fiches de contre référence, les dossiers d’hospitalisation et les relevés mensuels.
Ces supports ont pour objectif de suivre les différents indicateurs de morbidité et de mortalité liés à ce problème et par conséquent d’évaluer l’impact de la stratégie.
L’objectif de notre travail est d’évaluer, sur une période de cinq années, le registre des piqûres et des envenimations scorpioniques d’une province à incidence et à létalité élevée (Khouribga) et le relevé national incluant cette province, de tracer le profil épidémiologique de cette pathologie, de définir et déterminer les facteurs de mauvais pronostic et de comparer notre analyse aux données moyennes du relevé mensuel des différentes régions du Maroc. A travers notre travail, nous souhaitons réduire l’incidence des piqûres de scorpion, améliorer le comportement de la population et des professionnels de santé vis à – vis des piqûres de scorpion, améliorer la prise en charge thérapeutique des malades piqués par le scorpion, rationaliser l’utilisation des services et réaliser des cartes épidémiologiques représentant la distribution des incidences, de la létalité et de la mortalité.
Ces cartes sont confrontées avec une carte synthétique de la répartition de quelques espèces scorpioniques dressée à partir de données bibliographiques. Des missions ont également été réalisées dans le but de collecter différents scorpions pour une détermination et ainsi, connaître les scorpions responsables d’envenimations sévères.
Une détermination d’espèces scorpioniques récoltées à Khouribga et au niveau d’autres régions du Maroc a été réalisée à partir de la description donnée par Vachon (1952).