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INTRODUCTION

A l’instar des polices « D&O », l’assurance des réclamations liées aux rapports
sociaux a connu ses premiers développements aux Etats-Unis. Cette création est le fruit de
l’évolution des mentalités et du droit américain en matière d’emploi.

Le droit du travail américain est gouverné par la notion d’« employee-at-will ». Ce principe
permet à l’employeur ainsi qu’au salarié de rompre un contrat de travail sans avoir à se
justifier. Les abus de cette rupture non motivée ont contraint le Président John F. Kennedy à
prendre des mesures qui furent le point de départ d’une nouvelle ère. C’est en mars 1961 qu’il
présente sa nouvelle politique en matière d’emploi. Par la voie de l’« executive order »(1), il
oblige les programmes financés par le gouvernement fédéral à assurer que l’emploi public ne
soit pas soumis aux discriminations raciales. L’évolution de cette nouvelle politique a permis
l’adoption du Civil Rights Act de 1964 qui interdit toute discrimination en matière d’emploi.

L’adoption de ce texte à valeur constitutionnelle a entrainé une inflation législative. En effet,
le système juridique décentralisé des Etats-Unis est aujourd’hui marqué par la coexistence de
nombreuses lois fédérales et étatiques en matière d’emploi. Ce renforcement de la législation
associé à la passion du peuple américain pour la justice, a mené inexorablement à
l’augmentation des litiges liés à l’emploi. Entre 1997 et 2011, les recours judiciaires ont
augmenté de 24 % pour atteindre le nombre de 99 947. L’inflation extraordinaire de ces
réclamations demeure encore un particularisme américain.

Néanmoins, une évolution similaire a été observée au cours de ces dernières années en
Europe. En effet, l’adoption des trois directives(2) a imposé la modernisation du droit des
salariés dans l’ensemble des pays européens. La France n’a pas échappé à la pression du droit
communautaire. Ces évolutions législatives imposées par l’Union Européenne ont nécessité la
refonte du Code du travail qui est entrée en vigueur le 1er mai 2008. Enfin, la loi du 27 mai
2008 sur les discriminations est venue uniformiser le régime applicable.

Ces dernières évolutions législatives ont confronté l’employeur à un nouveau régime de
responsabilité. Devant ce risque nouveau, les entreprises ont cherché à se prémunir. C’est
donc logiquement qu’elles se sont tournées vers l’assurance. Depuis 2002, le marché de
l’assurance français constate une hausse significative des demandes. En effet, à cette époque
la demande était déjà telle que La Tribune a publié un article afin d’expliquer ce nouveau
phénomène(3).

Mais quel est l’intérêt de la garantie des rapports sociaux pour l’employeur ? Quels risques
couvre-t-elle ? Le marché assurantiel français offre-t-il une couverture suffisante ? Telles sont
les questions que beaucoup d’employeurs se posent encore. Malgré son émergence il y a dix
ans, l’assurance des rapports sociaux semble être encore en plein essor.

Pour autant, les employeurs français devraient être conscient du risque de responsabilité
sociale qu’ils encourent (Partie 1). Cette simple prise de conscience leur permettrait d’étudier
avec plus d’attention l’offre assurantielle (Partie 2).

1 Executive order n°10905
2 Directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 interdisant la discrimination basée sur l’origine raciale ou ethnique ;
Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 relative à l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail
(interdiction de la discrimination en matière d’emploi sur la base de la religion, des convictions, du handicap de
l’âge ou de l’orientation sexuelle) ; Directive 2002/73/CE du 23 septembre 2002 relative à l’égalité de
traitement entre les hommes et les femmes concernant l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion
professionnelle et les conditions de travail.
3 « Confrontées aux pressions des salariés, les entreprises françaises s’assurent », La Tribune, 28 octobre 2002.

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